Sous pression

Victor Cianni, Alpian

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Marchés en chute, investisseurs sous tension, économie en mutation: céder à la panique ou voir plus loin? La pression façonne autant qu’elle secoue – à nous d’en faire une force.


Que se passe-t-il lorsque deux stars se rencontrent dans les Alpes suisses? Je ne parle pas d’un énième spot publicitaire avec Roger Federer et Robert De Niro, mais d’une rencontre bien plus musicale: celle de Freddie Mercury et David Bowie en 1981. Le résultat? La naissance d’un classique qui trouvera sa place dans le top 500 des plus grandes chansons de tous les temps (selon Rolling Stone): «Under Pressure» (en français: sous pression). Peu le savent, mais ce tube (et bien d’autres) a été enregistré à Montreux, une raison de plus pour l’utiliser comme bande-son de cette chronique financière.

Sous pression… difficile de trouver un titre plus évocateur pour l’ambiance qui règne sur les marchés depuis un mois. Sous pression, les investisseurs qui ne savent sur quel pied danser. Sous pression, les gouvernements qui doivent se réinventer alors que les alliances bougent. Sous pression, le président américain qui doit faire ses preuves. Sous pression, les banquiers centraux qui doivent concilier pressions inflationnistes et économies faiblardes. Sous pression, les entreprises et administrations qui ont supprimé plus d’emplois le mois dernier que lors de n’importe quel mois de février depuis 2009. 

Depuis mi-février, la plupart des marchés actions sont dans le rouge, avec sur la première marche du podium le S&P 500 qui enregistre à l’heure où j’écris ces lignes, une baisse de plus de 10% depuis ses plus hauts. Le dollar est en baisse, les cryptos plongent et les valeurs refuges bondissent. Entre pression et panique, il n’y a qu’un pas que les investisseurs particuliers sont souvent les premiers à franchir (et soyons honnêtes, les professionnels de l’investissement en second).

Avant d’y succomber, prenons une grande respiration. Je vois, pour ma part dans ces soubresauts, le signe de changements profonds qui se dessinent et pas forcément pour le pire.

Un monde en pleine recomposition

Commençons, par l’actualité outre-Atlantique. Une baisse de 10% du marché au vu du programme ambitieux du président américain, c’est presque anodin. Parapher 89 décrets, remodeler l’état fédéral, réduire l’immigration, imposer des tarifs sur plus d’1.4 billions de dollars de biens, créer un fonds souverain et une réserve stratégique, déréguler les marchés, déclarer l’urgence énergétique et vendre des Teslas… Pas étonnant que les investisseurs peinent à suivre. Pour le moment, Donald Trump se trouve du mauvais côté des probabilités. Depuis 1925, seul un président, Roosevelt, a vu le S&P 500 baisser de plus de 10% lors de ses premiers 100 jours à la tête du gouvernement. Mais du côté de l’économie, il est trop tôt pour juger des effets et il n’y a probablement pas que du mauvais dans l’instauration d’un socle économique différent.

À l’échelle mondiale, les manœuvres du président américain ont également des effets inattendus. La pression politique et économique pousse à se réinventer et à sortir de certaines impasses. L’Europe se réveille, le Canada réagit, la Chine innove et avec ces ajustements viennent aussi de nouvelles opportunités.

Des tensions… mais aussi des perspectives

Le stress sur les marchés actions pourrait aussi avoir des conséquences intéressantes sur les marchés obligataires et la liquidité. Si l’inflation ne repart pas à la hausse, cela pourrait inciter la Banque Centrale américaine à assouplir sa politique de taux. Une bouffée d’oxygène pour les portefeuilles les plus conservateurs. En attendant, on peut compter sur l’or, qui en toute discrétion, a brièvement franchi la barre des 3000 $ l’once. C’est le luxe d’avoir un historique de valeur refuge qui s’étend sur plusieurs millénaires.

Un avantage que les cryptomonnaies n’ont pas encore, et leur sort en laisse plus d’un perplexe en ce moment. Peu de personnes auraient pensé, il y a un an, qu’un sommet autour des actifs digitaux se tiendrait un jour à la Maison Blanche. Pourtant, en termes de performance, c’est la chute libre. Si une telle percée ne parvient pas à réjouir les investisseurs, qu’est-ce qui le peut? Ne soyons pas pessimistes pour autant. N’oublions pas que les marchés sont des machines à anticiper, et beaucoup de ces nouvelles étaient déjà intégrées dans les cours.

Ne pas céder à la pression

Les marchés n’aiment pas l’incertitude, mais c’est souvent dans ces moments que surgissent les meilleures opportunités. Céder à la pression, c’est risquer de vendre à perte, de manquer un rebond et de saboter une stratégie long-terme qui aurait pu payer.

Alors, face à la volatilité, gardons le cap et la tête froide. Après tout, la pression n’est pas toujours un fardeau, elle peut aussi être un moteur. Comme le chantent Freddie Mercury et David Bowie: «This is our last dance, this is ourselves… under pressure.» La pression est là, mais c’est souvent dans ces instants que se dessinent les vrais tournants, y compris pour nos portefeuilles.

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