Goldman Sachs rattrapé par son passé

AWP

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Le DoJ a inculpé deux anciens banquiers de Goldman Sachs dans le cadre de l'affaire du fonds d’investissement public malaisien 1Malaysia Development Berhad (1MDB).

Goldman Sachs, qui symbolise la puissance et les errements de Wall Street, est au centre d’une vaste affaire de corruption et de blanchiment d’argent en Malaisie qui remet en cause des années d’efforts pour redorer une réputation ternie par de nombreux scandales.

Le ministère américain de la Justice (DoJ) a, la semaine dernière, réduit à néant la campagne de renouveau déployée par la firme depuis la crise financière pour rompre avec le sentiment largement répandu d’opacité accolé à son nom.

Il a notamment inculpé deux anciens banquiers de Goldman Sachs pour s’être entendus avec le financier malaisien Low Taek Jho afin de blanchir des «milliards de dollars» présumés détournés du fonds d’investissement public malaisien 1Malaysia Development Berhad (1MDB).

Ce fonds avait été créé par Najib Razak peu après son arrivée au pouvoir comme Premier ministre en 2009, dans le but de moderniser la Malaisie.

«C’est clairement très alarmant de voir que deux anciens salariés de Goldman Sachs ont de façon flagrante contourné nos règles et violé la loi de façon éhontée», a réagi mercredi le PDG David Solomon, dont c’est le premier dossier sensible après un mois seulement aux commandes.

«J’ai honte de voir que des gens qui ont travaillé à Goldman Sachs, et peu importe leur rang, ont contourné nos règles et violé la loi», a ajouté le banquier d’affaires, qui a succédé à l’ancien trader Lloyd Blankfein, dont les douze ans de règne ont été marqués par une prééminence des activités spéculatives.

Le futur Premier ministre malaisien a promis des sanctions si Goldman Sachs était reconnue complice des allégations, selon la presse anglo-saxonne.

Les autorités américaines reprochent à Tim Leissner, 48 ans, qui a dirigé Goldman Sachs en Asie du sud-est, et à son collègue malaisien Ng Chong Hwa, 51 ans, d’avoir violé, dans le cadre de leurs fonctions, les lois anticorruption américaines (FCPA) en versant ou en promettant des pots-de-vin à des officiels malaisiens et d’Abou Dhabi pour qu’ils retiennent Goldman Sachs comme banque conseil dans des transactions «lucratives».

Andrea Vella, de nationalité italienne et coprésident de la division de banque d’investissement de Goldman Sachs en Asie, a été mis à pied en octobre par la firme.

La direction savait-elle?

«La culture des affaires (chez Goldman Sachs), et plus particulièrement en Asie du sud-est, était très focalisée sur l’obtention de contrats et, à certains moments, cet objectif passait devant les exigences règlementaires», a dénoncé le ministère.

Des membres de la direction étaient-ils au courant des agissements de MM. Leissner et Ng ? «Nous prenons très au sérieux les procédures de contrôle et de conformité à la loi et l’avons toujours fait. Nous allons continuer de coopérer avec les autorités. Il y a une procédure en cours et cette procédure ira au bout», répond simplement M. Solomon, qui était au moment des faits un des dirigeants de la division banque d’investissement à laquelle appartenaient les deux hommes.

Ces derniers ont, d’après le ministère américain, pris part à une «conspiration», qui leur a permis de détourner 2,7 milliards de dollars de 1MDB sous forme de rétrocommissions lors de trois émissions obligataires en 2012 et 2013 d’un montant total de 6,5 milliards de dollars.

Goldman Sachs avait été mandatée pour organiser ces opérations et a perçu des commissions d’environ 600 millions de dollars.

Dans un document adressé au gendarme de la Bourse, la SEC, la firme indique faire l’objet d’une enquête pénale du ministère de la Justice et d’autres régulateurs (Suisse et Singapour notamment), ce qui pourrait déboucher sur «l’imposition d’amendes et de pénalités importantes et d’autres sanctions».

C’est un coup dur pour David Solomon, qui s’est donné pour mission de construire un nouveau Goldman Sachs éloigné des activités spéculatives controversées ayant fait de la banque le symbole des «excès» de la finance.

Avant la crise financière, la firme était notamment connue pour ses paris financiers contre ses propres clients. En 2010, Goldman Sachs a accepté de s’acquitter d’une amende de 550 millions de dollars de la SEC pour avoir spéculé sur l’effondrement des «subprimes» qu’elle avait pourtant vendus à ses clients.

La banque avait notamment conçu Abacus, des obligations adossées à des actifs destinées à se défaire des risques de crédit (CDO), au coeur de la crise.

Depuis, «la banque des puissants» veut séduire le grand public, via Marcus, une plateforme virtuelle proposant des prêts et recevant des dépôts de la part des particuliers et des TPE et PME.

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