L’immobilier coté, une opportunité après le pivot

Matthieu Lavillunière, SILEX

2 minutes de lecture

Alors que le cycle de baisse de taux est engagé, les foncières, dont le modèle implique un fort endettement, sont une opportunité à regarder.

Les foncières cotées ont fait partie des victimes du retour de l’inflation et du mouvement de hausse des taux d’intérêt à partir du fin 2021-début 2022, dans le contexte de la réouverture post-Covid et de la hausse des prix des matières premières liée à l’invasion de l’Ukraine.

Or, le mouvement inverse est désormais engagé: la Réserve fédérale de Jerome Powell a rejoint la semaine dernière la BNS, la BCE, la Bank of England et d’autres banques centrales dans leur mouvement de pivot sur les taux directeurs, avec pour la Fed une première baisse de 50 points de base qui ressemble presque à un rattrapage du mouvement initié plus tôt par ses consœurs. L’une des données, certes attendue mais néanmoins nouvelle, du contexte d’investissement actuel, est donc que les taux directeurs sont orientés à la baisse dans un mouvement voué à se poursuivre (deux autres baisses de 25 points de base sont attendues d’ici la fin de l’année pour la Fed).

Le prix des actifs ne va pas rebondir violemment, même s’il a clairement touché un point bas sur beaucoup de segments en Europe fin 2023 ou au cours du premier semestre 2024.

L’immobilier apparait comme un bénéficiaire structurel de ce nouveau contexte. Dans le monde des marchés listés, les sociétés cotées positionnées sur ce secteur sont pour l’essentiel des foncières, dont le modèle d’affaires consiste à détenir un portefeuille de biens immobiliers financés par un montant substantiel de dette. Un contexte de taux plus bas bénéficie aux deux pattes de ce modèle: il tend à réduire le coût de la dette, permettant aux foncières de s’endetter moins cher, et tend à accroître la valeur des actifs immobiliers, dans la mesure où la capacité d’acquisition de tous les acheteurs potentiels bénéficie elle aussi d’un endettement moins onéreux.

Le cercle vicieux, qui dans les années récentes voyait la valeur des biens baisser et ainsi mettre la pression sur la structure financière des foncières (les montants de dette étant eux inchangés) et les forçant souvent à vendre quelques actifs sur un marché avec décote, de nombreux acheteurs potentiels se retrouvant dans la même situation, peut vite laisser place à un cercle vertueux, dans lequel le rebond de la valeur des biens donne de l’air à la structure financière des foncière et stimule l’appétit pour des acquisitions de biens, poussant leur prix à la hausse.

Une nuance est cependant à apporter: le secteur connait dans tous ses mouvements une inertie importante, liée à la longueur des projets (de construction ou de rénovation), à la valeur élevée des actifs (plusieurs centaines de millions de francs pour un centre commercial d’envergure en Europe) et à la très grande diversité des opportunités. Le prix des actifs ne va pas rebondir violemment, même s’il a clairement touché un point bas sur beaucoup de segments en Europe fin 2023 ou au cours du premier semestre 2024, notamment car beaucoup d’acteurs n’ont pas encore terminé leur politique de réduction de leur levier financier et ne vont donc pas se ruer à l’achat. La structure des passifs, diversifiée, généralement à taux fixe et sur des durées généralement longues, ne permettra par ailleurs aux foncières de bénéficier de la baisse du coût du crédit que de manière progressive.

Par ailleurs, le secteur est plus hétérogène qu’il n’y parait, avec des dynamiques disparates. Le rapport aux centres commerciaux a été structurellement transformé par la période Covid. Le marché des bureaux continue d’être séparé par une demande très forte pour certains actifs dits prime et une désaffection pour d’autres segments, notamment en périphérie des villes. Le marché résidentiel est lui, aussi, marqué par une demande concentrée sur les métropoles. Il s’agit donc d’une opportunité d’investissement intéressante selon nous, qui peut être investie de différentes manière, sur le marché du crédit comme celui des actions, mais qui nécessite de sélectionner attentivement les sous-jacents.

A lire aussi...