Le maintien du franc suisse doit être inscrit dans la Constitution fédérale. Le National a soutenu mercredi, par 185 voix contre 6, le contre-projet du Conseil fédéral à l’initiative populaire sur l’argent liquide.
L’initiative «Oui à une monnaie suisse libre et indépendante sous forme de pièces ou de billets» veut garantir le maintien de l’argent liquide en Suisse. Elle exige aussi que tout projet de remplacement du franc suisse par une autre monnaie soit soumis au vote du peuple et des cantons.
Ces principes devraient être inscrits dans la Constitution. Selon le Mouvement Liberté Suisse (MLS), composé d’opposants aux mesures anti-Covid, cela permettra de garantir le maintien de l’argent liquide en Suisse, qui serait en péril. Le Conseil fédéral a rejeté l’initiative mais opté pour un contre-projet direct.
L’amour du cash
«Les Suisses aiment le cash, mais l’utilisent de moins en moins», a lancé Sydney Kamerzin (Centre/VS) au nom de la commission. La très grande majorité de la population y est attachée selon une étude UBS, mais la part des transactions en liquide est passée de 70% à 35%, face à la poussée des cartes de débit, de crédit et des moyens numériques de paiement.
L’argent liquide est une garantie face aux pannes informatiques, offre l’indépendance par rapport aux supports numériques ainsi que de la sécurité face aux fraudes en ligne, et garantit la protection des transactions, a listé le Valaisan. Pour les jeunes et les aînés, le cash est en outre souhaitable.
Enfin, les frais de commissions élevés liés aux cartes et nouveaux moyens de paiement ne sont pas favorables à certains commerçants. Toutefois, le texte ne l’initiative n’est pas satisfaisant, il est trop imprécis, a plaidé le centriste. Le contre-projet direct du Conseil fédéral prend en compte tous ces éléments.
Le camp rose-vert a tenté de profiter de l’occasion pour ajouter une proposition visant à garantir l’accès aux espèces également aux personnes qui reçoivent des prestations sociales et de l’aide d’urgence. «Le franc suisse n’est pas en danger. Alors pourquoi ne pas profiter de ce projet pour en garantir l’accès aux personnes qui en ont vraiment besoin?», a dit Franziska Ryser (Vert-e-s/SG). Une idée rejetée par 128 voix contre 61.
Pas d’obligation
L’UDC voulait elle préciser noir sur blanc que l’argent liquide doit être accepté comme moyen de paiement. De plus en plus d’endroits n’acceptent plus le cash ou rendent son utilisation compliquée, comme dans les transports publics, a défendu en vain Martin Hübscher (ZH). Une proposition écartée par 121 voix contre 67.
Par contre, le National veut préciser le terme «franc suisse» au lieu de «franc» dans la loi, afin de prendre en compte un objectif central des initiants. Une nuance qui ne change pas grand-chose, excepté pour les juristes, a accepté la ministre des finances Karin Keller-Sutter.
Soutien UDC à l’initiative
La Chambre a au final largement soutenu le contre-projet, tout en reportant sa recommandation de vote sur l’initiative elle-même. Au moment des débats, cette dernière n’a pas reçu beaucoup de soutien, hormis des rangs de l’UDC.
La gauche a dénoncé un texte superflu et de «pure propagande». La disparition planifiée du cash est une théorie du complot, a critiqué Jacqueline Badran (PS/ZH). L’argent liquide, «c’est l’argent du blanchiment et des criminels, qui ne laisse pas de trace».
Au moment de la divulgation du contre-projet du Conseil fédéral, le père du texte Richard Koller indiquait qu’il entendait bien maintenir son initiative. Sur le site du MLS, on lit que «l’initiative insiste sur la nature physique de l’argent liquide (billets et pièces)». Le Conseil fédéral parle seulement de «cash», sans préciser sa forme. «Ainsi, la porte resterait ouverte à l’introduction d’une monnaie numérique d’Etat, destinée à remplacer l’argent liquide physique.»
Le dossier passe au Conseil des Etats.