Appétit grandissant pour les produits structurés

Yves Hulmann

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David Schmid, membre du comité de l’ASPS, observe aussi à nouveau un goût prononcé pour le risque chez certains investisseurs.

Les produits structurés ont suscité un intérêt croissant auprès des investisseurs helvétiques en 2019, avec des variations significatives en fonction des catégories de produits par rapport à l’an précédent. Avec 352 milliards de francs, ce volume a été supérieur de 6% par rapport à l’an précédant, ou 21 milliards de plus, comme l’a indiqué lundi l’Association Suisse Produits Structurés (ASPS), la structure qui regroupe les principaux émetteurs de ces véhicules de placement en Suisse.

Par types d’instruments, les produits d’optimisation du rendement («yield enhancement») demeurent la catégorie de placement la plus populaire (48 %), en légère hausse par rapport à l’année précédente (46% en 2018). Ils sont suivis par les produits de participation, qui ont représenté désormais le deuxième plus grand contributeur au chiffre d’affaires avec 20% (18% un an plus tôt), devançant désormais les produits avec effet de levier («leverage») avec 18% qui figuraient un an plus tôt en deuxième position avec 22%. Les produits servant à la protection du capital arrivent en troisième place avec 13%. Les actions (56%) et les devises (26%) ont continué de dominer en tant que catégories d’actifs en 2019. Les produits non cotés formaient 63% du chiffre d’affaires en 2019 (2018: 62%). Les monnaies les plus utilisées étaient dans l’ordre le dollar, l’euro et le franc suisse qui représentaient en tout quelque 88% des transactions. Quelles sont les grandes tendances à attendre dans la branche? Le point avec David Schmid, membre du comité de l’Association Suisse Produits Structurés (ASPS) et Head of Investment & Banking Solutions Leonteq Securities AG, à l’occasion de la présentation du rapport sur la création de valeur dans la branche en 2019.

«Les clients voudront toujours davantage acheter
les produits via un point d’achat unique à l’avenir.»
Durant l’année 2019, la part des produits de levier («leverage») a diminué, tandis que celle des produits de participation a augmenté. Est-ce une tendance de fond ou une évolution momentanée due à l’environnement des marchés?

C’est une réaction à l’évolution des marchés. L’attrait des produits de participation varie en fonction des conditions du marché. C’est le cas aussi pour tous les types de produits: par exemple, si vous achetez un reverse convertible (BRC) avec un coupon de 6%, l’attrait du rendement ainsi proposé sera différent si la performance annuelle du marché des actions est de 5% ou si elle est de 30%.

Après une année boursière très favorable comme cela a été le cas en 2019, comment les investisseurs se positionnent-ils?

D'une part, lorsqu’un marché haussier persiste plus longtemps, on constate que certains investisseurs préfèrent investir via des produits de participation avec un coussin de sécurité à la baisse plutôt que d'acheter directement des actions ou des indices. D'autre part, nous constatons une demande croissante de produits de type «capital protection» où le risque de perte est limité et où l’on peut toujours participer à des marchés en hausse. Chaque constellation de marché a une préférence pour des produits différents: les produits à effet de levier sont des instruments à court terme utilisés sur des marchés volatils, tandis que les produits de participation bénéficient souvent d'une demande croissante dans les tendances à long terme.

Au niveau de la distribution des produits structurés, anticipez-vous une consolidation du marché – par exemple, à l’aide de plateformes réunissant l’ensemble des produits disponibles?

Je pense que les clients vont toujours davantage vouloir acheter les produits via un point d’achat unique à l’avenir. C’est le cas par exemple via la plateforme LYNQS de Leonteq, une sorte de «one-stop-shop» pour les produits structurés, qui est un projet s’inscrivant dans cette logique. Elle est ouverte de manière conséquente à tous les émetteurs. Le concept est qu’avec un seul «login» il soit possible d’avoir accès à l’ensemble de l’offre de produits existants et de disposer d’une vue d’ensemble du cycle de vie de ces produits. Qu’il s’agisse des produits structurés ou d’autres domaines comme la réservation de chambre d’hôtels ou de vols, les clients souhaitent aujourd’hui avoir accès à vue d’ensemble des produits disponibles via une seule plateforme.

«Quand il n’y a pas eu d’événements vraiment négatifs depuis longtemps,
la tendance à encourir davantage de risques augmente à nouveau.»
Depuis sa création, l’ASPS a entrepris beaucoup d’efforts pour unifier la terminologie utilisée dans le domaine des produits structurés. Certains émetteurs continuent toutefois d’employer leurs propres termes pour commercialiser leurs produits. Qu’anticipez-vous?

En tant qu’association de branche, nous saluerions bien sûr que l’ensemble des acteurs utilisent à la terminologie définie dans le cadre de la Swiss Derivative Map. A mon avis, cela contribuerait à renforcer à la fois une meilleure acceptation auprès des clients et faciliterait la comparaison entre produits.

Les produits structurés sont aussi toujours plus souvent utilisés comme moyen de développer des investissements thématiques. Pourquoi un produit structuré serait-il ici préférable à un fonds de placement classique?

Un certificat «tracker» peut être plus rapidement lancé qu’un fonds thématique, le tout à des frais moindres. Les produits structurés sont meilleur marché et plus rapides à mettre en place afin de répondre à l’intérêt des investisseurs pour une thématique donnée. Cela peut être le cas aussi bien pour des thèmes comme la 5G, les cryptomonnaies, les placements ESG ou les actions à dividendes élevés.

La compréhension du public non professionnel pour les produits structurés s’est-elle améliorée au cours des dernières années?

Oui, elle s’est significativement améliorée. Nous poursuivons du reste nos efforts pour favoriser une meilleure compréhension du public pour ces produits, notamment via des vidéos explicatives ou des séminaires. La «Swiss Derivative Map», un document explicatif qui présente la vue d’ensemble des produits disponibles, existe aussi depuis plus de dix ans mais interpréter des diagrammes n’est facile pour tout le monde.

En parallèle, j’observe aussi que beaucoup d’investisseurs, même lorsqu’ils comprennent bien ces produits, sont tendanciellement redevenus plus avides et ont à nouveau tendance à prendre des risques. Certains investisseurs préfèrent opter pour des coupons élevés et des barrières moins éloignées du cours du sous-jacent. Quand il n’y a pas eu d’événements vraiment négatifs depuis longtemps, la tendance à encourir davantage de risques augmente à nouveau aussi avec le temps.

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