Une offre qui exige la sélectivité?

George Curtis, TwentyFour Asset Management

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De nombreuses obligations ont rebondi suite à l’assouplissement des restrictions et à l’afflux de liquidité.

© Keystone

Les rebonds spectaculaires ont comprimé le taux de défaut comme rarement à ce stade du cycle. Le taux glissant à 12 mois des obligations européennes à haut rendement, actuellement à 2,9%, devrait ainsi tomber à 1% d’ici la fin de l'année à mesure que l’influence des restructurations de l’année dernière liées au COVID se dissipera sur les chiffres à 12 mois.  

Dans ce contexte très favorable, l’offre s’est envolée à des niveaux record sur la plupart de nos marchés obligataires. Dans le haut rendement européen, le volume global des émissions brutes a ainsi atteint 93 milliards d'euros au premier semestre 2021. En comparaison, les émissions de l’année 2020 ont totalisé EUR 103 mia et dépassé le précédent record d’EUR 101 mia en 2017. Sur une base nette, les chiffres sont encore plus impressionnants puisque l’offre de cette année talonne déjà les 58 milliards d'euros enregistrés pour l’ensemble de l’année 2020 avec un écart d’EUR 1,4 mia seulement.   

Le refinancement est le premier moteur

Et le marché n’est pas près de ralentir car un flux régulier d’émissions à haut rendement est attendu pour le mois de juillet, une période d’ordinaire tranquille avec un marché en pause estivale.

Une série d’offres potentiellement plus risquées est en route.

Ces émissions viendront d’une part de l’activité F&A, qui a fortement repris cette année, et d’autre part des leveraged buyouts (les négociations autour de la chaîne de supermarchés Morrisons étant le dernier exemple en date). Le refinancement restera néanmoins le premier moteur des émissions étant donné que les entreprises veulent s’assurer des spreads attrayants avant que les banques centrales n’envisagent un tapering avec un relèvement des taux d’intérêt plus tard dans le cycle.    

Attention toutefois à la tendance des investisseurs qui ont tiré sur leurs lignes revolving avec un report subséquent sur le marché obligataire. Environ 200 émetteurs du segment high yield européen ont utilisé le maximum de leurs lignes de liquidité aux 1er et 2e trimestres 2020, un montant qui a totalisé 55 milliards d'euros (source: Debtwire). Alors que plus de 60 de ces émetteurs ont intégralement remboursé les prêts et 40 partiellement, 97 entreprises n’ont procédé à aucun remboursement.  

Les banques cherchent à réduire les risques

Beaucoup de ces titres pourraient être «exposés au COVID». Si la grande majorité des remboursements provient jusqu’ici des flux de trésorerie opérationnels (74% des remboursements au 1T21), le reste des lignes de liquidité entièrement utilisées devrait peser plus lourd qu’auparavant face aux refinancements sur le marché obligataire, dans la mesure où les banques cherchent à réduire les risques de leur exposition à ces titres et que les entreprises avec un levier d’exploitation élevé mettront plus de temps à générer les cash-flows nécessaires après la réouverture complète des économies. Une série d’offres potentiellement plus risquées est donc en route.

Un taux de défaut de 1% et des fondamentaux de crédit quasi parfaits offrent des conditions très favorables, mais il est peu probable que cela dure. Par conséquent, le marché obligataire devrait à notre avis voir les taux de défaut remonter à l’approche de 2022 et au-delà compte tenu de ce levier dû au COVID.

Il reste donc essentiel de faire le travail nécessaire pour comprendre la différence entre les entreprises simplement exposées aux restrictions COVID et celles qui ont subi des dégâts structurels à cause de ces restrictions, en particulier compte tenu du niveau élevé d’endettement brut que cela entraîne dans certains cas.

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