Commentaire hebdomadaire de Raiffeisen

Jeffrey Hochegger, Raiffeisen Suisse

3 minutes de lecture

La politique commerciale de Donald Trump provoque de fortes turbulences sur les marchés financiers. Les investisseurs oscillent entre panique et soulagement. Les valeurs refuges comme le franc suisse et l’or sont très demandées.

Trump roule les mécaniques douanières... mais fait (pour l’instant) de nouveau halte

Le monde retient son souffle face à la politique économique erratique de Donald Trump. Mercredi matin, les droits de douane réciproques annoncés lors de la «Journée de la libération» sont entrés en vigueur. Par ailleurs, le président américain a déjà laissé entrevoir la prochaine étape de l’escalade avec l’introduction de taxes spéciales sur les médicaments. Mais quelques heures plus tard, il fit marche arrière, à la surprise générale. Après avoir été critiqué publiquement par de nombreuses personnalités de Wall Street, mais aussi par son conseiller Elon Musk, il annonça sur sa plateforme en ligne Truth Social une trêve douanière de 90 jours, durant laquelle seul le taux forfaitaire de 10% serait appliqué, avec la Chine comme seule exception à cette règle. En réponse aux mesures de rétorsion de l’Empire du Milieu, le gouvernement américain a même encore augmenté les droits de douane pour les importations chinoises, les portant à 145% au total. De son côté, l’Union européenne (UE) a décidé de prélever des taxes d’importation sur un grand nombre de produits américains (notamment les graines de soja et les produits sidérurgiques), mais ces taxes sont également suspendues pour le moment. Car l’UE, tout comme la Suisse, veut miser sur les négociations.

Violentes turbulences sur les marchés

Les Bourses ont fait les montagnes russes cette semaine dont le début était teinté d’un rouge profond. Le baromètre de la peur VIX, qui mesure l’amplitude des fluctuations du marché américain, a parfois dépassé les 50 points. Des valeurs comparables ont été enregistrées à deux reprises ces 25 dernières années: pendant la crise financière et lors de l’apparition de la pandémie de coronavirus. Face à la suspension des droits de douane, les Bourses ont tenté de se stabiliser: les actions des «Sept Glorieuses» fortement ébranlées autour d’Amazon & Cie ont enregistré mercredi des gains de cours à deux chiffres. Le Swiss Market Index (SMI) a enregistré une baisse hebdomadaire de 3,5% vendredi matin, après avoir connu des hauts et des bas. En raison des droits de douane pharmaceutiques en suspens, les poids lourds de l'indice Novartis et Roche, entre autres, ont perdu des plumes, tout comme le fabricant d'arômes et de parfums Givaudan, malgré des chiffres solides au premier trimestre. Les titres du fabricant de produits pharmaceutiques Lonza et du réassureur Swiss Re, par exemple, ont mieux résisté que l’ensemble du marché. Les investisseurs ont recherché des placements sûrs. Le franc suisse s’est nettement apprécié par rapport à l’euro et au dollar américain. L'or a certes subi des vents contraires sous la forme d'appels de marge de la part de nombreuses banques et de courtiers, mais il a tout de même atteint un nouveau record en fin de semaine, à 3219 dollars l'once. Le contexte de marché devrait rester extrêmement volatil tant qu’une véritable solution ne se profile pas au niveau politique dans le conflit commercial. Nous recommandons donc aux investisseuses et investisseurs de garder leur calme et de continuer à s’en tenir à leur stratégie de placement à long terme. Des achats ou des ventes irréfléchis recèlent le risque de coûts d’opportunité élevés.

Le pessimisme conjoncturel se répand

L’indice conjoncturel Sentix pour la zone euro a chuté de 16,6 points en avril, passant à -19,5 points. C’est la valeur la plus faible depuis octobre 2023. S’agissant des Etats-Unis, l’indicateur est tombé à son plancher depuis juin 2020 et le baromètre partiel des anticipations économiques a même atteint son seuil le plus bas depuis la faillite de Lehman Brothers en octobre 2008. La menace d’un repli de l’économie mondiale se reflète également dans le prix du pétrole brut. Avec 58 dollars US, le baril de Brent de la mer du Nord a atteint cette semaine son niveau minimal depuis le printemps 2021.

L’inflation américaine recule

Les prix à la consommation aux Etats-Unis ont augmenté de 2,4% en mars alors que le mois précédent, le taux s’élevait à 2,8%. L’inflation s’est ainsi rapprochée d’un cran de l’objectif de 2% fixé par la Fed. Toutefois, ces chiffres ne tiennent pas encore compte de l’impact de la politique commerciale américaine. La pression sur les prix devrait alors de nouveau augmenter ces prochains mois. Dans le procès-verbal de sa dernière réunion de politique monétaire, la Fed a donc suggéré de faire encore preuve de prudence.

Graphique de la semaine

Le marché des actions suisse, mesuré par le Swiss Market Index (SMI), a perdu plus de 13% de sa valeur depuis l’annonce des droits de douane réciproques américains sur les échanges commerciaux le 2 avril. Sa performance annuelle précédente s’est volatilisée. En revanche, les obligations d’Etat sûres ont la cote auprès des investisseurs. En raison de leur corrélation souvent négative avec les catégories de placement à risque comme les actions, ils constituent le roc dans la tempête qui s’est emparé des marchés actuels. C’est ce que reflète l’évolution récente des cours du Swiss Bond Index (SBI). Une fois de plus, cela démontre à quel point il est essentiel de diversifier son portefeuille.

GROS PLAN

Barry Callebaut déçoit

Le prix élevé du cacao met à mal le plus grand fabricant de chocolat au monde, Barry Callebaut. Son bénéfice net a baissé de 63,5% après six mois le 31 mars. En conséquence, l’entreprise a revu ses objectifs financiers à la baisse. Ses actions ont accueilli cette annonce avec une perte de cours de plus de 20% jeudi dernier.

LE PROGRAMME

Événement numérique de Raiffeisen

Le 16 avril à 17h30 aura lieu un événement numérique avec Matthias Geissbühler (CIO) sur le thème de la «guerre commerciale». 

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