CoCo: l’hybride à fort rendement

Nicolette de Joncaire

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Ces émissions offrent des rendements supérieurs au High Yield et au Dividend Yield avec de meilleurs fondamentaux, selon Paul Gurzal de La Française AM.

La question est toute simple. Où trouver du rendement sur les instruments de taux sans courir un risque démesuré? La réponse de Paul Gurzal, responsable du Crédit à La Française AM, est la suivante: sur la dette subordonnée bancaire et plus particulièrement les obligations convertibles contingentes ou CoCos.

Un oiseau rare au rendement supérieur à 4%

Près de la moitié de la dette mondiale (48%) offre aujourd’hui un rendement négatif. Et seul 3% de cet univers peut prétendre à un rendement supérieur à 4%. En tête des meilleurs instruments, on trouvera le High Yield européen, le High Yield US, la dette souveraine émergente et, au sommet, les CoCos, ces derniers offrant des rendements en dollar de l’ordre de 5% (4% en euros). Un examen historique révèle que, sur 6 ans, la performance de l’indice des dettes subordonnées iBoxx € est en progression régulière. Malgré d’importants drawdowns en mars, la dette subordonnée bancaire a retrouvé son niveau de février dernier, soit une hausse de 46% par rapport à fin 2014. A noter, sur la même période, la dette subordonnée des assurances n’a cru que de 34%. 

Pour ce qui est de l’avenir, les rendements obligataires
resteront particulièrement bas, surtout en zone euro.

Cette année, aux Etats-Unis, les CoCos affichent une performance confortablement supérieure à celle du High Yield, avec des taux de défaut bien meilleurs. Sur les 12 derniers mois, le taux de défaut des CoCos est nul. De l’autre côté, même s’il reste inférieur à celui attendu, aux Etats-Unis, le taux de défaut du High Yield est de 6,6% et en Europe de 1,7%. Quant au Dividend Yield des actions bancaires, il tendra cette année vers zéro en raison de l’interdiction faite aux banques par la BCE de distribuer des dividendes. 

Pour ce qui est de l’avenir, Paul Gurzal estime que les rendements obligataires resteront particulièrement bas, surtout en zone euro. En effet, s’il a un effet positif sur l’économie car il assure un coût de financement bas aux entreprises, le programme d’achat d’obligations corporate de la BCE (soit environ 10 milliards d’euros mensuels) est néfaste pour les rendements obligataires. 

Trois types de risque sont associés aux CoCos

Le premier est le risque d’absorption des pertes qui peut se matérialiser sous forme de conversion en actions ou de dépréciation du nominal. Le second risque possible est celui de non-paiement de coupon. 

Selon Paul Gurzal, ces deux premiers types de risque sont à l’heure actuelle extrêmement faibles. 

En raison des réglementations introduites à la suite de la crise de 2008, les banques sont bien capitalisées et donc les bilans bancaires sont très solides. La consolidation voulue (et en cours) du secteur renforcera encore cette robustesse. 

En matière de dette subordonnée bancaire,
le régulateur se comporte comme un actionnaire.

A cause de la crise du COVID-19, les règles de «bail-in» ont été suspendues depuis mars 2020 et les exigences de fonds propres ont également été assouplies. D’après les analystes actions de la Société Générale, ces mesures devraient libérer environ 440 milliards d’euros de fonds propres. Par ailleurs, l’accès des banques aux opérations de liquidité de la BCE a été facilité et est moins onéreux. Les banques bénéficient aussi de davantage de flexibilité en matière de règles comptables de reconnaissance des provisions pour créances douteuses. 

En bref, les banques sont entièrement soutenues par le régulateur dans la mesure où elles sont l’un des principaux instruments des politiques fiscales et monétaires. On peut presque affirmer qu’en matière de dette subordonnée bancaire, le régulateur se comporte comme un actionnaire (sans l’être) et pourrait décider si une banque n’est pas rentable de la soutenir jusqu’à ce que le niveau de rentabilité soit satisfaisant.

En outre, la préférence du régulateur pour la dette subordonnée est marquée par une autre indication. Alors qu’il interdit le paiement des dividendes, il autorise celui des coupons de dette subordonnée même en cas de non-respect des exigences en fonds propres. Ce changement déjà applicable aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne est attendu en Europe. 

Le CoCo se place à mi-chemin entre la dette et le capital.

Le troisième risque encouru par l’investisseur est celui d’extension de la rétention. Il est important ici de noter que le CoCo se place à mi-chemin entre la dette et le capital. Si l’engagement actionnarial est par essence à durée perpétuelle, l’obligation fortement subordonnée n’a pas de date de rédemption à proprement parler mais seulement des fenêtres de remboursement. C’est donc l’émetteur qui prend la décision de rembourser dans une fenêtre… ou pas. Là encore, Paul Gurzal perçoit un risque limité à gérer au cas par cas. 

A noter à ce propos, la duration d’un portefeuille de CoCos est calculée sur la première date de call (ou première fenêtre de remboursement). Si l’emprunteur n’appelle pas, il prévient les prêteurs et le coupon est augmenté. Dans la pratique, la duration moyenne des AT1 est plutôt faible (en moyenne 3 ans) en comparaison des autres emprunts dont les maturités tendent en ce moment à croitre. 

Remarquons en conclusion que la dette subordonnée matche très bien le profil des fonds de pension (rendement élevé sur le long terme) mais qu’ils sont bien souvent dans l’impossibilité légale de l'acheter. Ce qui laisse la place aux autres investisseurs. 

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