Pour Erik Koep, CEO de Worn Again Technologies, il y a partout dans le monde des consommateurs qui veulent utiliser des produits fabriqués à partir de ressources durables.
Les thèmes du recyclage et de l’économie circulaire figurent régulièrement en haut de l’agenda en ce qui concerne les questions liées à la durabilité. Une journée mondiale du recyclage se tient chaque année à la mi-mars. Début mai, même le Conseil national s’est aussi penché sur l’économie circulaire et le recyclage dans le cadre d’une session spéciale. D’un point de vue pratique, comment recycle-t-on toutefois les matériaux textiles déjà utilisés? C’est l’une des missions que s’est donnée la société britannique Worn Again Technologies, qui dispose désormais également d’un site de production en Suisse, opérationnel depuis l’automne 2022.
En tant que société spécialisée dans les technologies de recyclage de matériaux textiles, notre objectif est de permettre le recyclage d’autant de matériel textile que possible. On estime qu’environ 70 millions de tonnes de fibre de polyester sont produites chaque année à travers le monde. L’ambition de Worn Again Technologies est d’installer des sites de recyclage répartis dans différents endroits du monde, chaque usine recyclant entre 40’000 et 70'000 tonnes de textile par année, principalement du polyester.
Ces deux aspects doivent être combinés. Nous devons nous occuper à la fois des aspects liés à la chaîne de valeur du textile – pas seulement tenir compte de la production. Notre approche ne consiste pas seulement à recycler la matière première mais aussi à la réutiliser. C’est pourquoi une approche décentralisée répartie à travers l’ensemble du globe est nécessaire. Cela n’aurait aucun sens de rassembler des textiles usagés en Europe pour ensuite les renvoyer au Bangladesh, par exemple.
Cette usine de démonstration, ou «demo plant» comme nous l’appelons, doit permettre de tester et de mettre en œuvre les technologies de recyclage les plus à la pointe du moment dans le domaine du textile. En termes de volumes, elle doit permettre de traiter jusqu’à 1000 tonnes de textiles par année. Sur le plan technologique, le site de Winterthour fonctionnera avec une approche de type «dual input, dual output», qui constitue un de nos éléments de différenciation clé. Une grande partie des vêtements actuellement produits sont constitués d’environ de 65% de polyester et de 35% de coton. Notre technologie se focalise pour l’instant sur le mélange de fibres. Nous nous considérons comme des innovateurs du recyclage.
En ce qui concerne la Suisse, un atout important est aussi sa position centrale en Europe qui nous permettra de travailler avec des partenaires situés dans différents pays. De plus, la Suisse a historiquement une expertise dans la production de textile, ce qui en fait un endroit l’idéal pour lancer une nouvelle technologie en partenariat avec les acteurs de l’industrie de textile.
Aujourd’hui, il y a partout dans le monde des consommatrices et des consommateurs qui veulent utiliser des produits qui ont été fabriqués à partir de ressources durables. Nous vendons des habits qui sont recherchés par les consommateurs. Maintenant, en matière d’économie circulaire – comme c’est souvent le cas chaque fois qu’une tendance apparaît -, on peut effectivement observer que l’adoption de produits provenant de l’économie circulaire a démarré plus fortement dans certains endroits du monde et auprès d’une clientèle qui dispose d’un pouvoir d’achat un peu plus élevé que la moyenne. Ensuite, au fur et à mesure que l’efficience des procédés technologiques s’améliorent et que des économies d’échelle sont obtenues, les produits fabriqués à partir de matériaux recyclés seront proposés à des prix toujours plus compétitifs. A terme, la circularité dans le textile sera probablement adoptée par la plupart des gens à travers le monde.
Les chaînes d'approvisionnement circulaires représentent un nouveau modèle pour l'industrie textile. Nous sommes parfaitement conscients que nous ne pouvons pas engendrer ce changement par nous-mêmes. Par conséquent, nous considérons nos collaborateurs, tant au sein de l'écosystème textile suisse qu'à l'étranger, comme des partenaires plutôt que comme des fournisseurs ou des clients. En tant que tel, nous cherchons constamment des moyens de nous soutenir mutuellement. Cela peut prendre de nombreuses formes, mais fournir une alternative économique à l'incinération ou à la décharge est un premier pas important dans la bonne direction. La réduction des déchets textiles est un défi mondial. Pour réussir de manière significative, les nouvelles chaînes d'approvisionnement doivent fonctionner pour tout le monde.