L’usage des indices ESG gagne en importance

Nicolette de Joncaire

2 minutes de lecture

Pourquoi ne pas changer de benchmark? Les indices ESG avec Christine Chardonnens de MSCI.

L’attention se porte toujours davantage vers les normes de la finance durable, une standardisation dont les fournisseurs d’indices posent certaines bases. «Ce mouvement infuse une nouvelle vie dans une direction qui avait réellement besoin de plus de vigueur», constate Christine Chardonnens, responsable des indices ESG chez MSCI à Genève. Y compris aux Etats-Unis qui ont pris du retard dans ce domaine, même si certains gestionnaires doivent maintenant mettre une offre ESG à la disposition de leurs clients européens.

Précurseurs et nouveaux convertis

A l’avant-garde? Les caisses de retraite des pays nordiques et des Pays-Bas auxquelles s’ajoutent certains grands groupes suisses comme Swiss Re, conduits par la nature de leurs activités à projeter le risque sur le long terme. Le mouvement s’est renforcé avec l’intérêt porté à l’ESG par le grand fonds de pension californien CalPERS depuis 2015, et encore accéléré avec celui affiché plus récemment par le GPIF, le fonds de pension géant1 du gouvernement japonais. Mais la pression vient aussi des organes réglementaires qui intègrent, tout au moins partiellement, la finance responsable aux obligations fiduciaires. De l’autorité de tutelle des fonds de pension britanniques à la Commission européenne, en passant par le département du travail américain, la pression est sensible : les critères ESG doivent faire partie de l’arsenal de l’analyse financière.

La performance d’un indice comme le MSCI World SRI Index est alignée
à celle du MSCI World avec une exposition sectorielle similaire.
La fin d’un vieux mythe

Outre les aspects sociétaux, le succès de l’ESG tient aussi aujourd’hui à la fin du mythe selon lequel les investisseurs devraient sacrifier une partie de la performance financière s’ils veulent se conformer à certains critères de conduite en matière de placements. «Avec des historiques sur plus de 10 ans, MSCI a accumulé suffisamment de données pour démontrer que la relation entre performance et investissement responsable n’est pas faite de simple corrélation mais bien de causalité», explique Christine Chardonnens. Dans une étude publiée fin 2017, le département de recherche de MSCI affirme, données à l’appui, que «les sociétés ayant obtenu une note ESG élevée (Q5) étaient plus rentables et versaient des dividendes plus élevés». Contrairement à certaines études précédentes, celle de MSCI ne se contente pas d’observer des corrélations mais «analyse les canaux de transmission de l’ESG à la performance financière pour acquérir une compréhension fondamentale de la façon dont ces caractéristiques influent sur les évaluations et les profils de risque des sociétés». Le travail mené sur un univers de 1600 valeurs du MSCI World Index et sur une période de 10 ans (janvier 2007 à mai 2017) est d’ampleur suffisante sur le plan statistique pour en valider les résultats.

Des indices ESG de plus en plus nombreux

Les indices se multiplient et, chez MSCI, plus de 120 d’entre eux possèdent un track record supérieur à cinq ans (à noter le premier indice ESG de l’émetteur, le MSCI KLD 400 Social Index existe depuis mai 1990 … soit exactement 29 ans2). Ce foisonnement d’indices veut dire qu’un nombre croissant d’ETF peut s’appuyer sur des critères ESG. Pour l’investisseur, cela signifie qu’il peut plus aisément identifier l’instrument correspondant à ses objectifs – intégration des normes ESG, décarbonisation, égalité des genres ou impact durable –, et que son niveau d’engagement reste à sa discrétion (exclusions ou plutôt best-in-class, et même valeurs catholiques ou musulmanes). Avec 180 analystes ESG, MSCI a même la capacité d’analyse suffisante pour couvrir l’Arabie Saoudite (qui entrera bientôt dans les indices Emerging Markets y compris ESG) et les actions A chinoises. En fin de compte, la performance d’un indice comme le MSCI World SRI Index est alignée (voir légèrement supérieure depuis deux ans environ) à celle du MSCI World avec une exposition sectorielle similaire. Quant à la performance du MSCI EM SRI, elle dépasse celle de son homologue non-durable, le MSCI EM d’environ 3 points depuis cinq ans. Pourquoi se priver de substituer un indice ESG à un benchmark traditionnel?

 

1 Le GPIF gère environ 1400 milliards de dollars.
2 Selon NextFinance, depuis mai 1994, cet indice a généré un rendement annuel équivalent à son univers de référence, l’indice MSCI USA IMI.