Mobilité électrique en Suisse: quel avenir pour les stations-service?

Communiqué, Colombus Consulting

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Les stations-service suisses pourraient enregistrer une perte de 50% de leurs profits d’ici 2035: comment s’adapteront-elles au développement de la mobilité électrique?

Le cabinet Colombus Consulting publie son étude sur la mobilité électrique et son impact sur l’avenir des sta-tions-service en Suisse et propose 3 scénarii d’évolution du parc automobile, à horizon 2050, du plus pessimiste au plus optimiste, selon le développement de la mobilité décarbonée – principalement électrique.

En fonction de ces scenarii, les experts Energie estiment notamment que d’ici 15 ans: 

  • La consommation de carburant baisserait d’environ un tiers en Suisse, 
  • Les profits liés à la vente de carburant diminueront de moitié, avec des stations-services qui ne seront plus rentables faute de volume suffisant. 
  • Le nombre de passages en stations avec shop* pour faire le plein de carburant pourrait diminuer de moitié (48%). 
La décarbonation induit une baisse importante de consommation de carburant 

Le secteur des transports représente environ un tiers des émissions de CO2 en Suisse. Pour accélérer la décarbonation de ce secteur, la réglementation se durcit à l’égard des véhicules thermiques : limitation des émissions de CO2 des véhicules neufs, mise en place de zones à faible émission (ex : Canton de Genève), etc.

En Europe, d’autres pays vont même plus loin en fixant des objectifs d’arrêt des ventes de véhicules neufs 100% thermiques (2025 en Norvège, 2040 en France, etc.). Le parc automobile va ainsi se transformer dans les prochaines décennies, et permet d’envisager une baisse impor-tante des ventes de carburants fossiles. 

Les stations-service devront se transformer pour ne pas sombrer 

D’après l’étude et les estimations de Colombus Consulting, l’évolution de la mobilité vers une mobilité décarbonée aura des répercussions importantes sur le secteur: les stations-service sans shop pourraient voir leurs profits diminuer de 62% dès 2030, et atteindre un rendement négatif à l’horizon 2050.

«Contrairement aux stations-service sur autoroutes, elles ne sont pas essentielles au développement de la mobilité électrique et sont en concurrence avec les stations-service avec shop, avec la recharge à domicile, sur le lieu de travail ou sur les bornes qui se développent en voi-rie. Leur nombre devrait donc continuer de diminuer dans les prochaines années», explique François Hémono, consultant senior Énergie pour Colombus Consulting. 

Les stations-service rurales, premières impactées par la décarbonisation 

Certaines stations-service en zone rurale sont déjà en difficulté financière en raison des faibles volumes de carburants vendus. Ce service de proximité est pourtant indispensable à la mobilité des habitants, souvent dépendants de leurs véhicules. Dans ce contexte, la qualité de ser-vice pourrait se dégrader dans les zones les plus isolées.

L’offre des stations-service urbaines et périurbaines amenée à se réinventer 

La réduction de la demande en carburant devrait entrainer une réduction du nombre de passages en stations-service avec shop, pouvant aller jusqu’à -48% d’ici 2035. 

L’émergence de zones à faible émission dans certaines villes, couplée à une baisse du nombre de passages pour faire le plein de carburant obligeront les stations à trouver de nouveaux leviers pour attirer et fidéliser leur clientèle : distribution de sources d’énergie décarbonées, adaptation aux populations ayant un besoin régulier de recharge (taxis, véhicules d’entreprise), engagement dans d’autres formes de mobilités (stations d’autopartage, hubs de vélos électriques, etc.). 

«Les services liés à la mobilité électrique deviennent des leviers et de plus en plus d’enseignes s’équipent de bornes de recharge pour fidéliser leur clientèle et attirer de nouveaux consommateurs», précise Gaël Gautier, consultant senior Énergie pour Colombus Consulting. 

Les stations d’autoroute face à la montre pour répondre à la mobilité électrique longue distance

L’implantation de bornes de recharges électriques et la diversification des services seront essentielles pour maintenir la rentabilité des stations sur autoroute. 

Le besoin sera supérieur à celui de pompes à essence, et devra être en mesure d’absorber le flux de voyageurs, notamment au moment des départs en vacances. Pour cela, différents modes de recharge peuvent être envisagés: 

  • une recharge rapide (~15 min) à coût plus élevé, pour les usagers les plus pressés,
  • une recharge plus lente (~60 min), à tarif réduit, qui pourrait servir de produit d’appel pour les services et commerces sur place.
Les bornes de recharge modifient le maillage de ravitaillement en énergie 

La diversification des lieux de recharge énergétique va entraîner une mutation des lieux de ravitaillements traditionnels. La recharge des véhicules électriques nécessitant 6 fois plus de temps (sur une borne 50 kW), chaque kilomètre récupéré par l’usager peut être un temps d’attente épargné. Ce besoin encourage donc le développement de la recharge d’opportunité: les lieux de recharge vont évoluer et se décentraliser pour investir en priorité les emplacements de stationnement de plus longue durée (lieux de vie et de loisirs, lieux touris-tiques, etc.). 

En Europe, plusieurs initiatives encouragent le développement d’un réseau de recharge de nécessité : 

  • A Amsterdam, les résidents peuvent demander l’installation d’une borne de recharge àproximité de leur domicile.
  • Depuis 2018, la Norvège a imposé une station de recharge tous les 50 km sur autoroute.
  • En France, un droit à la prise a été instauré pour favoriser l’installation de bornes derecharge au sein des copropriétés.
  • L’Allemagne impose une borne de recharge dans chaque station-service.

«D’après nos estimations, le territoire devrait tendre vers une décentralisation et une meilleure répartition des réseaux de recharge sur le territoire. Des expérimentations sur de nouveaux modes de recharge sont également en cours : remorques de recharge, recharge par induction, etc.», conclut Jean Meneveau, directeur associé chez Colombus Consulting.

 

* Les stations-service avec shop représentent aujourd’hui un tiers des stations en Suisse, et deux tiers des ventes de carburant du territoire.

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