Le marché immobilier est peu impressionné par la hausse des taux

Yves Hulmann

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Selon Heinz Huber, directeur de Raiffeisen, l’offre de logements demeurera restreinte. En outre, les taux restent attrayants dans une perspective de long terme.

A fin juin 2022, le volume des créances hypothécaires de Raiffeisen a frôlé pour la première fois le seuil des 200 milliards de francs, en hausse de 1,8% par rapport à fin décembre. Du côté des actifs sous gestion, ceux-ci ont atteint près de 239 milliards de francs, en repli de 1% par rapport à la fin de l’an dernier. Au cours du premier semestre, le troisième groupe bancaire helvétique qui compte plus de 800 sites à travers le pays a bénéficié d'un afflux net d'argent frais de 4,4 milliards de francs, comparé à 9,8 milliards durant la même période un an plus tôt. En dépit d’un contexte boursier jugé «ardu» par le groupe, 2,2 milliards d'argent frais ont afflué dans les dépôts, dont près de 28'000 ont été ouverts pendant la période sous revue.

Côté résultats, le produit d'exploitation réalisé entre janvier et juin par Raiffeisen s’est établi à 1,69 milliard de francs, en hausse de 2,8% par rapport à la même période un an plus tôt. Première source de revenus du groupe, les opérations d'intérêts ont crû à plus de 1,23 milliard de francs (+2,1%), alors que les recettes des commissions et services ont augmenté de 17,2% pour s’établir à près de 300 millions. Au final, le bénéfice net a atteint 556 millions entre janvier et juin, en hausse de 10,1% de mieux qu'au premier semestre 2021.

«Dans une perspective de long terme, les taux d’intérêt se situent toujours à des niveaux attrayants.»

Quels sont les objectifs du groupe pour la seconde moitié de l’année 2022 et que faut-il attendre concernant l’évolution du marché hypothécaire? Entretien avec Heinz Huber, président de la direction de Raiffeisen Suisse.

Avec des créances hypothécaires qui ont augmenté de 3,6 milliards de francs entre janvier et juin, en hausse de 1,8%, Raiffeisen a affiché une croissance en ligne avec celle du marché au premier semestre. Lors de la présentation des résultats mercredi, vous estimiez que le marché de l’immobilier n’a jusqu’ici «pas été impressionné» par le changement de tendance des taux d’intérêt. L’impact de la hausse des taux d’intérêt ne va-t-il pas survenir plus tard avec un certain décalage et finir par ralentir la croissance de vos activités dans le domaine hypothécaire?

Il faut tout d’abord rappeler que Raiffeisen dispose déjà de parts de marché très importantes dans le domaine des hypothèques en Suisse, qui correspondent à près d’un cinquième de l’ensemble du marché helvétique. En ce qui concerne l’évolution des prix, on peut observer que le marché suisse du logement en propriété n’a jusqu’ici pas été affecté par le revirement des taux d’intérêt. Pour les objets immobiliers achetés pour usage propre, la hausse des prix s’est même poursuivie au deuxième trimestre: les prix des maisons individuelles ont augmenté en moyenne de 1,3%, tandis que la hausse a atteint 3,5% pour les propriétés par étages, selon des chiffres publiés début août. Globalement, la demande reste toujours supérieure à l’offre de logements disponibles. Et il n’est pas possible d’élargir cette offre dans un horizon de court terme.

«Raiffeisen va continuer d’étendre son offre de conseil et de solutions de placement en matière de prévoyance.»
Avec des taux plus élevés, les clients ne vont-ils pas finir par hésiter à deux fois avant d’emprunter?

Les taux d’intérêt sont certes sensiblement plus élevés qu’il y a un an. Dans une perspective de long terme, les taux d’intérêt se situent néanmoins toujours à des niveaux attrayants. Les conditions que nous appliquons restent inchangées. Nous continuons à exiger un taux d’intérêt hypothécaire calculatoire de 5%, en plus des exigences habituelles en matière de fonds propres.

Malgré un environnement de marché difficile au premier semestre, les banques Raiffeisen ont enregistré un afflux d’argent frais à hauteur de 2,2 milliards de francs dans des dépôts. En outre, 225 nouveaux dépôts ont été ouverts en moyenne pour chaque jour ouvrable. Comment expliquez-vous ces afflux de nouveaux fonds – en raison de la recherche de sécurité de la part des clients?

Ces afflux de nouveaux fonds ne proviennent pas seulement de nouveaux clients mais aussi de clients existants. Ces afflux s’expliquent, d’une part, en raison d’une grande confiance de la clientèle envers Raiffeisen. Ils résultent aussi, d’autre part, du fait que beaucoup de gens souhaitent placer leur argent, notamment dans le domaine de la prévoyance. Je crois que beaucoup de clients réalisent qu’il est important d’investir pour améliorer sa prévoyance sur le long terme. Raiffeisen va continuer d’étendre son offre de conseil et de solutions de placement en matière de prévoyance.

«La relation de proximité avec nos conseillers à la clientèle reste très importante pour nos clients.»
Un autre thème qui figure parmi vos priorités stratégiques en matière d’investissements est celui de la numérisation. Renforcer constamment votre offre de solutions proposées sous forme numérique ne risque-t-il pas de remettre en question la relation de proximité que Raiffeisen entretient avec sa clientèle?

Non, je pense que les deux canaux de distribution – physique et numérique – se complètent. Raiffeisen dispose d’un réseau de points bancaires très dense en étant présent sur 806 sites répartis à travers toute la Suisse qui nous permet d’avoir une relation de proximité très développée avec notre clientèle. Maintenant, nous constatons aussi que beaucoup de nos clients souhaitent pouvoir effectuer des transactions à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. Les clients souhaitent avoir accès à nos services aussi quand ils se trouvent dans leur résidence secondaire ou en déplacement. C’est pourquoi nous continuons à renforcer notre canal de distribution numérique. Pour autant, la relation de proximité avec nos conseillers à la clientèle reste très importante pour nos clients, par exemple lorsqu’il s’agit d’acheter un logement ou une maison ou suite à un héritage.

En outre, le comportement des clients peut aussi évoluer en fonction de leur âge ou selon leur situation personnelle. Certes, parmi notre clientèle la plus jeune, il peut arriver que certains de nos clients n’aient jamais mis un pied dans une agence de Raiffeisen mais cela ne veut pas dire qu’ils n’y viendront pas plus tard lorsqu’ils auront besoin de certains services ou conseils.

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