Où en est l’industrie financière durable?

Federica Calvetti, Eurizon

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L’Union européenne et ses Etats membres sont les plus grands pourvoyeurs de financements pour le climat dans le monde.

L’industrie financière joue un rôle essentiel en ce qui concerne la crise climatique et les ressources: en effet, une combinaison d’investissements privés et publics est nécessaire afin d’atteindre les objectifs de durabilité climatique, environnementale et sociale. Alors que l’UE et ses Etats membres sont les plus grands pourvoyeurs de financements pour le climat dans le monde, les mesures prévues dans le cadre du Pacte Vert européen et de la US Inflation Reduction Act soulignent, par exemple, la nécessité de mobiliser les flux financiers et de capitaux privés en faveur de l’investissement vert. 

Dans ce contexte, l’industrie financière a la capacité d’orienter davantage de capitaux vers les secteurs où les investissements nécessaires pour relever les défis posés par la transition vers une société neutre en carbone sont plus élevés. Pour y parvenir, le secteur financier doit établir des pratiques d’engagement efficaces avec les émetteurs afin de s’assurer que les plans de transition et les investissements globaux sont clairs et proportionnels au potentiel du secteur et de la zone géographique concernés.

Augmentation de la transparence

Les critères de deuxième niveau du Règlement (UE) 2088/2019, entrés en vigueur le 1er janvier 2023, ont imposé une augmentation de la transparence pour les produits Art. 8 et Art. 9 au moyen de modèles standardisés pour l’industrie européenne. Cette étape a été significative en visant à améliorer la possibilité de comparer les produits financiers entre eux: l’introduction d’indicateurs Impact Adverse Principal, en particulier, permettra de suivre les performances et les pratiques environnementales et sociales tout en aidant à identifier des initiatives ciblées pour leur amélioration. Cependant, ce n’est, selon nous, pas la dernière étape de l’évolution réglementaire et nous devrons continuer à accueillir les futures orientations réglementaires, tout en respectant les demandes et les besoins de nos clients.

Le greenwashing doit être limité

Selon Morningstar, au quatrième trimestre 2022, plus de 300 fonds ont été déclassés de l’Art. 9 à l’Art. 8 en raison de l’absence de données adéquates ou du non-respect des exigences minimales en matière de produits conformément aux exigences de la SFDR.

Éviter l’écoblanchiment est clairement une priorité et la consolidation du cadre réglementaire est certainement une évolution bienvenue. Alors que le cadre réglementaire est toujours en évolution, les déclassements sont principalement survenus suite à des clarifications supplémentaires qui ont été fournies au cours de l’année 2022, sur la base desquelles l’industrie a dû s’adapter et, parfois, renforcer ses pratiques.  

Les données des entreprises manquent encore souvent

Selon le CDP, près de la moitié des entreprises européennes ayant répondu au questionnaire sur les changements climatiques de 2022 prétendent avoir des plans de transition climatique alignés sur la limite de 1,5 °C de l’Accord de Paris. Cependant, l’analyse du CDP révèle que moins de 5% des entreprises démontrent une meilleure préparation à la transition, nécessaire pour atteindre l’objectif de l’Accord de Paris. À l’heure actuelle, il reste donc un fossé à combler entre l’ambition et la réalité. Avec l’entrée en vigueur de la CSRD début 2024, les entreprises devront répondre à des exigences détaillées pour rendre compte de leur impact sur l’environnement, le respect des droits de l’homme, les normes sociales et les risques liés à la durabilité. Par ailleurs, la directive obligera les entreprises à auditer les informations qu’elles communiquent en matière de développement durable. En fin de compte, la directive améliorera la qualité des informations que nous recevons des entreprises, mais elle aidera également les entreprises à traduire leurs objectifs climatiques stratégiques en plans concrets de mise en œuvre et d’engagement tout au long de la chaîne de valeur, grâce à des informations standardisées et vérifiées sur le développement durable.

Meilleure pratique dans le secteur des services publics

Atteindre la neutralité carbone nécessite un changement rapide et un déploiement technologique à grande échelle dans tous les secteurs. Plus précisément, le secteur des services publics peut être considéré comme un exemple réussi de transition vers une économie verte: ces dernières années, un grand nombre d’entreprises ont réorienté leurs investissements vers des solutions d’énergie renouvelable. De plus, selon le Rapport sur les énergies renouvelables 2022 publié par l’AIE, une forte accélération de l’installation de centrales d’énergie renouvelable est en cours et la croissance totale de la capacité mondiale devrait presque doubler au cours des cinq prochaines années. Les technologies déjà disponibles à l’échelle commerciale, notamment l’éolien terrestre et le solaire photovoltaïque, représentent environ 25% du potentiel de réduction des émissions en Europe, tandis que 45% supplémentaires pourraient provenir de technologies susceptibles d’être commercialisées dans un avenir proche. Cela signifie qu’au-delà des technologies liées aux énergies renouvelables, de nouvelles technologies telles que le captage et le stockage du carbone, l’hydrogène vert et l’électrification industrielle pourraient soutenir la décarbonisation à grande échelle.

Conclusion

Les investissements verts peuvent coûter plus cher que les investissements traditionnels en raison des coûts initiaux élevés et des longues périodes d’amortissement. Cela dit, en calculant le rendement d’un projet vert aujourd’hui, on passe à côté d’un point essentiel concernant le risque de transition: si les entreprises ne s’adaptent pas et n’investissent pas dans des projets verts, elles pourraient être confrontées à des coûts plus élevés à l’avenir et les entreprises qui ont déjà commencé à investir dans des projets verts pourraient devenir plus compétitives.

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