Renforcer la zone euro: nécessaire mais difficile

William De Vijlder, BNP Paribas

2 minutes de lecture

Même si la nécessité de renforcer l'Union économique et monétaire s'impose aux yeux du plus grand nombre, les opinions divergent quant à la façon de procéder.

La nécessité de renforcer l’Union économique et monétaire ne fait plus de doute. Le rapport des cinq présidents de 2015 parlait d’une maison dont la construction n’avait pas été finalisée et celui de la Commission européenne de 2017 du besoin d’améliorer sa résistance aux chocs.

En outre, tout le monde s’accorde à dire que la conjoncture favorable actuelle est propice à mener une discussion sur le renforcement de l’UEM: on répare le toit quand il fait beau.

En revanche, les divergences restent importantes quant à la voie à suivre. Trois axes peuvent être envisagés pour renforcer l’UEM:

Augmenter la croissance potentielle

  • Notamment au travers des investissements dans le cadre du plan Juncker.

Améliorer le financement transfrontalier

  • Ce chantier nettement plus complexe comprend la finalisation de l’union bancaire (avec le dossier épineux d’un système européen de garantie des dépôts bancaires) et la réalisation de l’union des marchés de capitaux, un objectif commun étant celui d’augmenter le partage du risque par les investisseurs.

Stabiliser le cycle économique

  • Il s’agit de stimuler la croissance par d’autres moyens que le seul instrument monétaire, en utilisant donc la politique budgétaire.

En 2017, la Commission européenne a présenté trois options possibles pour un mécanisme de stabilisation cyclique:

Un système européen de protection de l’investissement

  • En période de ralentissement économique, l’investissement public est généralement le premier poste budgétaire à être réduit, ce qui aggrave la crise économique et peut même faire baisser la croissance de façon permanente. Un système de protection permettrait de poursuivre les investissements en infrastructures et dans l’innovation par exemple.

Un mécanisme européen de réassurance chômage

  • Il s’agirait d’un fonds de réassurance pour les régimes nationaux d’assurance-chômage. Lorsque ces derniers sont sous pression en cas de récession, la réassurance européenne offrirait une plus grande marge de manœuvre aux finances publiques nationales.

Un «fonds pour les mauvais jours» («Rainy Day Fund»)

  • Cela permettrait d’accumuler des fonds de manière régulière ; les décaissements seraient déclenchés sur une base discrétionnaire afin d’amortir les chocs de grande ampleur.

Si on simplifie à l’extrême, le débat peut être ramené à une seule question: faut-il privilégier la réduction du risque (les pays potentiellement fragiles font des efforts) ou le partage du risque entre Etats (les pays en bonne santé aident les autres)?

La question peut paraître simple mais il est très difficile de trouver un terrain d’entente sachant que faire appel à la solidarité suppose une réduction de l’autonomie en matière de politique économique. A terme, cette autonomie réduite pourrait devenir politiquement inacceptable et ouvrir la voie à l’aléa moral, à savoir le non-respect des engagements antérieurs.

En conclusion, les sommets de la zone euro se succèdent et se ressemblent en termes d’intentions et d’absence de vrai progrès. On peut l’accepter, à contrecœur il est vrai, lorsque le ciel est bleu mais on le regrettera lorsque le ciel économique sera plus menaçant. Nous n’en sommes pas encore là mais le fléchissement récent des indicateurs de confiance nous rappelle que la croissance ne sera pas toujours aussi forte qu’aujourd’hui.

En conséquence, trouver un accord sur l’aide à apporter aux pays qui plus que d’autres souffrent d’un retournement cyclique, doit être une priorité. En parallèle, il est crucial de ne pas relâcher l’effort de réduction du risque d’autant plus qu’il créera la confiance face au piège de l’aléa moral.

 

Pour aller plus loin sur ce sujet, consultez aussi:

Réformes structurelles: mieux vaut réparer le toit tant que le soleil brille