A mesure que les tumultes provoqués par Donald Trump se dissipent, l’attention devrait se recentrer sur les fondamentaux. L’environnement redevient ainsi propice à une lecture académique de la prime de risque – cet indicateur qui reflète le rendement exigé par les investisseurs au-delà du taux sans risque. Dans un contexte marqué par des taux d’intérêt durablement élevés, des valorisations tendues et un repli de la croissance des bénéfices anticipés, un constat s’impose: le potentiel haussier des actions américaines est mis à l’épreuve par l’érosion de la prime de risque.
Une rémunération du risque historiquement basse
Depuis la fin de la pandémie, la prime de risque sur le S&P 500 n’a cessé de se comprimer. Les investisseurs acceptent ainsi de payer toujours plus cher la croissance bénéficiaire des entreprises américaines, attirés par des profits supérieurs à ceux affichés dans d’autres régions. La pondération significative des «Magnificent 7», dont les bénéfices sont peu sensibles aux cycles économiques, confère à l’indice une meilleure visibilité sur les résultats futurs. Ni les tensions tarifaires, ni les doutes sur la soutenabilité de la dette américaine, et ni même le climat géopolitique incertain ne semblent infléchir cette dynamique. Pourtant, une analyse attentive révèle qu’une prime de risque historiquement basse, dans un contexte de taux d’intérêt élevés, pourrait jeter une ombre sur la poursuite du rallye du S&P 500.
La conjonction entre la contraction de la prime de risque et le recul de la croissance des bénéfices suggère un potentiel de hausse limité sur les actions, malgré la confiance affichée des investisseurs.
Des valorisations en décalage avec la trajectoire bénéficiaire attendue
Durant cette même période, le ratio cours/bénéfices (P/E) du marché américain s’est continuellement apprécié, pour atteindre désormais 21,5 fois les bénéfices. Depuis peu, la politique de Donald Trump a fragilisé la dynamique bénéficiaire des entreprises américaines tout en alimentant les anticipations d’inflation. La machine à profits «made in USA» montre des signes d’essoufflement, comme en témoignent les bénéfices attendus, qui sont passés de 14% en 2024 à 12% début 2025, puis ont été révisés en mai à 9%. Selon notre calibration, le rapport profits/valorisations s’est détérioré au regard du taux à 10 ans, qui a atteint 4,5% début juin.
Retour à une allocation d’actifs diversifiée
La conjonction entre la contraction de la prime de risque et le recul de la croissance des bénéfices suggère un potentiel de hausse limité sur les actions, malgré la confiance affichée des investisseurs. Ceux-ci parient en effet sur la stabilité économique des Etats-Unis et sur un assouplissement monétaire à venir. Pour que le rallye perdure, une bonne nouvelle sur l’une des déterminantes de la prime de risque – à savoir les résultats des sociétés ou les taux d’intérêt – sera nécessaire. A l’inverse, une déception du côté des résultats pourrait rapidement déstabiliser la tendance haussière sur les actions.
Selon cette lecture du marché, nous revenons à une allocation diversifiée articulée autour des classes d’actifs rémunératrices et également susceptibles d’absorber les éventuels chocs. L’attractivité des actions sera conditionnée par la capacité des entreprises à générer des profits et à restaurer une prime de risque attrayante.