L’Europe est-elle condamnée à sous-performer?

Nicolas Mougeot, Indosuez Wealth Management Suisse

2 minutes de lecture

Une valorisation qui parait aujourd’hui attrayante peut aussi cacher un manque de visibilité ou de croissance.

Le titre est peut-être provocateur mais le constat est terrible: sur la période 2010-2020, les actions américaines ont rapporté 7,4% de plus par an que leurs homologues européennes si on compare les indices S&P 500 et STOXX 600, dividendes inclus. Sur 10 ans, cela représente une différence de 176% en faveur des actions américaines et pose donc la question: est-il opportun d’investir dans les actions européennes?

Bien sûr, la performance passée ne présume pas des performances futures. Si les actions américaines ont connu une période faste ces 10 dernières années, le futur nous dira si cela se répètera. Mais comment expliquer la différence historique et quelles leçons en tirer pour investir aujourd’hui en Europe?

Innovation et croissance

L’économie américaine s’est remise en marche beaucoup plus rapidement que celle de l’Europe après la crise financière de 2008. L’Europe a d’abord subi la crise de la dette souveraine, qui a touché la Grèce, l’Espagne, le Portugal et l’Irlande en 2010- 2011, puis le Brexit, une histoire sans fin depuis 2016. Le différentiel de croissance du PIB s’est traduit par un différentiel de croissance des bénéfices: +7,4% en faveur des actions américaines, soit exactement la différence de rendement des actions. Les Etats-Unis ont aussi bénéficié de l’émergence de géants de la Tech avec des entreprises telles qu’Amazon dont la capitalisation boursière est passée de 70 milliards de dollars fin septembre 2010 à plus de 1'500 milliards en septembre 2020. De ce côté de l’Atlantique, les indices boursiers ont souffert de leur forte pondération dans des secteurs en perte de vitesse tels que l’énergie ou les banques.

Les économistes prévoient que la Chine affichera
une croissance positive de son PIB en 2020.

Le Covid-19 n’a fait qu’accentuer ces différences. La transformation digitale a pris un nouveau tournant, les entreprises devant s’adapter aux nouveaux modes de consommation en ligne et augmenter leurs gains de productivité par le biais de solution CRM ou cloud par exemple. A l’issue de cette crise, l’économie américaine devrait une nouvelle fois rebondir plus rapidement qu’en Europe.

Investir en Europe en visant l’Asie

Acheter ce qui a fortement baissé?  Le bon marché coûte cher. Cet adage prévaut aussi sur les marchés financiers car acquérir certaines actions simplement parce que leur cours de bourse est bas n’est pas synonyme de rendement assuré, les investisseurs qui ont acheté des bancaires peuvent aujourd’hui en témoigner. Une valorisation qui parait aujourd’hui attrayante peut aussi cacher un manque de visibilité ou de croissance.

Il vaut mieux donc porter son intérêt sur des entreprises qui ont un fort potentiel de croissance plutôt que de fonder son analyse uniquement sur le prix actuel. Si la croissance économique continue à supporter la croissance des bénéfices des entreprises alors les sociétés européennes, dont une partie significative des revenus provient de l’Asie, pourraient avoir le vent en poupe. En effet, l’économie de la zone euro ne devrait pas retrouver le niveau de fin 2018 avant le premier semestre 2022 tant la reprise sera longue. A l’inverse, les économistes prévoient que la Chine affichera une croissance positive de son PIB en 2020. C’est là tout le paradoxe: Si la crise du Covid-19 a d’abord émergé en Chine, l’économie du milieu devrait finalement en sortir plus forte ou tout du moins s’en sortir plus vite, probablement grâce aux mesures contraignantes de confinement prises par les autorités. Les entreprises européennes qui ont une forte exposition à l’Asie en général et à la Chine en particulier pourraient alors sortir leurs épingles du jeu dans des secteurs aussi divers que le luxe, l’automobile, la consommation discrétionnaire ou les produits de consommation courante.

La croissance des résultats des entreprises reste un des facteurs principaux de performance des entreprises et si l’Asie confirme être le moteur de la croissance mondiale dans les années à venir, il peut être opportun d’investir dans des sociétés européennes qui ont un pied en Asie.

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