Investir en Inde et éviter les problèmes commerciaux

Daryl Liew, REYL

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Les pays asiatiques sont orientés vers l’exportation. Toute restriction du commerce mondial risque d’avoir un impact négatif sur leur économie.

 

Les tensions commerciales ont jeté une ombre sombre sur l’Asie cette année, de nombreuses bourses régionales ont enregistré des pertes alors que les États-Unis et la Chine se sont engagés dans un mouvement de «donnant-donnant» faisant augmenter les tarifs douaniers. La plupart des pays asiatiques sont fortement orientés vers l’exportation et toute restriction du commerce mondial risque d’avoir un impact négatif sur leur économie. L’Inde se distingue cependant du reste de l’Asie avec une économie qui est essentiellement d’origine domestique et de fait moins vulnérable à une contraction du commerce mondial. Les actions indiennes (Sensex, Nifty +3%) ont largement surperformé celles du reste de la région (MSCI Asie hors Japon -5%) en monnaies locales.

Le double déficit de l’Inde l’expose
à la hausse du dollar américain.

Alors que les valeurs indiennes pourraient être un bon endroit pour se protéger des tensions commerciales croissantes, les investisseurs étrangers ont tout de même perdu de l'argent cette année puisque la roupie indienne a corrigé de 7% par rapport au dollar US. Cela s'explique par le fait que le double déficit de l'Inde l'expose à d'autres vents contraires, à savoir la hausse du dollar américain, la hausse des taux d'intérêt mondiaux et la hausse des prix du pétrole.

En effet, l'économie de l'Inde est particulièrement vulnérable face au pétrole, la hausse des prix du pétrole pouvant non seulement entraîner une hausse de l'inflation, mais aussi réduire le pouvoir d’achat qui alimente l'économie domestique. Ces attentes d'une inflation plus élevée ont été la principale raison pour laquelle la Reserve Bank of India a relevé les taux d'intérêt de 25 points de base à 6,25% en juin, le premier ajustement à la hausse en plus de quatre ans. L'inflation devrait se rapprocher de 5%, s'approchant de la limite supérieure de 6% que la banque centrale entend atteindre, et le marché s'attend au moins à une hausse des taux supplémentaire cette année. L'inflation sur les denrées alimentaires, qui a été jusqu'à présent stable, est l'autre composante qui pourrait contribuer à une inflation plus élevée, si les pluies de la mousson étaient inférieures à la normale et avec une hausse des prix planchers de soutien aux cultures pour augmenter les revenus des agriculteurs.

Il faut s’attendre à ce que le gouvernement
adopte des politiques plus populistes.

Un autre risque potentiel est la tenue d’élections législatives en 2019. Il y a un an, il était inconcevable que la coalition dirigeante du BJP du Premier ministre Modi puisse être battue, mais les récentes élections partielles régionales ont illustré une tendance à une opposition plus unie à la fois en remportant des sièges et en augmentant la part des électeurs. Il semble désormais que le BJP aura du mal à répéter ses bons résultats aux élections de 2014 et ne parviendra pas à conserver une majorité simple dans le Lok Sabha. Par conséquent, il faut s’attendre à ce que le gouvernement adopte des politiques plus populistes, axées sur les dépenses sociales, afin de gagner les électeurs. Ces incertitudes politiques pourraient peser sur les valeurs indiennes au cours des prochains mois.

Pour en venir aux aspects positifs, il y a aujourd’hui des signes encourageants selon lesquels la croissance du PIB rebondit enfin après avoir atteint un creux l’an dernier en raison de l’exercice de démonétisation et de l’introduction d’une taxe à la consommation. Avec un taux de croissance prévu de 7,5% en 2018, l’Inde est la plus forte croissance de toutes les grandes économies. Cette croissance solide est d’autant plus impressionnante que les banques indiennes sont toujours aux prises avec des niveaux élevés de prêts peu performants, ce qui freine la croissance des crédits. Le plan de recapitalisation des banques n’a pas été pleinement efficace, car le scandale de fraude de la Punjab National Bank a incité les banques à augmenter les provisions sur les pertes et à devenir plus prudentes. L’assainissement des bilans des banques a également été ralenti par des litiges juridiques devant de nouveaux tribunaux chargés de faillites. Bien que ce processus prenne plus de temps que prévu, les choses avancent au moins encore et pourraient potentiellement amorcer un nouveau cycle d’investissement en Inde.  

Dans ce contexte, les bénéfices des entreprises ont été inférieurs aux attentes, bien qu’ils continuent de croître à un taux à deux chiffres relativement bas. Les valorisations sont toutefois devenues beaucoup plus raisonnables, les actions indiennes se négociant à un PE à terme d’environ 15x, le point médian de sa moyenne historique sur cinq ans. Les actions indiennes se négocient toujours à un prix supérieur à celui des autres marchés asiatiques, mais cela s’explique par des perspectives de croissance plus élevées. Faut-il encore que l’Inde exploite pleinement son potentiel de croissance.

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