Immobilier indirect: le prix ne fait pas la valeur

Laurent Clauzet, BCGE

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Le prix payé en bourse reflète l’appétit du marché mais aussi ses excès d’optimisme ou de pessimisme en fonction du cycle économique.

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Si la génération et la distribution de revenus sont la clef de la performance à long terme pour les différents titres d’immobilier indirect, nous avons vu que le cours en bourse de ces derniers a été passablement malmené en 2022 et 2023. En effet, entre juillet 2021 et octobre 2023, l’indice SWIIP1 a décroché de presque -25%! Est-ce que cela signifie que la valeur des parcs immobiliers sous-jacents a été réduite d’un quart? Non…  Dans le même temps l’indice IREAL2 gagne +13%, signifiant qu’en moyenne, un immeuble de rendement suisse s’échangeait 13% plus cher en octobre 2023 qu’en juillet 2021.

Dès lors, comment ne pas tout mélanger? En différenciant 3 notions principales: d’abord le cours en bourse des véhicules d’immobilier (fonds cotés et sociétés immobilières). Ce cours correspond au prix auquel les actionnaires et porteurs de part s’échangent le titre. Il fluctue en permanence et est impacté par l’offre et la demande, la conjoncture économique, les attentes des actionnaires-investisseurs ainsi que leur appréciation de la qualité sous-jacente du portefeuille immobilier, sa stratégie et son management. Le prix payé en bourse reflète donc l’appétit du marché mais aussi ses excès d’optimisme ou de pessimisme en fonction du cycle économique.

Heureusement, pour fournir de la transparence sur leurs actifs – dont la valeur n’est pas observable – et donner une indication à l’investisseur, ces titres publient chaque année la valeur nette réévaluée de leurs fonds propres. Dans le cadre de l’immobilier, cette valeur réévaluée dépend quasi exclusivement de l’estimation financière des immeubles réalisée annuellement par des évaluateurs indépendants. Ainsi quand les prix en bourse perdaient 25%, la valeur nette d’inventaire (VNI) des fonds cotés gagnait environ 5% sur la même période, sans prendre en compte les revenus distribués sous forme de dividende, preuve que selon toute vraisemblance la valeur de leurs actifs n’avait pas baissé, du moins selon les évaluateurs.

Enfin, si vous lisez attentivement les rapports annuels des véhicules d’immobilier indirect, vous y trouverez une troisième valeur très intéressante: le prix de revient comptable des immeubles, soit le coût historique d’achat ainsi que les investissements d’entretien lourd consentis depuis. C’est une donnée très importante à mettre en rapport avec la valeur des fonds propres levés dans le passé: c’est cette valeur qui fixe durablement le rendement du parc immobilier et donc le rendement dividende de chaque action existante. Il est également recommandé de comparer prix comptable et valeur d’évaluation des immeubles de façon régulière afin d’examiner la plus-value latente générée par le gestionnaire.

En conséquence, si le prix en bourse est probablement le plus transparent à court terme et permet de prendre une photographie de l’état du marché actuel et des anticipations futurs, il ne faut pas hésiter à le comparer à la valeur nette d’inventaire, de façon absolue puis relative, pour l’ensemble de l’indice. De cette manière, vous décèlerez le sentiment du marché dans son ensemble, sur un sous-secteur immobilier mais aussi sur un titre en particulier. L’analyse fondamentale et notamment l’observation des états financiers vous permettra ensuite de déterminer si ce sentiment est justifié! Enfin, à long terme, le rendement payé à l’achat des immeubles, fixe durablement la rentabilité du véhicule et devrait donc être soigneusement analysé et comparé.

 

1 L’indice SXI Real Estate® Funds Broad PR représente le cours en bourse des 42 fonds immobiliers suisse cotés à la SIX Swiss Exchange.

2 L’indice SWX IAZI Investment Real Estate Price représente l’évolution de la valeur des immeubles de rendement (résidentiels et commerciaux) et se base sur l’observation du marché des transactions immobilières à l’échelle nationale.

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