Le renouveau des plans d’épargne en fonds

Yves Hulmann

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Investir chaque mois de petits montants est moins répandu en Suisse qu’en Allemagne. Aron Veress de Liechtenstein Life souligne les avantages d’une épargne régulière.

Les discussions au sujet des montants maximaux pouvant être versés dans le troisième pilier, ou la possibilité de procéder ultérieurement à des rachats du pilier 3a, reviennent à intervalles réguliers sur le plan politique en Suisse. Toutefois, tout le monde ne verse de loin pas chaque année l’entier du montant qui peut être déduit fiscalement dans le cadre du pilier 3a (7056 francs en 2023 et en 2024). Comment inciter dès lors les épargnantes et les épargnants à commencer plus tôt à mettre de l’argent de côté, que ce soit dans le cadre du troisième pilier ou en investissant régulièrement le même montant sur un compte dédié ou dans des fonds? En plus des banques et assureurs établis, des applications comme Yuh (lire en encadré) revisitent aussi à leur manière cette façon d’investir.

Combien les Suissesses et les Suisses sont-ils toutefois disposés à épargner chaque mois? Différents sondages et estimations ont déjà été réalisés à ce sujet. L’assureur Liechtenstein Life s’était penché ce printemps sur cette question en scrutant les portefeuilles de sa clientèle helvétique, à savoir 52'000 portefeuilles de prévoyance (pilier 3a et pilier 3b). Il en résulte que la plupart des preneurs d’assurance de Liechtenstein Life versent entre 100 et 350 francs par mois dans leur pilier 3a ou 3b, comme l’observait Aron Veress, directeur (CEO) de Liechtenstein Life dans un article consacré à ce thème. Parmi les sommes les plus représentées, plus de 22% des preneurs d’assurance analysés versent 200 francs par mois dans le pilier 3a et 3b, tandis que 19% d’entre eux mettent de côté 100 francs et 17% placent 150 francs. Peu de gens épargnent une somme mensuelle supérieure à 200 francs pour le pilier 3a et 3b: ainsi, seuls 11,5% des preneurs d’assurance versent 250 francs et 11,6% d’entre eux 300 francs par mois. Rapporté sur un an, cela signifie que les montants versés restent généralement bien en-deçà des possibilités de déduction prévues dans le cadre du pilier 3a en Suisse, où les personnes salariées peuvent déduire jusqu’à un maximum de 7056 francs cette année.

De petites contributions régulières permettent d’éviter des lacunes de prévoyance

Aron Veress, le directeur de Liechtenstein Life, met l’accent sur l’importance d’épargner dès le début de sa vie professionnelle pour éviter des lacunes de prévoyance qui concernent la plupart des Suissesses et des Suisses. «En commençant tôt et en épargnant régulièrement – même avec de petites contributions – on peut résoudre un grand problème en faisant des petits pas», estime-t-il. Il observe que les offres alliant placements dans le troisième pilier en combinaison avec une offre d’assurance, en particulier une protection en cas d’incapacité de gain, sont recherchées par de nombreux épargnants.

Sélection indépendante des fonds

Les montants épargnés peuvent être investis dans des fonds. Une particularité de l’offre proposée par Liechtenstein Life est de proposer une liste de fonds sélectionnés par l’assureur qui est réactualisée régulièrement. «Nous effectuons cette sélection de façon entièrement indépendante des prestataires. Il n’y a pas de «preferred list» de fonds reposant sur un partenariat», précise-t-il. Plusieurs critères de sélection jouent un rôle clé dans le processus initial: d'une part, les coûts qui doivent être maintenus au minimum, puis, d’autre part, le profil de risque du fonds car les fonds sélectionnés ne doivent pas être classés dans le profil à haut risque. En outre, les aspects de durabilité sont pris en compte dans le processus de sélection.

Bien que Liechtenstein Life soit situé à proximité immédiate de la Suisse, l’assureur doit se démarquer sur le marché helvétique déjà très compétitif. Comment se différencier? Pour Aron Veress, un des grands atouts de l’assureur liechtensteinois est justement son indépendance par rapport aux autres acteurs. «Il y a relativement peu de prestataires en Suisse qui ne proposent pas eux-mêmes des fonds. C’est un facteur de différenciation important par rapport à des banques qui proposent des solutions dans le troisième pilier», juge-t-il.

Des conditions plus restrictives en Suisse pour la sélection des fonds

Enfin, Aron Veress constate aussi, de manière générale, «qu’il n’existe aucun pays en Europe qui offre des conditions aussi favorables pour épargner qu’en Suisse, notamment grâce aux possibilités de déductions offertes dans le cadre du pilier 3a». Selon lui, il est étonnant que la sélection des fonds en Suisse reste malgré tout restrictive, contrairement à l'Allemagne par exemple.

L’arrivée de nouveaux concurrents dynamise le marché

Comment observe-t-il l’arrivée récente de nouveaux entrants dans le domaine de la prévoyance du 3ème pilier en Suisse, à l’exemple de l’offre de «Coop Finance +»? Aron Veress salue le fait qu’il y ait davantage d’offres dans ce segment: «L'engagement de marques fortes comme Coop dans le segment de la prévoyance vieillesse privée est à saluer. Elles sont définitivement en mesure d'atteindre une catégorie de clientes et de clients qui ne se préoccupait sinon que peu ou pas de tout de la lacune de prévoyance. Néanmoins, les solutions correspondantes n'offrent qu'un conseil rudimentaire et des possibilités limitées d’adapter la prévoyance aux besoins de l'individu. J'y vois moins une révolution qu'un complément utile sur le marché».

 

Des «applis» pour faciliter l’épargne du pilier 3a

Plusieurs prestataires en ligne offrent des solutions spécifiques qui visent à faciliter une épargne régulière, largement automatisée. Ainsi, l’application Yuh (qui appartient à Swissquote et PostFinance) propose dans son application la fonction «épargne automatique» qui permet à ses utilisatrices et utilisateurs d’allouer chaque mois un montant spécifique pour un projet, y compris de verser de l’argent sur le pilier 3a via cinq stratégies dédiées comportant des niveaux de risque différents. Grâce au «fractionnal trading», l’application permet aussi d’investir régulièrement de petits montants (par exemple 25 francs) dans des actions, même lorsque celles-ci affichent un cours beaucoup plus élevé.

A noter que Swissquote a aussi lancé sur son site à la mi-décembre une nouvelle solution baptisée «3a Easy» qui permet d’investir dans le troisième pilier sous forme d’épargne ou d’investissement à partir d’un montant minimum de dépôt de 100 francs, lequel peut ensuite être complété par des tranches supplémentaires de 100 francs également (réinvestissement minimum) allouées à trois stratégies différentes.
Cela sans oublier les différentes applications spécifiquement destinées à l’épargne du troisième pilier, telles que Viac ou Frankly, qui n’ont cessé d’élargir leur offre pour le pilier 3a ces dernières années.

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