Quand les décisions politiques influencent l’économie mondiale

François Rimeu, Crédit Mutuel Asset Management

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Le mois de janvier se termine sur des marchés obligataires sans direction claire, des marchés de crédit dans une forme étincelante et des marchés actions eux aussi très porteurs en particulier en Europe.

Les Etats-Unis challengés dans le domaine de l’IA

Le mois de janvier se termine sur des marchés obligataires sans direction claire, des marchés de crédit dans une forme étincelante et des marchés actions eux aussi très porteurs en particulier en Europe. La saisonnalité favorable, une investiture de Trump assez calme et un très bon début de saison d’annonces de résultats sont les principales raisons de cette très bonne tenue des marchés financiers.

Le mois de février pourrait être plus agité car Donald Trump a décidé de passer de la théorie à la pratique, avec la mise en place de droits de douane significatifs. Le Mexique et le Canada sont particulièrement touchés avec une hausse de 25% des droits de douane et ce, sur l’ensemble des biens (les produits pétroliers ne seront taxés qu’à hauteur de 10%). La Chine est elle aussi ciblée avec une hausse de 10%, et il est probable que la zone Euro soit prochainement en ligne de mire. Le président Trump a par ailleurs précisé que les représailles de la part des pays ciblés entraineraient un doublement de ces taxes et comme le Canada a déjà mis en place ces représailles, nous allons vite voir s’il mettra ses menaces à exécution.

Les impacts macro-économiques dépendront évidemment de la durée de ces nouvelles taxes ainsi que des réactions finales des «partenaires» commerciaux. Si celles-ci étaient vouées à rester en place, le résultat sur la croissance pourrait être assez négatif. Pour les Etats-Unis et la Chine, l’impact serait de l’ordre de 0.3-0.4% du PIB et il serait logiquement beaucoup plus fort au Mexique et au Canada étant donné la prépondérance des échanges avec les Etats-Unis dans la croissance de ces pays. L’inflation serait aussi probablement plus forte à court terme avant que les effets négatifs croissance ne prennent le dessus. Difficile cependant de faire des prévisions précises tant que toutes les mesures et contre-mesures ne sont pas connues. Il faut toutefois avoir en tête que les droits de douane moyens appliqués aux biens passeraient aux Etats-Unis à plus de 10%, soit le niveau le plus élevé depuis l’après-guerre (source US ITC, Census Bureau). 

L’autre point marquant du mois est sans nul doute la guerre de l’IA déclenchée par la sortie de Deepseek et de Qwen 2.5 même si cette dernière a été moins médiatisée. Est-ce que les chiffres annoncés sont réels? Aucune idée. Est-ce que Deepseek a utilisé des puces Nvidia qui «auraient» transité via Singapour? Là encore, aucune idée. Mais est-ce que cela confirme que la Chine a l’ambition de concurrencer très sérieusement les Etats-Unis dans les technologies d’avenir en général et dans l’IA en particulier? La réponse est oui.

Une domination américaine difficile à maintenir

Les marchés sont dominés depuis début 2023 par le secteur technologique américain et plus spécifiquement par les 7 magnifiques. Nvidia en est le représentant le plus emblématique avec une capitalisation boursière qui est passée de 360 milliards USD fin 2022 a plus de 3.5 trillions USD il y a encore quelques semaines. La question qu’il faut se poser aujourd’hui est de savoir si cette nouvelle concurrence dans le domaine de l’IA, remet en question la domination écrasante des marchés américains depuis 24 mois.

Notre opinion, non définitive, est que la baisse des coûts ne remet pas du tout en question la thématique globale de l’IA, des potentiels gains de productivité et de l’adoption plus large des modèles LLM (Large Language Model) par le secteur privé. En revanche, cela fait planer une incertitude sur la capacité de certains acteurs à maintenir un niveau de marges aussi élevé que par le passé et donc la nécessité de reconstituer une prime de risque qui avait beaucoup diminuer.

Si on prend un peu de recul, on peut d’ailleurs noter que la domination des indices américains s’effrite depuis maintenant quelques temps avec des performances des indices chinois, allemands ou des banques européennes supérieurs au cours des 12 derniers mois.

Côté obligataire, peu de mouvements au cours du mois de janvier avec une confirmation du biais nouvellement «hawkish» de la part de la Fed. La BCE n’a pas révélé beaucoup de nouveautés lors de sa dernière conférence de presse, bien qu’elle semble progressivement plus rassurée par l’évolution de l’inflation salariale (cf. leurs prévisions à horizon fin 2025). Comme la croissance européenne ne montre toujours pas de signes de rebond tangibles (cf. PMI, ZEW, IFO etc…), cela ne fait que renforcer notre conviction du biais baissier des taux à moyen terme.

Perspectives pour le mois de février

L’arrivée de la Chine dans le domaine de l’IA fait planer un doute sur les valorisations très élevées des sociétés technologiques américaines avec des investisseurs très positionnés sur cette thématique. 

A l’inverse, cela pourrait redonner un peu d’allant aux indices chinois à moyen terme avec un impact positif sur la confiance des investisseurs chinois. Le risque d’une guerre commerciale qui dure nous semble sous estimé par les investisseurs. 

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