Rien ne freine l'optimisme des marchés

Thomas Planell, DNCA Invest

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Les investisseurs parient sur une baisse des taux d'intérêt et sur le scénario «boucle d'or».

A Zurich, Jelmoli, l'équivalent suisse des grands magasins du boulevard Haussmann, ferme ses portes après 120 ans au service de la splendeur de la place financière. Quelques mètres plus loin, son principal concurrent, Globus, n'est pas en meilleure posture. Son propriétaire Signa est en faillite depuis décembre. Le château de cartes de l'Autrichien René Benko s'est effondré sous l'effet de la hausse des taux d'intérêt, entraînant ses créanciers dans sa chute. Après la débâcle du Crédit Suisse, cette situation pèse également sur le secteur. Les turbulences dans le secteur de l'immobilier commercial se sont également reflétées dans l'indice KRX des banques régionales américaines, qui a chuté jusqu'à 11% en une seule séance.

L'économie européenne a fortement ralenti

BNP Paribas a, selon Jean-Laurent Bonnafé, «tourné la page» des prêts immobiliers indexés sur le franc suisse en Pologne, figeant définitivement le coût de l'affaire à 450 millions d'euros. Malheureusement, l'horizon est plus sombre que prévu. L'objectif d'un retour sur fonds propres de 12% est repoussé à 2026. La situation est similaire chez ING et Sabadell. L'inversion de la courbe des taux provoquée par la politique monétaire est l'épine dans le pied de la transformation des banques. Elle pourrait durer jusqu'en 2024: l'inflation sous-jacente ne semble pas avoir baissé assez rapidement en janvier pour inciter Christine Lagarde à agir dès le mois de mars. Et ce, alors que l'économie européenne a fortement ralenti.

Les marchés américains commencent l'année avant l'Europe: la récession des bénéfices fin 2023 est nettement moins prononcée.

Plus de la moitié des rapports d'entreprise sont décevants

La première salve de résultats d'entreprises confirme pour l'instant la tendance à la baisse de la zone euro. Un cinquième du Stoxx Europe 600 a publié des résultats. L'activité commerciale est faible: les chiffres d'affaires ont baissé de 3%. Sur 10 secteurs, 6 ont signalé une croissance nulle ou négative de leur chiffre d'affaires. Le bénéfice par action suit la même tendance: une baisse globale de 4%. Les secteurs liés aux matières premières (matériaux, énergie) sont les plus touchés. Les sociétés de consommation discrétionnaire résistent le mieux (LVMH en tête), mais dans l'ensemble, plus de la moitié des publications d'entreprises ont été décevants: c'est le pire millésime depuis 2009. L'optimisme prévaut néanmoins. Le CAC40 reste 1% en dessous de son plus haut historique de 7’700 points. Le marché boursier italien évolue à son plus haut niveau depuis mars 2008.

Focus sur la campagne présidentielle

Les marchés continuent de se concentrer sur la reprise des bénéfices attendue pour 2024: selon Bank of America, les bénéfices augmenteront d'environ 8% au niveau mondial. Les marchés américains commencent l'année avant l'Europe: la récession des bénéfices fin 2023 est nettement moins prononcée (-1% pour le S&P500 au quatrième trimestre). Les méga capitalisations technologiques (qui expliquent 45% de la performance de l'indice) sont le rempart contre le pessimisme, mis à l'épreuve avant l'entrée dans le vif du sujet de la campagne présidentielle. Dans le meilleur des cas, Biden l'emporte avec un bilan économique satisfaisant et une politique étrangère rassurante. Dans le cas contraire, l'impôt sur les sociétés baisse à 15%, les droits de douane sur l'Europe augmentent et les entreprises du Vieux Continent réagissent en s'installant aux Etats-Unis. Et s'il le faut, elles y font coter leurs actions, comme CRH, Flutter, Fergusson et Linde. De quoi réconforter les marchés à quelques mois de la sortie de l'épisode II: «La revanche de Trump», d'autant que les baisses de taux devraient faire leur retour d'ici là.

Une croissance stable grâce au plein emploi des consommateurs

Les marchés misent sur la baisse des taux d'intérêt et sur le scénario «boucle d'or»: une croissance stable grâce au plein emploi des consommateurs. Alors que les marchés rêvent de nouveaux sommets, la prime de risque du S&P 500 continue de baisser pour atteindre son niveau le plus bas depuis 23 ans.

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