Changement climatique: trois pas en avant, deux pas en arrière

Georgina Parker, Quaero Capital

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Les opportunités d'investissement disponibles dans le domaine de la transition verte sont nombreuses et indispensables si l’on veut ramener le rythme du changement climatique sur la bonne voie.

Nous vivons une période cruciale pour le climat. Les politiques climatiques suscitent des réactions négatives malgré une prise de conscience croissante. La réglementation mondiale progresse, mais les émissions continuent d'augmenter, menaçant les objectifs climatiques. Les effets du changement climatique sont tels que les assurances refusent de couvrir certains risques. Heureusement, les innovations dans les énergies vertes offrent des raisons d'optimisme.

Mesures politiques impopulaires

Les mesures proposées par les politiques pour lutter contre le changement climatique rencontrent souvent des levées de boucliers: elles sont considérées comme des punitions pour certaines industries telles que l'agriculture ou pour les consommateurs, à un moment où ces derniers sont déjà confrontés à une crise du coût de la vie en raison des niveaux élevés d'inflation.

Paradoxalement, selon une enquête d'Euronews, plus de la moitié des électeurs de l'UE estiment que la lutte contre le changement climatique devrait être une priorité. Aux Etats-Unis, cette question est de plus en plus politisée. Selon les sondages, seuls 23% des républicains considèrent le changement climatique comme une menace majeure, une proportion presque identique à celle d'il y a dix ans. 

Une réglementation qui aide

La réglementation va de l'avant à l'échelle mondiale pour assurer une plus grande communication des entreprises sur les risques et les impacts climatiques qu’elles génèrent. Des règlements spécifiques entrent en vigueur: l'UE impose les chaînes d'approvisionnement sans déforestation; les États-Unis proposent des normes d'émission strictes pour les centrales au charbon et au gaz naturel. Au niveau mondial, la réglementation est de plus en plus favorable à la transition. Il est possible que les objectifs à court terme soient repoussés, comme l’interdiction des voitures à moteur thermique ou l'installation de pompes à chaleur, mais dans la plupart des pays, nous nous attendons à ce que les engagements à long terme soient maintenus.

Des objectifs de plus en plus improbables

En 2023, la croissance des émissions mondiales était de 1,1%. Même la Chine, où la progression des énergies propres est très rapide, aura du mal à respecter ses engagements climatiques dans le cadre de l'Accord de Paris. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a publié un outil de suivi qui montre les nombreux objectifs que nous sommes en passe de manquer au niveau mondial.

 


Source: Our World in Data, International Energy Agency (IEA)

 


Des effets dévastateurs

Entre-temps, les effets du changement climatique sont de plus en plus présents et dévastateurs. L'année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée au niveau mondial, avec 1,4°C de plus que les niveaux préindustriels (pour rappel, l'Accord de Paris entend limiter le réchauffement à 1,5°C). Cette hausse des températures entraîne une «augmentation stupéfiante» des phénomènes météorologiques extrêmes, comme l'indiquent les Nations unies. La nature imprévisible des conditions météorologiques est devenue un risque que certaines compagnies d'assurance considèrent déjà comme inassurable.


Source: Copernicus/ ECMWF

 


Mêmes les investisseurs les plus réticents changent d’avis

Alors qu’il y a 8 ans, Warren Buffett insinuait que le climat n'était pas un risque pour ses investissements, il a indiqué dans sa dernière lettre annuelle aux actionnaires, que le changement climatique aggravait les inquiétudes des investisseurs à l'égard des compagnies d'électricité, à mesure que les coûts des litiges liés aux incendies de forêt s'accumulaient. Et pour cause: aujourd’hui, la facture des litiges de PacifiCorp, la compagnie d'électricité américaine de Buffett, est estimée à plus de 8 milliards de dollars.

Les raisons d'être optimistes

On estime que 1,75 milliard de dollars ont été investis dans les énergies vertes et les technologies d'efficacité énergétique, soit une hausse de 8% par rapport à 2022. Compte tenu des incertitudes politiques et réglementaires, ce chiffre est impressionnant. La capacité en énergies renouvelables a augmenté de 50% en 2023, le taux de croissance le plus important depuis 20 ans, ce qui a conduit l'Agence internationale de l'énergie (AIE) à augmenter de 33% ses prévisions pour la capacité en énergies renouvelables en 2027.

Près d'une voiture sur cinq vendue en 2023 était électrique, soit une augmentation de 30% par rapport à l'année précédente; il y a aujourd'hui 40 millions de véhicules électriques sur les routes.

Le rythme de l'innovation dans ces domaines est vraiment extraordinaire. La prime pour de nombreuses technologies vertes continue de diminuer - des véhicules électriques aux batteries - ce qui stimulera l'augmentation de la demande.

Le capital humain s'oriente vers les activités vertes - 76% des Européens âgés de 20 à 29 ans déclarent que l'impact sur le climat des employeurs potentiels est un facteur important lors de la recherche d'un emploi. Les énergies renouvelables emploient aujourd'hui 36 millions de personnes dans le monde, soit 4 millions de plus que l'industrie pétrolière et gazière.

On semble faire trois pas en avant, deux pas en arrière

En tant qu'investisseurs, cette situation nous incite à renforcer notre engagement auprès des entreprises pour qu'elles s'attaquent au risque climatique et qu'elles s'efforcent de réduire leurs émissions. Il nous semble de plus en plus important de prendre en compte la transition et le risque climatique quand nous envisageons un investissement. Les opportunités d'investissement disponibles dans le domaine de la transition verte sont nombreuses et indispensables si l’on veut ramener le rythme du changement climatique sur la bonne voie afin de réaliser l'Accord de Paris.

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