Japon: l’inflation ralentit moins qu’attendu en février, le riz flambe encore

AWP

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La hausse des prix à la consommation au Japon (hors produits frais) s’est établie à 3% sur un an en février.

La hausse des prix à la consommation au Japon (hors produits frais) s’est établie à 3% sur un an en février, ralentissant légèrement mais témoignant de tensions inflationnistes toujours élevées, dopées par l’énergie et une nouvelle flambée record des prix du riz.

Ce chiffre dévoilé vendredi par le gouvernement est certes en-deçà de la hausse de 3,2% enregistrée en janvier, mais au-delà de la prévision des experts sondés par Bloomberg (+2,9%).

De quoi conforter, selon les analystes, les anticipations d’un nouveau relèvement des taux de la Banque du Japon (BoJ) en mai ou juillet, lors de ses prochaines réunions.

Ce maintien de l’inflation s’explique à nouveau par une hausse des factures d’électricité (+9%), même si cette dernière a nettement ralenti par rapport à janvier (+18%) en raison du rétablissement de subventions énergétiques par le gouvernement.

Elle est aussi alimentée par un bond de 21,9% des prix des céréales, tirés par une envolée record de 81,4% sur un an des prix du riz, base essentielle de la cuisine japonaise.

Pour tenter d’enrayer l’historique renchérissement du riz depuis l’été dernier, sur fond de mauvaise récolte en 2023 et de fortes perturbations dans la distribution, le gouvernement a commencé à débloquer ses réserves stratégiques de riz, dont 210.000 tonnes sont proposées ce mois-ci aux enchères.

«La hausse des prix des produits alimentaires transformés et autres produits industriels s’est également légèrement accélérée, le choc des coûts d’importation postpandémie se faisant encore sentir», observe Marcel Thieliant, expert de Capital Economics.

Non ajustée, l’inflation dans son ensemble (produits frais inclus) s’est envolée de 3,7%, au-delà des attentes du marché (+3,5%) mais marquant une modération après la hausse de 4% en janvier.

Les produits alimentaires frais se sont renchéris de 19% sur un an, avec une hausse de 28% des prix des légumes frais.

Les prix du chou, autre aliment phare, ont plus que doublé (+130%) en l’espace d’un an, après des records de chaleur estivale suivis de fortes pluies qui ont ruiné les récoltes --une légère modération cependant après la flambée de 200% en janvier.

Banque centrale aux aguets

Très surveillée par le marché, l’inflation sous-jacente, corrigée des prix volatils de l’énergie et des produits alimentaires frais, s’est hissée à 2,6% en février, accélérant par rapport à janvier (+2,5%).

Se maintenant très au-delà de la cible d’environ 2% fixée par la BoJ, ce niveau devrait inciter l’institution à poursuivre les hausses de ses taux d’intérêt.

Après les avoir relevés par deux fois en 2024 puis à nouveau en janvier, elle a décidé cette semaine un statu quo face aux incertitudes économiques.

«Le renchérissement des denrées alimentaires, notamment du riz, peut influencer le moral et les attentes des ménages», en les incitant à restreindre leur consommation, a reconnu mercredi le gouverneur de la BoJ, Kazuo Ueda.

«La vigueur persistante de l’inflation conforte notre opinion que la Banque resserrera sa politique monétaire plus vigoureusement que prévu», insiste M. Thieliant.

Pour autant, un nouveau relèvement pourrait ne pas intervenir dès mai et être reporté à juillet, «le gouverneur Ueda pointant l’accroissement des incertitudes entourant la politique commerciale américaine», observe l’économiste.

Conjoncture fragile

L’économie nippone reste fragile: le Japon a vu la croissance de son PIB s’essouffler à 0,1% en 2024 (en termes réels, corrigés de l’inflation).

Et la guerre commerciale engagée par Donald Trump pourrait pénaliser à la fois les exportations nippones (automobile, acier...) et plomber davantage la consommation en entretenant l’inflation, fragilisant deux piliers de la quatrième économie mondiale.

L’archipel nippon, après avoir subi pendant des décennies une inflation quasi-inexistante et même la déflation, a connu un virage depuis deux ans et demi, avec une hausse des prix à la consommation systématiquement supérieure ou égale à 2% depuis avril 2022.

Pour l’endiguer, la BoJ avait entamé en mars 2024 un resserrement de ses taux, après dix ans de politique monétaire ultra-accommodante où ils étaient restés quasi-nuls.

Alors que cette inflation plombe les dépenses des ménages (elles ont reculé de 1,1% l’an dernier) et pèse sur l’activité, le Premier ministre Shigeru Ishiba a fait adopter en décembre un plan de relance équivalant à 136 milliards d’euros censé doper le pouvoir d’achat, avec des enveloppes aux ménages et le rétablissement des subventions à l’énergie.

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