Si le retour des taux d’intérêt est globalement réjouissant, il s’est avéré exigeant pour les marchés obligataires et leurs investisseurs au cours des deux dernières années. En effet, la hausse des taux entraîne des pertes de cours pour les obligations en circulation. Les obligations à coupon plus faible adaptent enfin leur rendement au niveau actuel du marché.
Les titres en cours avec des coupons plus bas ont tendance à perdre de leur attrait lorsque les nouvelles obligations émises offrent des taux d’intérêt plus élevés. Les investisseurs seront enclins à échanger les titres qu’ils détiennent contre des titres nouvellement émis assortis de taux d’intérêt plus élevés. Toutefois, pour convaincre les acheteurs d’opter pour les obligations existantes, il faut compenser le taux d’intérêt plus faible. Et cela se produit en achetant à un cours plus bas et avec la perspective de plus-values qui augmentent le rendement global. Comme les obligations sont remboursées à la fin de leur durée à la valeur nominale de 100%, de tels rendements de cours sont faciles à calculer, de sorte que l’évolution des cours reflète régulièrement avec précision les variations de rendement. L’inverse est également vrai: si les rendements du marché baissent, les cours des obligations en circulation augmentent.
L’effet de cours est d’autant plus important que la durée résiduelle est longue, car les bénéfices (ou pertes) correspondants se répartissent sur de nombreuses années. Les titres avec une longue durée résiduelle ont donc fortement perdu de la valeur ces derniers temps. Selon le fournisseur de données financières Bloomberg, les obligations américaines d’échéances de dix ans et plus ont reculé d’environ 45% par rapport à leurs sommets de mars 2020. Cela s’explique par la hausse des rendements, d’une ampleur et d’une rapidité sans précédent.
Ainsi, le rendement des obligations d’Etat américaines à dix ans a atteint en octobre dernier, à près de 5%, son plus haut niveau depuis 16 ans. Dans la zone euro également, les rendements des obligations à long terme ont atteint des sommets tels qu’on n’en avait pas vu depuis de nombreuses années.
Entre-temps, les rendements ont de nouveau légèrement baissé, mais ils se situent toujours bien au-dessus du niveau auquel les investisseurs ont dû s’habituer depuis la crise financière mondiale de 2008. A court terme, comme le montrent ces fluctuations, les incertitudes restent importantes. Mais les défis temporaires peuvent offrir une opportunité à long terme, car le taux zéro appartient au passé. Certes, on peut s’attendre à ce que les banques centrales abaissent leurs taux directeurs au second semestre 2024, pour autant que l’inflation atteigne les valeurs visées. Néanmoins, nous partons du principe que les taux directeurs se stabiliseront à un niveau plus élevé qu’après la crise financière et pendant la pandémie de COVID-19. Le niveau d’équilibre des taux d’intérêt réels, qui ne freine ni n’accélère la croissance économique, a augmenté. Cela s’explique principalement par l’évolution démographique, la croissance de la productivité à long terme et l’aggravation des déficits budgétaires structurels. Cet environnement de taux d’intérêt plus élevés ne va pas durer des mois, mais des années. Il s’agit d’un changement structurel qui perdurera au-delà du prochain cycle conjoncturel.
Prévision à la hausse
Malgré toute la volatilité à court terme, cette hausse des taux d’intérêt devrait représenter la meilleure évolution économique et financière depuis 20 ans pour les investisseurs à long terme. Nos prévisions de rendement pour les obligations ont également augmenté. Ainsi, les obligations de la zone euro devraient atteindre un rendement annuel nominal de 2,9 à 3,9% au cours des dix prochaines années. Avant le début du cycle de hausse des taux d’intérêt, nous tablions encore sur un rendement annualisé de -0,5 à 0,5%. De même, pour les obligations mondiales hors zone euro, nous attendons des rendements annualisés de 2,8 à 3,8% au cours des dix prochaines années, par rapport à une prévision de -0,5 à 0,5% lorsque les taux directeurs étaient bas.
Cela permet d’utiliser les obligations non seulement à des fins de couverture, mais aussi comme source de revenus. La probabilité de réaliser un rendement annualisé à 10 ans d’au moins 5% avec 60% d’actions et 40% d’obligations dans le portefeuille est passée de zéro en 2021 à 44% actuellement.
Les investisseurs axés sur le long terme ont l’opportunité de réaliser des rendements appréciables, même avec des risques raisonnables, après que les taux d’intérêt ont perduré à bas niveau depuis la crise financière mondiale. Pour les investisseurs ayant une tolérance au risque correspondante, il pourrait être indiqué d’adopter une position plus défensive. Cela est particulièrement vrai dans un contexte de rendements plus élevés attendus pour les titres à revenu fixe et d’un marché boursier qui n’a pas encore pleinement reflété les effets du retour à une politique monétaire saine.
Les fonds obligataires mondiaux et en particulier les ETF obligataires offrent un moyen simple d’augmenter la part d’obligations dans le portefeuille. Ils sont largement répartis entre les régions, les durées et les émetteurs, réduisant ainsi les risques associés aux différents titres ou segments de la catégorie de placement. Les ETF répliquent des indices établis et marquent des points grâce à leur grande transparence et à leurs faibles coûts. Les investisseurs doivent garder à l’esprit que le rendement des obligations qui ne sont pas cotées en euros dépend dans une large mesure de l’évolution des cours de change. Afin d’éviter les fluctuations qui en résultent et d’obtenir les rendements purs, il est judicieux de miser sur des produits protégés contre le risque de change.