Oliver Adler, chef économiste de Credit Suisse, anticipe une reprise modérée de l’économie helvétique l’an prochain.
Le pire sera évité cette année mais la reprise ne sera pas spectaculaire en 2021. C’est dans les grandes lignes le tableau brossé par Credit Suisse qui a présenté mercredi le «Moniteur Suisse» pour le troisième trimestre. Le point avec Oliver Adler, chef économiste chez Credit Suisse.
D’une part, il y a une raison presque mathématique à ce pronostic pour 2021. Si l’économie suisse chute moins fortement cette année que dans d’autres pays, le rebond sera logiquement lui aussi un peu moins prononcé qu’ailleurs l’an prochain. D’autre part, cette prudence s’explique aussi par le fait que nous ne sommes pas encore sortis de la crise sanitaire du Covid-19. Le virus est encore là et il ne partira pas si vite ! Même si un vaccin efficace est trouvé, il ne sera pas disponible immédiatement partout. Cela se traduira notamment par une mobilité restreinte. De plus, un certain climat d’incertitude général demeure aussi - notamment en ce qui concerne le marché du travail. Nous tablons sur une hausse du chômage et n’anticipons pratiquement aucune hausse de salaires.
Enfin, certaines questions restent ouvertes concernant la poursuite des mesures de soutien étatiques au cours des prochains mois. Tous ces éléments font que l’on peut s’attendre à une évolution timide de l’économie l’an prochain.
On observe effectivement une certaine prudence des consommateurs concernant les achats importants. Certes, la plupart des travailleurs ne vont pas perdre leur emploi l’an prochain. Malgré tout, le climat d’incertitude qui persiste autour de la crise du coronavirus amène beaucoup de ménages à repousser à plus tard certaines dépenses importantes.
et elles le resteront certainement encore l’an prochain.»
Côté négatif, on voit que beaucoup d’entreprises hésitent à embaucher du personnel. Côté positif, on observe qu’il y a beaucoup de créations d’entreprises. Dans l’ensemble, je ne suis pas trop pessimiste pour l’an prochain. Le pic du taux de chômage en Suisse devrait être atteint environ en milieu d’année prochaine.
Si l’on considère les principaux pays d’origine des personnes qui immigrent dans notre pays, on voit que l’Allemagne a, jusqu’à présent, plutôt bien surmonté la crise du Covid-19, ce qui devrait limiter l’attrait pour les Allemandes et Allemands de venir travailler en Suisse. Le Portugal a aussi relativement bien traversé la crise jusqu’ici. En revanche, la pression sera certainement plus forte du côté de l’Italie pour chercher un emploi en Suisse. C’est donc un tableau d’ensemble contrasté.
Maintenant, il faut aussi considérer la question du côté de la demande: ici aussi, les entreprises restent hésitantes à embaucher et elles le resteront certainement encore l’an prochain, ce qui freiner le recrutement de personnes provenant de l’UE. Dans l’ensemble, la situation actuelle n’est absolument pas comparable avec celle qui prévalait dans les années qui ont suivi la crise financière, où l’on avait vu affluer jusqu’à plus de 80'000 personnes par an en Suisse. On avait alors une combinaison entre, d’un côté, une nette reprise de l’économie helvétique contrastant avec une crise dans la zone euro de l’autre. Actuellement, l’évolution conjoncturelle en Suisse et en Europe est bien plus similaire.
Les exportations vers les Etats-Unis sont fortement dominées par l’industrie pharmaceutique. C’est un secteur qui est ainsi moins affecté par les variations des taux de change que ce n’est le cas pour l’industrie des machines, par exemple. L’appréciation du franc par rapport à l’euro avait fortement affecté les marges de nombreuses PME, jusqu’à mettre leur existence en danger. La dépréciation du dollar par rapport au franc et à d’autres monnaies observée ces derniers mois est plus graduelle et elle n’entraînera pas les mêmes problèmes que cela a été le cas avec l’euro.