L'économie allemande traverse une période difficile. Après deux années consécutives de récession, une stagnation menace également en 2025, avec une croissance réelle du PIB estimée à seulement 0,3%. C’est un signal alarmant pour un pays longtemps considéré comme le moteur économique de l’Europe.
Et pourtant, le DAX a progressé d’environ 35% depuis début 2024 – bien plus que le CAC 40 français. Cette divergence s’explique notamment par l’incertitude politique en France et par la différence de composition sectorielle. Les valorisations sont, en comparaison historique, raisonnables, avec un PER autour de 15,5 – et restent attractives face aux actions américaines (PER d’environ 22). Si la reprise économique s’accélère, les actions allemandes pourraient en bénéficier davantage. Des secteurs comme l’industrie, les infrastructures, les services publics, et – pour les investisseurs plus audacieux – la technologie semblent particulièrement prometteurs.
Points forts sectoriels
Tandis que des entreprises technologiques comme SAP (environ 15% du DAX) affichent de solides performances, les constructeurs automobiles – malgré leur importance économique – ne représentent qu’environ 6% de l’indice. Les assureurs comme Allianz et Munich Re profitent de l’environnement de taux d’intérêt et contribuent à la stabilité du marché.
Inflation, taux et crises géopolitiques
Plusieurs facteurs expliquent la faiblesse persistante de l’économie allemande: une forte inflation en 2022 et 2023 a entraîné une perte de pouvoir d’achat réel, affaiblissant la consommation privée. Parallèlement, la politique monétaire restrictive de la BCE – avec une hausse de 450 points de base en 14 mois – a freiné la demande de crédit et affecté le secteur immobilier. La faible demande extérieure, notamment en provenance de Chine, pèse sur les exportations. L’industrie allemande, gourmande en énergie, souffre des prix élevés de l’énergie, affectant sa production. L’ingénierie mécanique, la chimie et surtout le secteur automobile sont sous forte pression.
Ce dernier, pilier traditionnel de l’économie allemande, est confronté à des défis existentiels: l’électrification lente de l’offre et l’essor rapide des constructeurs chinois comme BYD. Sans stabilisation des marchés asiatiques ou sans suppression des menaces de droits de douane américains, peu de répit est en vue.
Les menaces de Donald Trump de taxer les importations européennes ajoutent à l’incertitude. Bien qu’il soit difficile d’en estimer l’impact exact, un scénario extrême avec des droits allant jusqu’à 25% pourrait lourdement freiner les investissements – tant du côté des entreprises que des consommateurs.
Un catalyseur de changement à l’horizon
Des signaux positifs émergent néanmoins. La consommation intérieure repart à la hausse, portée par l’augmentation des salaires réels. Le secteur des services et le commerce de détail montrent une certaine résilience. Les conditions de financement se sont légèrement assouplies en raison des attentes de baisse des taux par la BCE.
Un possible catalyseur de changement: le plan d’investissement de 500 milliards d’euros adopté par le gouvernement allemand en mars 2025. Grâce à l’assouplissement du frein à l’endettement et à la création d’un fonds spécial, il financera des dépenses ciblées dans la défense et les infrastructures – de la modernisation de la Bundeswehr à la rénovation de ponts, d’écoles et à des projets climatiques. Le secteur de la construction, les entreprises de défense, l’industrie (notamment les biens d’équipement) et les services publics pourraient en tirer grand profit. Certes, la dette publique augmentera – aujourd’hui à un niveau relativement bas de 64% du PIB – mais le potentiel de croissance à long terme pourrait également en être renforcé. Des effets inflationnistes à moyen terme ne sont pas à exclure.
Une situation ambivalente
L’Allemagne se trouve à la croisée des chemins. Entre incertitude économique et élan budgétaire, un tableau contrasté se dessine – aussi bien pour les économistes que pour les investisseurs. Une chose est sûre: un investissement sélectif dans les actions allemandes peut encore s’avérer rentable.