En attendant Thanksgiving

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

©Keystone
AstraZeneca entre en piste

Il fallait être long 30 ans la semaine dernière! Après être repassés sous les 1,70% les taux longs ont poursuivi leur rally pour terminer à 1,52% vendredi soir, pratiquement à leur niveau du matin du 4 novembre lorsque les premiers résultats donnaient Biden vainqueur mais sans vague bleue au Sénat. Nous avions soldé toute notre position en taux nominaux à 30 ans ce jour-là mais après deux semaines de tension – toute relative – c’est retour à la case départ! Le 10 ans US ne nous raconte pas tout à fait la même histoire car si nous sommes redescendus des 0,97% touchés le 10 novembre, nous sommes toujours sur un niveau qui se situe à une dizaine de points de base au-dessus de celui du 4 novembre, soit 0,85% contre 0,75%. Il y a donc une petite marge théorique pour que le 10 ans imite son grand frère pour revoir les plus bas post-élections, légèrement au-dessus de 0,70%. A priori, ce n’est pas pour tout de suite car l’annonce hier d’un nouveau vaccin AstraZeneca a favorisé les marchés à risque au détriment des safe havens. 

Il nous semble vain de prendre des paris audacieux
sur les niveaux de taux des Treasuries.

La semaine va être courte et sur les niveaux actuels, il nous semble vain de prendre des paris audacieux sur les niveaux de taux des Treasuries. Notre conviction reste intacte: oui, les taux peuvent monter un peu et oui, il peut y avoir un peu de steepening de courbe mais si ce mouvement prend de l’ampleur (au-delà de 1,10% sur le 10 ans par exemple), la Fed sifflera la fin de la récréation car elle n’a pas d’autre choix! De plus, à ceux qui nous affirment que si les taux longs montent violemment, les positions en Treasuries essuieraient des pertes, nous répondons que ces pertes seraient certes non négligeables mais sans commune mesure avec un potentiel sell-off sur les actions. En effet, ces dernières ne sont pas dérangées par une petite repentification mais seulement jusqu’à un certain point où cela commence à devenir toxiques pour elles. Et à ce moment-là… 

2021 dans la ligne de mire

Sur les marchés de taux, nous avions coutume de dire que la trêve de fin d’année démarrait avec Thanksgiving. Cela est un peu moins vrai de nos jours mais force est de constater que cette fête marque le début d’une période qui se caractérise par une baisse sensible de la liquidité et une activité mois soutenue sur le marché primaire. Ainsi, comme depuis de nombreuses années, nous essayons, dans la mesure du possible, de positionner nos portefeuilles en adéquation avec la stratégie déterminée pour le début de l’année suivante avant Thanksgiving. Cette année étant très particulière à de nombreux égards (cela n’aura échappé à personne), nous pensons qu’il sera encore possible de traiter des crédits début décembre. Mais nous avons d’ores et déjà esquissé les grandes lignes de ce que sera notre stratégie en ce début d’année 2021 (sauf accident ou black swan de dernière minute): moins de risque de duration pure et plus de risque de spreads. 

Nous essaierons, si possible, de verdir
nos portefeuilles mais pas à n’importe quel prix!

Des spreads au pluriel car nous explorons trois univers: les crédits seniors Investment Grade, les émergents (souverains et crédits) ainsi que les hybrides corporates. Les hybrides auront sans doute le vent en poupe, tirées par la bonne tenue des marchés actions et par le retour vraisemblable d’un marché primaire conséquent l’année prochaine. Nous croyons beaucoup aux émergents également mais il faudra suivre l’évolution du dollar qui, dans ce secteur, revêt une importance primordiale. 2021 sera également l’année des green bonds et nous essaierons, si possible, de verdir nos portefeuilles mais pas à n’importe quel prix! Etant donné que green bond ne signifie pas automatiquement ESG/SRI compatible, il faudra séparer le bon grain de l’ivraie mais le marché n’a pas attendu 2021 pour être attentif à cette problématique. Un dernier mot sur les taux réels: ils ont sans doute atteint leur plus bas mais rien n’est moins sûr. En termes relatifs, si les taux nominaux devaient remonter légèrement au gré de craintes inflationnistes, les TIPS devraient tirer leur épingle du jeu en comparaison avec les emprunts à taux nominaux. En effet, craintes inflationnistes et direction du dollar devraient animer les débats au cours de cette année 2021 car en ce qui concerne les banques centrales, le scénario semble écrit d’avance.

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