Capital-investissement: gérer la volatilité

Jeffrey Akers, Adams Street

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Sur le marché secondaire des fonds de private equity, il convient de rester centré sur ceux qui ont fait leurs preuves.

La forte hausse de la volatilité des marchés boursiers durant les premières semaines de 2022 est venue rappeler aux investisseurs que les arbres ne poussent pas jusqu’au ciel. L’année a démarré dans un climat d’incertitude alimenté par l’augmentation des infections dues au variant Omicron, par une inflation américaine flirtant avec ses plus hauts depuis deux décennies ainsi que par le commencement d’un cycle de resserrement des politiques monétaires des banques centrales, cycle amorcé par la Fed.

Et alors que chacun s’employait à trouver des solutions à ces problèmes, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a causé un nouveau choc. Au-delà de ses conséquences sur le plan humanitaire, ce conflit est venu ajouter à l’incertitude, en particulier celles concernant les chaînes d’approvisionnement et la pénurie de main-d’œuvre.

Les performances des entreprises et des secteurs tendent en effet à faire diverger les valorisations des «general partners».

Confrontés à un tel environnement, un certain nombre d’investisseurs ont été, comme toujours, gagnés par la peur.  L’indice S&P 500 qui avait progressé de 29% en 2021 a perdu près de 8% durant les deux premiers mois de l’année. Les marchés obligataires ont également subi plusieurs à-coups: le rendement des bons du Trésor à 10 ans qui avait progressé de 40 points de base (pb) durant les six premières semaines de 2022, a reculé de 20 pb après l’invasion puis a regagné 43 pb pour s’établir à 2,15% courant mars1.

Réduire les risques de portefeuilles

Les perturbations de ce genre sont susceptibles d’amener les institutionnels et les particuliers fortunés à réduire les risques de leurs portefeuilles exposés aux marchés privés. La vente de leurs positions peut rapidement devenir une priorité du fait que leur besoin de liquidités est accru par les engagements encore non appelés. Comme par ailleurs, les corrections boursières risquent d’entraîner une surpondération relative du capital-investissement dans les portefeuilles, amenant ce dernier au-delà de ses limites fixées au préalable, ce phénomène est susceptible de multiplier les transactions sur le marché secondaire du capital-investissement.

La volatilité des bourses est également susceptible de repousser les opérations de sortie. Or, dans la mesure où les «general partners» cherchent à placer leurs meilleurs actifs auprès d’investisseurs qui peuvent s’accommoder d’une prolongation de leurs engagements, les nouvelles transactions initiées par les «general partners» se font plus nombreuses.

Une autre conséquence de la hausse de la volatilité pourrait être le creusement de l’écart entre la valeur nette d’inventaire (VNI) des parts de fonds de private equity et la valeur intrinsèque des portefeuilles. Historiquement, lorsque les marchés sont stables et que leurs performances sont relativement prévisibles, la VNI est un bon indicateur. Il est donc relativement facile de se fier au marché et les transactions sur le marché secondaire sont effectuées sur la base du coût du capital. En revanche, durant les phases de volatilité des marchés, le choix devient plus difficile: les performances des entreprises et des secteurs tendent en effet à faire diverger les valorisations des «general partners».

Il convient de collaborer avec des gérants qui valorisent les entreprises de manière conservatrice et qui ont déjà fait l’expérience de multiples phases de volatilité des marchés.
Processus de détermination des prix

Dans certains cas, la VNI publiée peut se trouver sensiblement inférieure à la valeur intrinsèque, en raison des délais de reporting observés sur les marchés privés. Lorsque la détermination d’un prix précis est difficile, les acheteurs les mieux informés bénéficient d’un net avantage. Les acteurs du marché secondaire qui bénéficient de relations étroites avec les «general partners» cherchent souvent à accéder à des informations plus précises et à des mises à jour plus rapides des fondamentaux et des données commerciales des entreprises en portefeuille. Cela leur permet d’avoir un meilleur aperçu des fonds de qualité qui sont sous-évalués. Sur le marché secondaire, en période d’incertitude, la prudence commande de donner la priorité à une stratégie axée sur les «general partners», les entreprises et les secteurs qui ont fait preuve d’une certaine régularité dans leur activité, une stratégie qui vise à identifier les opportunités d’arbitrage.

Eviter la dispersion

L’essentiel est de parvenir à résister aux mouvements de marché en allouant les capitaux à des entreprises dont les modèles d’affaires sont relativement prévisibles, dont le niveau d’endettement est raisonnable et dont la croissance est indépendante du cycle. Pour être en mesure d’identifier ces entreprises qui offrent une certaine marge de sécurité par rapport à la valeur intrinsèque, il convient de collaborer avec des gérants qui valorisent les entreprises de manière conservatrice et qui ont déjà fait l’expérience de multiples phases de volatilité des marchés.

Au vu de la cherté des marchés boursiers, d’une inflation qui se situe à des sommets historiques, de la hausse de taux, de l’accroissement du risque géopolitique et du fait que le COVID est en passe de devenir endémique, il est probable que la volatilité élevée persiste tout au long de l’année 2022. Un tel environnement devrait être propice à la multiplication des transactions sur le marché secondaire durant les trimestres à venir. Cependant, en tant qu’acteur du marché secondaire, il importe de rester focalisé sur les gérants rigoureux sur le plan de leurs investissements et qui ont fait leurs preuves et tissé des réseaux solides dans leurs secteurs de prédilection.

 

1 St Louis Federal Reserve Economic Data (FRED), données disponibles au 17 mars 2022

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