Vers un durcissement des conditions d’emprunt en Europe?

Eoin Walsh, TwentyFour Asset Management

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Le régulateur européen exige davantage de fonds propres  des banques européennes. L’économie dans son ensemble pourrait en pâtir.

Les banques européennes doivent augmenter leurs fonds propres, voici ce qui ressort de la publication des résultats du processus de contrôle de d’évaluation prudentiel  (Supervisory Review and Evaluation Process, SREP) publiés la semaine dernière par la Banque Centrale Européenne (BCE). En moyenne, l’accroissement exigé est de l’ordre de 100 points de base. Sans aller précisément dans le détail des nouvelles recommandations,  il suffit de savoir qu’elles portent à la fois sur les fonds propres de catégorie 2 (fonds propres complémentaires) ainsi que sur les différents coussins de fonds de propres qui doivent être détenus par les banques.  

De solides ratios

Ces coussins sont de diverses natures : coussin de fonds propres contracyclique, coussin de conservation de fonds propres et coussin pour le risque systémique. Mis en place en 2016, ils permettent au régulateur de disposer des outils prudentiels qui obligent les banques à détenir de capitaux suffisants pour  faire face à un environnement opérationnel moins favorable.

Si l’on inclut le coussin pour risque systémique, le ratio de fonds propres durs (Core Tier 1) devrait atteindre environ 11.5%, ce qui constitue un niveau raisonnable pour les banques au vu du fait que nous approchons de la fin du cycle économique actuel. Cette proportion est en effet de 2 à 3 fois supérieure à celle observée au début de la crise financière mondiale.

L’exigence d’accroissement des fonds propres sert essentiellement
à s’assurer que le risque systémique du secteur financier est en recul.
Menaces sur les coupons?

L'impact  des nouvelles exigences sur les banques est assez évident: soit elles augmentent leurs fonds propres de manière à pouvoir soutenir leurs activités de crédit, soit elles  réduisent leur proportion d’actifs risqués. L’exigence de fonds propres accrus apporte un certain confort à ceux qui sont investis dans la dette bancaire puisqu’elle renforce les établissements financiers à l’orée de la fin du cycle. Toutefois, jusqu’à ce que les banques parviennent à s’adapter  aux nouvelles exigences, leurs réserves se réduiront et, par conséquent, le risque de non-distribution de coupons des obligations AT1 (Tier one) pourrait être légèrement plus élevé. Mais en réalité, bon nombre de banques parmi les plus solides disposent déjà de coussins largement suffisants, si bien que l’exigence d’accroissement des fonds propres sert essentiellement à s’assurer que le risque systémique du secteur est en recul.

Endettement maîtrisé

Le relèvement des ratios de fonds propres que doivent détenir les banques pour couvrir leurs prêts revient en fin de compte à une quasi- augmentation des taux d’intérêt puisqu’il impliquera un resserrement des conditions d’emprunts pour la clientèle, privée ou d’entreprises. Par conséquent, c’est l’économie dans son ensemble qui pourrait être le plus affectée par cette mesure. Il semble d’ailleurs paradoxal que d’un côté la BCE encourage les établissements financiers à poursuivre leurs activités de crédit  via la mise en place d’opérations ciblées de refinancement de long terme ou TLTRO (Targeted Long Term Refinancing Operations) et que de l’autre, elle les freine en relevant ses exigences de fonds propres.

Quoiqu’il en soit, tout ceci contribue à contenir l’endettement en Europe, en particulier en comparaison avec les Etats-Unis. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous persistons à préférer le crédit européen au crédit américain. En valeur relative, les banques européennes présentent  toujours, à nos yeux, une option intéressante.

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