Les banques régionales américaines, au cœur de la prochaine saison des résultats

Felipe Villarroel, TwentyFour

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Cette semaine, les analystes passeront à nouveau en mode «Résultats».

Les modèles seront mis à jour avec les nouvelles projections, une longue liste de ratios financiers sera actualisée et les analystes interrogeront les équipes sur leurs perspectives pour le reste de l'année. Outre notre liste habituelle de sujets sur lesquels se concentrer, tels que les perspectives de Jamie Dimon sur l'économie américaine, la formation de prêts non performants (NPL) dans les bilans des banques, les tendances de l'effet de levier dans le secteur du high yield et d'innombrables autres, cette année, il faudra compter avec les banques régionales américaines.

Les premières commenceront à publier leurs résultats la semaine prochaine, parmi lesquelles Charles Schwab et Citizens. L'indice KBW des banques régionales ayant enregistré une hausse de 15% par rapport à son niveau le plus bas, un certain nombre de ces acteurs seront examinés de près. D'un point de vue macroéconomique, les marchés devraient se concentrer sur toute une série de sujets.

Avant tout, il s'agit de savoir dans quelle mesure, les dépôts sont revenus. Si les détenteurs de dépôts ont le sentiment que leur argent est en sécurité, les banques sous pression auront plus de temps pour remédier à leurs défaillances, plutôt que de devoir procéder à des ventes d'actifs pour faire face aux retraits de dépôts. Comme constaté lors de la précédente mini-crise des banques régionales, qui risque selon nous de se reproduire, il devrait y avoir plus d'une banque de ce secteur sans couverture adéquate de ses taux d'intérêt. Par conséquent, avec des bons du Trésor américain à 10 ans proches des plus hauts de l'année, il est possible que les analystes se préoccupent des pertes non réalisées sur les positions en bons du Trésor notamment.

La formation de NPL, en particulier dans le secteur de l'immobilier commercial, sera un élément important à surveiller.

En second lieu, si les banques peuvent contacter la Fed pour recourir au BTFP (Bank Term Funding Program) afin d'éviter de réaliser des pertes, cela n'est pas sans coût. Dans son dernier rapport trimestriel (T1 2023), la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) estime que le rendement moyen des dépôts n'est que de 1,42%. Bien qu'il soit logique de s'attendre à ce que ce chiffre soit plus élevé pour certaines banques régionales avant même la crise, il suffit de consulter ce rapport pour constater que, dans l'ensemble, ce chiffre n'est pas très éloigné de la moyenne. En revanche, le coût du BTFP correspond au swap indexé à un an majoré de 10 pb, ce qui représente un rendement total d'environ 5,48% aujourd’hui. Compte tenu de l'effet de levier du bilan d'une banque, le remplacement de passifs de 1,42% par des alternatives à 5,48% aura un effet négatif considérable sur les marges d'intérêt nettes, en particulier si la taille est relativement importante. L'examen de l'encours de cette structure ne donne pas beaucoup d'espoir. Depuis sa création au début du mois de mars, le solde a clairement augmenté, atteignant un peu plus de 100 milliards de dollars en juin, avec seulement une légère baisse en juillet. Par conséquent, si les marges sont réduites de manière significative et qu'il n'y a pas de signe d'amélioration à l'avenir, nous pourrions assister à un regain de pression dans le secteur.

Par ailleurs, si les dépôts ne sont pas vraiment revenus et que les banques ne souhaitent pas remplacer ce financement par le BTFP, elles pourraient vendre des actifs et rembourser les financements onéreux. Il s'agit essentiellement d'une réduction des effectifs, que les actionnaires n’apprécient guère, mais qui pourrait constituer un moyen de protéger les marges. Les marchés devraient donc s'attendre à ce que les équipes de direction leur fassent part de leurs projets de vente d'actifs, en précisant de quel type d'actifs il s'agit et à quel prix. Le marché des fusions et acquisitions devrait également prendre une place significative, car il y aura des gagnants et des perdants une fois que la poussière sera retombée de la folie du mois de mars.

Enfin, la formation de NPL, en particulier dans le secteur de l'immobilier commercial, sera un élément important à surveiller. Certaines banques du secteur ont des parts importantes de leur portefeuille dans un secteur qui est largement considéré comme «à éviter» à ce stade. Depuis le début de l'année, les gros titres sur les FPI et autres investisseurs en capital décidant de rendre les clés des bureaux et hôtels sont devenus monnaie courante. Phénomène inquiétant puisque que le refinancement n’est pas possible sans un important versement de fonds propres. De ce fait, les analystes s'attendent à une augmentation des provisions, laquelle se répercute directement sur le compte de résultat et donc sur les ratios de fonds propres. Bien que cela ne soit pas une surprise, les marchés examineront de près l'ampleur de l'augmentation des provisions.

En résumé, si les résultats des banques régionales peuvent être un moteur pour les marchés mondiaux, les enjeux sont élevés et même si la panique du premier trimestre semble derrière nous pour l'instant, nous doutons que l’ensemble du secteur soit à l’abri pour autant. Il existe une longue liste de thèmes que les analystes interrogeront au cours du mois de juillet, et les réponses à ces questions pourraient bien déterminer la réaction du marché, qu'elle soit bonne ou mauvaise.

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