6 et 12 juin: à vos agendas!

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

2 minutes de lecture

Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

 

Fed et BCE: les «faulombes» de retour

A tout seigneur tout honneur et par ordre chronologique, commençons par la BCE. Madame Lagarde a déclaré que la banque centrale révisait sa projection d’inflation 2024 de 2,7% à 2,3% en ajoutant que l’objectif de 2% serait atteint en 2025 mais que les membres de la BCE ne sont «pas suffisamment confiants» dans ces prévisions. Il s’agit donc d’une attitude dovish-mais-pas-trop plutôt surprenante qui a surpris les marchés. Pendant que Christine Lagarde parlait, les taux allemands à 2, 5 et 10 ans baissaient uniformément de 5bp alors que dans un tel contexte, nous aurions dû assister à un bullish steepening avec une forte détente des taux à 2 et 5 ans assortis d’une plus faible baisse des taux longs.

En résumé, il faut tout de même retenir que la zone euro, en quasi-récession (déjà en récession dans certaines régions et non des moindres), va voir son taux d’inflation diminuer au cours de cette année. La porte est donc ouverte pour un premier assouplissement monétaire le 6 juin, soit six jours avant un FOMC crucial.

Du côté de la Fed, Jerome Powell a révélé que les banquiers centraux américains n’étaient «pas loin» d’atteindre le niveau de confiance nécessaire pour envisager une première baisse de taux. Nous savons tous désormais que certains faucons, dont le chef de file se nomme M. Waller, s’inquiètent et mettent désormais en avant le Super-Core PCE pour retarder au maximum le passage à l’acte. L’inflation dans certains secteurs comme les services est certes inquiétante mais la Fed a surtout besoin de ne pas entamer sa crédibilité.

Jay Powell va batailler en interne mais il est vraisemblable que la première baisse de taux de la Fed aura lieu le 12 juin.

Si nous écoutons M. Waller et ses amis, il faudrait conclure que la Fed a dit en septembre 2023 «aucune baisse de taux en 2024», puis s’est ravisée en octobre (6 semaines après) pour annoncer «trois baisses en 2024» et aujourd’hui, elle nous dirait «finalement, nous revenons à ce que nous avions annoncé en septembre». Tout cela en changeant la règle du jeu en plein match car si la banque centrale nous dit privilégier telle ou telle statistique d’inflation, ce n’est pas pour en sortir subitement une autre de son chapeau lorsque cela l’arrange. Jay Powell va batailler en interne mais il est vraisemblable que la première baisse de taux de la Fed aura lieu le 12 juin.

La blague des Non-Farm Payrolls

Connaissez-vous cette blague qui faisait fureur à Wall Street dans les années 2000? Une maman se promène dans Central Park avec son petit garçon et une dame âgée s’approche d’eux: «qu’il est mignon ce petit garçon, quel âge as-tu mon petit?» et l’enfant répond «5 ans madame, euh... Non, 4 ans et demi… Non, 6 ans!». La maman s’approche et dit «Excusez-le madame, son papa travaille au BLS». Tout est dit! Enchaîner les créations d’emplois à 350'000 tous les mois, c’était trop beau pour être vrai. Nous sommes revenus sur des chiffres beaucoup plus raisonnables qui restent toutefois plutôt bons et toujours compatibles avec le discours ambiant de soft landing. Mais la douche froide a tout de même surpris les plus candides d’entre nous.

Une statistique chassant l’autre, nous allons retenir notre souffle cet après-midi avec les premières statistiques d’inflation pour le mois de février. Les marchés s’attendent à un CPI YoY stable à 3,1% tandis que le CPI Core (hors alimentation et énergie) devrait légèrement reculer, de 3,9% à 3,7%. Des chiffres conformes aux attentes valideraient le bull market de la semaine dernière (-15bp sur toute la courbe) et pourraient envoyer les taux Treasuries à 5 et 10 ans au-dessous de 4%. Nous surveillerons également les TIPS 5 ans qui, à 1,8% de rendement réel, nous semblent toujours attrayants à la fois en absolu et en relatif par rapport au niveau des taux nominaux.

Enfin, nous continuerons de surveiller les adjudications du Trésor. Après 56 milliards de 3 ans émis hier soir, ce sera le tour du 10 ans ce soir pour 39 milliards et du 30 ans demain pour 22 milliards. Le 20 ans sera également concerné, mais le 19 mars pour un montant qui n’a pas encore été dévoilé.

Si nous devions ne retenir qu’une information parmi toutes celles qui ont jalonné cette semaine riche en événements, ce serait le retour des «faulombes», des banquiers centraux enfin proches de se muer en colombes mais qui hésitent encore, leur côté faucon faisant de la résistance.

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