Les pouvoirs accrus du médiateur bancaire

Yves Hulmann

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Tous les prestataires de services financiers doivent être affiliés à un organe de médiation. Analyse de Marco Franchetti, l’ombudsman des banques.

Institution bien ancrée dans le paysage bancaire helvétique depuis plus d’un quart de siècle, l’Ombudsman des banques suisses dispose désormais de responsabilités accrues suite à la mise en œuvre de la loi sur les services financiers (LSFin). Fin juin, le Département fédéral des finances (DFF) a en effet reconnu l’Ombudsman des banques suisses en tant qu’organe de médiation au sens de la LSFin.

L’absence de succès d’investissement ne suffit pas pour justifier une plainte.

Parmi les conséquences qui en résultent, ce sont non seulement les banques mais aussi, en principe, tous les prestataires de services financiers qui sont désormais tenus de s’affilier à un organe de médiation. L’Association suisse des banquiers (SwissBanking) a décidé que l’Ombudsman des banques remplirait cette fonction pour tous les établissements membres. Une exigence qui s’applique aussi aux prestataires qui n’ont pas de licence bancaire, a précisé jeudi Marco Franchetti, l’ombudsman des banques, lors d'une conférence de presse tenue par vidéoconférence.

L’élargissement du champ d’activité de l’instance de médiation se traduit déjà par une modification du champ lexical utilisé: ainsi, le terme de «client de banque» a été remplacé par celui de «client» tout court, et celui de «banque» par «établissement», a illustré l’ombudsman des banques. Plus généralement, les règles que la LSFin impose aux prestataires de services financiers, comme l’obligation de vérifier le caractère approprié ou de l’adéquation dans le cadre des services de conseil en placement, auront aussi un impact sur les activités de l’instance de médiation. 

«Le risque de placement reste en principe supporté par le client.»

En revanche, rappelle l’ombudsman, le risque de placement reste en principe supporté par le client. Souvent, les clients s’attendent à ce que la banque soit tenue pour responsable en cas de résultats d’investissements insatisfaisants ou de pertes. Même s'il juge de telles déceptions comme «compréhensibles», l'ombudsman souligne qu’il «doit souvent décevoir ces clients». «Le prestataire de services ne doit pas au client un succès d’investissement spécifique, mais une exécution soigneuse du mandat», différencie-t-il.

Hypothèques: des recours à propos des résiliations anticipées

Un autre domaine qui a suscité un certain nombre de conflits entre les banques et leurs client, mais aussi avec le médiateur lui-même, est celui des pénalités imposées aux clients dans le cadre d’une résiliation anticipée des hypothèques. A ce sujet, l’ombudsman souligne qu’il s’est montré critique sur la pratique d’un groupe de banques consistant à faire payer aux clients des taux de réinvestissement négatifs en cas de remboursement anticipé d’hypothèques à taux fixe. Cela en plus des taux d’intérêt convenus pour la durée restante. De nombreux clients se sont plaints auprès de l’instance depuis 2015 déjà. Or, souligne, des décisions de justice ont donné raison aux clients. Cela a notamment été le cas dans le cadre d’une décision d’un tribunal (Obergericht) du canton de Zurich. Par la suite, des solutions ont pu être trouvées dans certains cas entre les clients et les banques, soit directement ou via l’intermédiaire de l’ombudsman. Dans d’autres situations, cela n’a toutefois pas été le cas. 

«La responsabilité de la banque est souvent difficile à établir.»

Côté chiffres, l’Ombudsman des banques a traité en tout 2013 dossiers en 2019, soit une hausse de 5% par rapport à l’an précédant. Dans 94% des cas où l’instance de médiation a demandé une mise en conformité, la banque a suivi sa recommandation.

Fraudes: appel à la prudence aux détenteurs de cartes

Quel impact la crise du coronavirus a-t-elle eu sur les rapports que les clients entretiennent avec leurs banques? A ce sujet, l’accroissement des opérations de paiement sans numéraire durant le confinement a favorisé les cas de fraudes. Le relèvement de la limite pour les paiements sans contact ne nécessitant pas la saisie du code NIP, portée à 80 francs durant la crise au lieu des 40 francs habituels, a aussi facilité les abus. A cet égard, l’ombudsman se montre de plus en plus préoccupé par les cas où des clients se sont plaints que les banques refusaient de les indemniser pour les pertes causées par des fraudeurs. Marco Franchetti ne peut que recommander aux clients d’être prudents lors de l'utilisation de leurs cartes: «La responsabilité de la banque est souvent difficile à établir», prévient-il. Et même s’il arrive que les banques, respectivement les systèmes utilisés, parviennent désormais à détecter à temps certaines fraudes, par exemple en cas de hausse inhabituelle du nombre de transactions, il ne faut pas toujours compter sur de tels avertissements, conseille-t-il.

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