Terrain inconnu pour les gestionnaires de fortune indépendants

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Selon Ilaria Santini de BDO, l’obtention de la licence Finma entraînera une surcharge de travail.

Depuis le 1er janvier 2020, les gestionnaires de fortune indépendants sont soumis aux nouvelles lois sur les services financiers (LSFin) et sur les établissements financiers (LEFin). Réorganisation, compliance, gestion des risques, fonds propres, infrastructure informatique: quelles sont les implications de ces évolutions réglementaires? Le point avec Ilaria Santini, Responsable Asset Management Suisse romande chez BDO qui accompagne environ 80 gestionnaires dans l’obtention de la licence Finma.

Comment ces nouvelles lois, qui ont un délai de mise en conformité, impactent le travail des gestionnaires de fortune?

Avec la LSFin, les gestionnaires de fortune sont soumis à de nouvelles contraintes réglementaires. D'ici à la fin de l'année, ils doivent prévoir une directive sur la gestion et le conseil ainsi qu'une directive sur les règles de conduite LSFin. Ils doivent également mettre à jour leurs mandats de gestion et conseil, créer une note d'information à l'attention du client et classifier leurs clients ainsi que documenter les informations et conseils donnés à ces derniers. Il est possible de renoncer à la classification des clients pour autant qu'ils soient tous traités comme des clients privés. Dans ce cas, l'établissement renonce aux allègements accordés par la LSFin pour les clients professionnels ou institutionnels. Les gestionnaires doivent ainsi vérifier l’adéquation des services proposés par rapport aux connaissances et à l'expérience de chaque client, à sa situation financière et à ses objectifs.

Si l'activité ne présente pas de risques élevés, l'indépendance entre le contrôle des risques et la gestion n'est pas requise.
Quels changements vont-ils devoir effectuer sur leur organisation, en particulier sur la compliance, la gestion des risques et le contrôle interne?

L’obligation d’avoir un système de contrôle interne qui couvre le risque lié aux activités principales est une exigence centrale. Il s’agit notamment de mettre en place une analyse des risques, des directives et procédures adéquates et de revoir l’organisation interne. L'établissement doit disposer d'un conseil d'administration, d'une direction et d'une fonction Compliance & Risques externalisée ou internalisée. Toutefois, l'organisation peut rester très simple avec même un seul dirigeant. Si l'activité ne présente pas de risques élevés, en présence d'un produit brut inférieur à 2 millions de francs ou de moins de 5 postes à plein temps, l'indépendance entre le contrôle des risques et la gestion n'est pas requise. Cependant, en présence d'un dirigeant unique, un partenaire externe est appelé à garantir la continuité des activités. L’établissement conclut alors un accord ad-hoc avec le partenaire externe qui permettra à ce dernier, en cas de besoin, de reprendre à tout moment les tâches essentielles.

Quels en seront les coûts?

Les coûts peuvent s'avérer significatifs. Il faut d'abord considérer les coûts liés à la préparation du dossier d'autorisation, à la supervision de l'Organisme de Surveillance (OS) et de la Finma ainsi que les coûts de la fonction Compliance & Risques et de l'informatique. Il ne faut pas oublier non plus que le capital minimal prévu par la LEFin est de CHF 100'000 et qu'il doit être maintenu en permanence sur le compte courant. Ainsi, l'autorisation Finma comporte la nécessité de respecter les exigences en matière de fonds propres qui doivent s'élever en permanence à au moins un quart des frais fixes. 50% des fonds propres peuvent être couverts grâce à l’assurance responsabilité civile professionnelle. Toutefois, une augmentation de capital ou un prêt subordonné est parfois à prévoir.

Le processus de préparation de la requête peut prendre quelques semaines voire quelques mois. Les échanges avec l'OS et la Finma peuvent ensuite durer plusieurs mois.
Les gérants de fortune indépendants devront-ils reconsidérer leur structure informatique?

Selon le nombre et la complexité des relations d'affaires, il faudra implémenter un outil PMS (Portfolio Management System) pour gérer correctement les contrôles à effectuer. Ces outils permettent de gérer les contrôles LBA, les limites d'investissement, le reporting et de respecter les nouvelles exigences en termes de suitability.

Que risquent les sociétés qui ne seront pas prêtes à temps?

Le processus de préparation de la requête peut prendre quelques semaines voire quelques mois. Les échanges avec l'OS et la Finma peuvent ensuite durer plusieurs mois. Les retardataires s'exposent à des procédures d'enforcement de la part de la Finma, ce qui est déjà le cas pour certaines sociétés qui ont commencé une activité à titre professionnel en 2020 et n'ont pas encore déposé leur requête.

Comment accompagnez-vous les gestionnaires dans l’obtention de leur licence Finma?

Nous proposons dans le cadre de la requête en autorisation un accompagnement global qui inclut toutes les étapes de la requête: l'adaptation ou l'établissement de l’ensemble de la documentation nécessaire (statuts, règlements, directives, business plan, formulaires Finma et revue des mandats). Nous prenons également en charge la clarification de l’ensemble des questions des OS et de la Finma, du dépôt de la demande à l’obtention de l’autorisation. Nous pouvons ainsi appuyer le responsable Compliance & Risques ou proposer des solutions d'externalisation ad hoc. Nous avons de très bons contacts avec les OS et la Finma du fait que nous sommes des réviseurs prudentiels. Notre équipe est composée de réviseurs et de juristes. A ce jour, nous accompagnons environ 80 gestionnaires en Suisse.

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