L’infrastructure pour faire la différence

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Michael Sieg, CEO de ThomasLloyd Group, marie infrastructure et finance d’impact.

ThomasLloyd Group, spécialisé dans le financement d’infrastructures d’énergie renouvelable en Asie, a levé 339 millions d’euros auprès de ses clients au cours de l’exercice 2019, soit une hausse de 63% par rapport l’année précédente. En mai 2019, le groupe lançait le premier fonds d’impact d'infrastructure publique ouvert. Pour Michael Sieg, CEO du groupe, les fonds d’infrastructures privés sont de meilleurs véhicules de placement que les fonds cotés qui sous-performent les indices à moyen-terme. Entretien.

Quels sont les meilleurs véhicules pour s’exposer au thème des infrastructures?

Les instruments permettant d’investir dans les infrastructures sont très variés. Chacun possède des caractéristiques distinctes et spécifiques concernant les périodes de détention, la liquidité et les critères de performance. Les véritables avantages des investissements dans les infrastructures, à savoir des rendements supérieurs ajustés en fonction des risques et la diversification du portefeuille grâce à des actifs non corrélés, sont plus intéressants par le biais du marché privé, que ce soit dans des fonds ouverts ou fermés. Il y a certes des contraintes de liquidité, mais c’est le prix à payer pour obtenir des performances d’investissement supérieures et une volatilité plus faible.

«De nombreux fonds d’infrastructure cotés
ne présentent pas les avantages supposés de la classe d’actifs.»
Que reprochez-vous aux fonds d’infrastructure cotés?

De nombreux fonds d’infrastructure cotés en bourse offrent généralement des possibilités d’investissement spécifiques à un secteur et ne constituent donc pas une véritable diversification du portefeuille. De plus, ils ne présentent pas les avantages supposés de la classe d’actifs, à savoir des rendements monopolistiques, une certitude réglementaire, des flux de trésorerie stables ou en hausse et une protection contre l’inflation. Leurs principaux indices de référence ont sous-performé le S&P 500 à moyen et long terme tout en suivant les mêmes évolutions et la même volatilité. La liquidité qu’ils offrent n’est qu’une maigre consolation pour les investisseurs qui cherchent à se défaire d’un actif sous-performant le plus vite possible et à moindre coût.

Une majorité de vos investissements projets d’investissement d’impact sont en Asie. A quelle philosophie d’investissement ce choix répond-il?

Nous croyons fermement aux investissements où notre argent fait une différence. L’intention de l’investisseur de générer un impact social et/ou environnemental positif grâce à l’investissement constitue un trait déterminant de cette classe d’actifs. Il en va de même pour l’intention de générer un retour financier sur le capital. Il importe de ne pas confondre l’investissement à impact, qui vise à générer des rendements conformes au marché, avec la philanthropie ou les dons caritatifs.

Comment atteignez-vous vos objectifs?

Nous développons et construisons de véritables infrastructures. Pour un investisseur de détail, l’achat d’actions cotées en bourse ne fait que modifier la propriété des entreprises existantes, souvent de la manière la plus modeste et la plus marginale. Il n’apporte pas de nouveaux fonds à une entreprise et ne lui confère aucun contrôle ou influence. En revanche, la création de nouveaux actifs apporte de nouveaux emplois, de nouvelles possibilités et un nouvel espoir aux communautés dans lesquelles nous opérons. Les emplois que nous créons, les impôts que nous payons et les projets sociaux qu’ils financent à leur tour créent un réel impact positif.

«L’investissement dans les infrastructures est un excellent moyen
d’atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies.»
Ces investissements ont-ils de nouvelles exigences en matière de reporting?

Oui, ils exigent une nouvelle façon de rendre compte aux investisseurs avec une présentation rigoureuse des impacts socio-économiques et environnementaux, qui ne se borne pas à exposer de simples mesures purement financières. A tous points de vue, l’investissement dans les infrastructures est un excellent moyen d’atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies et de relever les défis d’un monde post-COVID.

Quelles sont les attentes de vos investisseurs?

Nos investisseurs exigent que leur argent soit investi là où il fait une différence positive et mesurable et évite les industries, les technologies et les secteurs contribuant au réchauffement climatique, à des problèmes de santé, à des inégalités de revenus ou à la restriction des libertés politiques. Dans une certaine mesure, cet objectif est réalisable en investissant dans une optique ESG, mais il s’agit souvent d’une stratégie d’exclusion plutôt qu’une stratégie misant sur des résultats positifs.

Que pensez-vous des stratégie ESG misant sur des résultats positifs?

Il s’agit certainement de la dernière «mode» en matière d’investissement, mais elle ne manque pas d’incohérences. Nous avons du mal à voir comment un fonds ESG peut justifier un investissement dans l’extraction de combustibles fossiles ou dans la production automobile de moteurs à combustion interne sur la seule base de l’«engagement des entreprises» ou du «dialogue».

Les fonds d’investissement socialement responsable (ISR) ou à impact sont-ils vraiment plus performants que les fonds traditionnels?

Il n’y a pas de conflit entre une action positive et une action profitable. Il n’y a donc pas lieu de faire un compromis entre performance et impact positif. L’accent mis sur la gouvernance et la conformité réglementaire dans les domaines social et environnemental, ainsi que l’obligation de prouver l’impact d’un investissement sont des outils puissants pour aider à identifier les entreprises et les stratégies les mieux adaptées aux ambitions des investisseurs.

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