La Chine peut-elle nous sauver de la récession?

Stéphanie de Torquat, SILEX

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La réouverture chinoise ne change pas radicalement la donne, mais offre néanmoins des aspects positifs.

Lorsque la deuxième économie mondiale, la Chine, a surpris le monde en réouvrant ses frontières et en redémarrant l’intégralité de ses activités en seulement quelques semaines, beaucoup y ont vu une bouée de sauvetage inespérée des récessions qui se profilaient dans les économies occidentales développées.

Quelques mois plus tard, alors que les chiffres de croissance chinoise du premier trimestre ont été récemment publiés, qu’en est-il?

La Chine va-t-elle permettre aux Etats-Unis, ou à la zone euro, d’échapper à un fort ralentissement de fin de cycle dans le sillage d’un resserrement monétaire historiquement rapide et agressif?

Probablement pas. Et la raison en est très simple. La reprise chinoise est avant tout une reprise de sortie de confinement, donc essentiellement domestique, et peu intensive en investissement comparé aux cycles précédents.

Les détails sous-jacents de la croissance chinoise du premier trimestre, qui a surpris à la hausse, avec 4,5% de croissance en rythme annuel et 2,2% sur le trimestre, vient confirmer cette hypothèse.

En effet, le secteur tertiaire, c’est-à-dire des services, est en hausse de 5,4% sur douze mois, au-dessus des attentes, alors que le secteur secondaire – c’est-à-dire tout ce qui a trait à l’activité industrielle – a déçu avec seulement 3,3% de hausse.

Et il y a toutes les raisons de penser que la consommation restera soutenue en 2023 avec une amélioration de la confiance des ménages, un excès d’épargne relativement important, une baisse du chômage – même si le chômage des jeunes reste un souci – et une stabilisation de l’immobilier avec les prix des maisons en hausses dans la vaste majorité des plus grandes villes.

Dans ce contexte, l’objectif de croissance du gouvernement fixé à 5% pour 2023 devrait être atteint sans difficulté, la plupart des prévisionnistes envisageant aux alentours de 6% de croissance sur l’année en cours.

Cela dit, le fait que le gouvernement ait fait le choix délibéré d’un objectif en apparence peu ambitieux pour le pays est un signal fort de sa volonté affichée de ne pas «sur-stimuler» l’économie – comme cela a pu être fait par le passé – et de poursuivre sa transition d’un modèle de croissance tiré par la production et les exportations vers un modèle centré davantage sur le consommateur domestique.

C’est la raison pour laquelle cette réouverture chinoise – même si elle va évidemment contribuer positivement à la croissance globale en 2023 – ne suffira probablement pas à éviter les ralentissements significatifs qui se profilent aussi bien aux Etats-Unis qu’en zone euro à horizon 2024.

Cela dit, lorsque la deuxième économie mondiale passe de 3% à 6% de croissance en rythme annuel, ce n’est bien sûr pas neutre, et il est important de se poser la question de son impact sur le reste du monde.

Cinq points majeurs sont intéressants à souligner.

D’abord, la Chine étant avant tout un très gros exportateur de biens, cette réouverture a permis de totalement normaliser les chaînes de production mondiales, aidant ainsi de façon matérielle avec le processus de désinflation globale.

La réouverture n’impacte pas significativement les prix du pétrole.

Deuxième point, cette réouverture n’impacte pas significativement les prix du pétrole, qui sont retombés sous la barre des 80 dollars à l’heure où nous rédigeons ces lignes, et ce malgré les baisses de production inattendues annoncées par l’Opep le mois dernier, symptôme très net de la baisse significative de la demande mondiale.

Troisième élément, la Chine étant le plus gros marché d’exportation de l’Union européenne, cette réouverture est très positive pour les exportateurs européens et un soutien pour l’euro, associée, bien sûr, à la forte baisse des prix de l’énergie au tournant de l’année.

Un quatrième élément intéressant à mettre en avant concerne le tourisme chinois, qui correspond de loin à la plus grosse partie des importations de service du pays. A ce stade, le touriste chinois est loin d’être encore totalement revenu, avec des restrictions à son accueil toujours en place dans certains pays, mais également des contraintes de prix et de capacité pour les vols internationaux – beaucoup de compagnies aériennes ne s’étant pas attendues, et donc pas préparées, à une réouverture aussi rapide. Le tourisme chinois devrait donc prendre de l’ampleur au deuxième semestre avec des thématiques d’investissement potentiellement intéressantes.

Enfin, sans surprise, l’Asie devrait être le plus grand bénéficiaire économique de cette reprise, la région dans son ensemble étant le principal partenaire commercial du pays – avec, par exemple, plus de 20% des exportations de l'Asie hors Chine destinées à la Chine.

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