Cela fait 20 ans que l’on entend que l’infrastructure électrique aux Etats-Unis est obsolète (son âge moyen est de 40 ans) et nous attendons toujours la vague d’investissement massive. L’Europe n’est pas en reste avec une infrastructure vieillissante (40 ans également en moyenne selon un rapport de l’Union européenne). Dans ce contexte, nous estimons que les infrastructures offrent une opportunité d’investissement.
Le réseau électrique
Ces 2 dernières décennies, le développement des énergies renouvelables a été au cœur de la transition énergétique. Au top des agendas politiques et soutenus pour les réglementations, les capacités de production d’énergies renouvelables ont connu un formidable développement et représentent aujourd’hui près de 40% du mix énergétique européen. Pour atteindre les objectifs du plan Fit for 55 (soit une réduction d’ici 2030 de 55% du volume de CO2 émis en 1990), nous devrons ajouter 70 GW de renouvelables et plus de 300 GW de connections au réseau!
Le problème est que les réseaux de transmission et de distribution électrique n’ont pas été conçu pour supporter une telle quantité d’énergie renouvelable, laquelle présente la caractéristique d’être intermittente. L’accélération massive de l’électrification de nos économies va accentuer encore bien davantage la charge sur le réseau. Les capacités d’énergies renouvelables vont passer de 400 GW à plus de 1000 GW d’ici 2030, dont 300 GW d’éolien offshore. Il va falloir investir dans les réseaux de transmission et de distribution pour:
- Répondre au développement des énergies renouvelables
- Répondre au besoin de l’électrification de la mobilité et du chauffage
- Développer l’interconnection entre les Etats membres.
Nous savons aujourd’hui que la décarbonisation de certaines industries ne passera pas par l’électrification, trop coûteuse.
Selon les estimations de la Commission européenne, cela implique un effort d’investissement de près de 600 milliards d'euros sur la décennie, à la fois dans la transmission et la distribution.
Le réseau gazier
Alors que la COP28 s’est conclue sur un accord de sortie progressive des énergies fossiles d’ici 2050, la demande de gaz naturel a été stable au cours des 5 dernières années et devrait rester élevée pendant au moins une décennie. Par ailleurs, nous savons aujourd’hui que la décarbonisation de certaines industries ne passera pas par l’électrification, trop coûteuse (il s’agit en particulier des industries à haute intensité énergétique comme l’acier, le ciment…). Pour ces industries, la solution va passer par la capture et stockage de C02 et déploiement d’hydrogène vert. Là encore, le réseau de distribution gazier n’a pas été conçu pour intégrer une telle quantité d’hydrogène vert. Il va donc falloir le moderniser et créer des interconnections entre les pays. Un plan d’investissement estimé par l’UE à plus de 300 milliards d'euros.
Modèle économique des opérateurs de réseaux
Leur rémunération est réglementée et déterminée dans la plupart des cas par rapport à leur coût du capital pour une période donnée. Elle est aussi fonction de la taille des actifs, ce qu’on appelle la «Regulated Asset Basis» (RAB). Par manque d’investissement, la taille des actifs (et donc la base utilisée pour la rémunération) n’a pas progressé ces 10 dernières années mais pour les raisons mentionnées plus haut, nous pensons que cela va changer. Ce modèle économique offre une très forte visibilité des revenus et flux de trésorerie sur une période fixée.
Opportunité boursière?
Historiquement, la performance boursière des opérateurs de réseaux en bourse est inversement corrélée au niveau des taux d’intérêt. Cette corrélation est liée à la fois à l’intensité capitalistique et à au mode de rémunération. Comme mentionné plus haut, leur rémunération est la plupart du temps fixée pour une période donnée et définie comme écart par rapport au coût du capital. En période de hausse des taux, ce rendement peut temporairement être réduit. Le secteur a donc été pénalisé au cours de l’année 2023 et pourrait bénéficier d’un futur cycle de baisses des taux.
Acteurs à suivre
SNAM, premier opérateur du réseau de gaz italien, détenu à 31% par le CDP (Etat). L’Italie s’est positionnée d’ores et déjà comme un point d’entrée du gaz en Europe avec ses routes en provenance d’Algérie, Lybie et Azerbaïdjan. SNAM devrait bénéficier des investissements nécessaires pour moderniser ses routes, augmenter ses capacités pour absorber l’énorme quantité de GNL à partir de 2025 (visant à compenser le manque en provenance d’Ukraine) et à plus long terme distribuer l’hydrogène vert. Sur ce dernier point, 70% de son réseau a déjà été «adapté». Nous attendons une croissance de sa RAB de 8-10% sur la décennie.
Dans l’électricité, ELIA, opérateur de réseau belge et allemand détenu à 45% par l’Etat belge, est un acteur pur des réseaux électriques avec 100% de ses revenus régulés et une base installée qui devrait doubler sur les prochaines années. Compte tenu du capex nécessaire, nous envisageons une augmentation de capital à moyen terme.