Naissance et mort des entreprises françaises

Bruno Cavalier, ODDO BHF

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Si l’on juge de l’économie française par la démographie de ses entreprises alors le constat est sans appel.

La situation présente est l’une des meilleures qu’on ait connue depuis longtemps. Les créations d’entreprise s’envolent, les défaillances reculent, un phénomène typique d’une économie en expansion. A défaut d’être un signal avancé de la croissance future, ces évolutions atténuent les craintes récurrentes liées aux perturbations sociales (rejet des réformes) et à l’incertitude politique (impopularité de Macron). En tout cas, il est presque étonnant que la création d’entreprise soit si forte dans un pays où la fiscalité est si lourde…

Selon l’INSEE, le nombre des créations d’entreprises a dépassé 800.000 en 2019, un record (+18% par rapport à 2018). Mettons de côté les autoentrepreneurs qui font 47% de ce total, cela fait une hausse de 430'000 des entreprises «classiques», là encore un record. Depuis trois ans, cela concernait surtout le conseil aux sociétés et le commerce et entreposage, un à-côté du développement de l’économie numérique; l’an dernier, on a aussi observé un net regain dans la construction. Au total, la tendance haussière, amorcé en 2015, s’amplifie (graphe de gauche). Selon la Banque de France, le nombre de défaillances d’entreprises a avoisiné 51'000 en 2019 (-5%), plus bas niveau depuis 2008 (graphe de droite). Cela concerne la plupart des secteurs. Les encours de crédit des entreprises défaillances représentent environ 0,4% du total, en repli par rapport aux pics de 2009 et 2014, deux moments où l’économie émergeait de récession.

La France serait-elle devenue un paradis pour entrepreneurs? Loin s’en faut. Le poids de la fiscalité reste lourd. Dans les arbitrages budgétaires lors de la crise des «gilets jaunes», le gouvernement a choisi de freiner la réduction du taux d’impôt sur les profits. Le poids des impôts sur la production reste prohibitif, sans compter la complexité de leur calcul. Selon le think-tank économique du gouvernement, ils représentent 3,6% de la valeur ajoutée des entreprises, contre moins de 0,5% en Allemagne. Cela handicape la compétitivité. Le gouvernement admet le principe de réduire ces taxes, mais cela implique alors de renoncer à des recettes fiscales. Casse-tête pour le ministère des Finances? La présidente du jury du concours 2019 d’entrée à l’ENA, l’école qui forme la haute administration, déplorait récemment qu’une grande partie des candidats ne voyait les entreprises que «comme une source de financement de l’action de l’Etat»! À partir de 2015, sous le président Hollande, avec Macron, ministre de l’Economie, des efforts ont été faits pour recréer un climat plus favorable aux entreprises (crédit d’impôt, baisse des cotisations sociales, flexibilité). Ce chantier est encore loin d’être achevé.

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