Relance économique XXL: USA 2021 après Chine 2009

Wilfrid Galand, Montpensier Finance

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Le plan américain devra préserver la fluidité des échanges internationaux, limiter les pressions inflationnistes et conserver la place centrale du dollar.

Le plan de relance 2021 voulu par Joe Biden pourrait avoir sur la croissance mondiale le même effet que le plan de relance chinois 2008 – 2009. A condition de préserver la fluidité des échanges internationaux, de limiter les pressions inflationnistes et de conserver la place centrale du dollar. 

Le 9 novembre 2008, à peine deux mois après la faillite de Lehman Brothers, la Chine du président Hu Jintao et de son premier ministre Wen Jiabao décidait la mise en oeuvre d’un plan de relance massif, capable de remettre l’économie chinoise sur les rails de la croissance. 

Cet effort très important se révélait quelques mois plus tard n’être que la première étape de la relance budgétaire phénoménale de la Chine. Le 5 mars 2009, le plan était porté à 1100 milliards de dollars, soit près du quart du PIB chinois. 

En deux ans, ce sont 4000 milliards de Yuan soit 586 milliards de dollars de l’époque ou 13% du PIB chinois qui seront déversés dans l’économie de l’Empire du Milieu, principalement dans les infrastructures – routes, chemins de fer, aéroports et l’immobilier. 

Résultat : la croissance de la Chine allait s’envoler à plus de 9% en 2009 et 10% en 2010. Facilité par une expansion monétaire affirmée, l’endettement suivait: à moins de 150% du PIB en 2007, il dépassait 180% en 2009 et continua ensuite sur sa lancée. 

Le monde profita à plein de l’effet d’entrainement de ces plans gigantesques pour sortir de la crise : machines excavatrices, contrats d’ingénierie puis voitures, produits électroniques et de luxe, la Chine, usine du monde, devenait un acheteur majeur. La croissance mondiale rebondit dès le quatrième trimestre 2009 et retrouva en 2010, à +4,3%, le rythme de 2007. 

Mars 2021, l’histoire se répète, cette fois aux USA. Après les 900 milliards de dollars du plan Trump passé en octobre 2020, ce sont désormais 1’900 milliards qui sont promis par la nouvelle administration Biden. Et un déficit budgétaire américain qui, toutes mesures confondues, pourrait atteindre ou dépasser les 30% du PIB cette année!

Cette relance massive, appuyée par le tandem Yellen-Powell au Trésor et à la Fed, va accélérer la croissance américaine – la Fed d’Atlanta attend désormais plus de 10% de croissance aux Etats-Unis pour le premier trimestre 2021! – mais aussi la croissance mondiale, l’Amérique restant plus que jamais le «consommateur en dernier ressort» de l’économie de la planète. 

Pour que Biden gagne son pari, il lui faut néanmoins réunir trois éléments. Tout d’abord, conserver des conditions de financement favorables. Il peut, bien sûr, compter sur Jérôme Powell pour cela. Mais le président de la Fed ne pourra réussir sans que l’inflation reste maitrisée, en particulier via les salaires. 

Tout comme Hu Jintao avait accéléré l’exode rural chinois pour conserver des coûts de production attractifs, l’administration Biden compte sur l’amélioration du taux de participation au marché de l’emploi pour conserver la compétitivité du tissu productif américain. A ce jour, le taux de chômage étendu (dit U-6 au sens du Bureau américain du travail, qui intègre notamment les temps partiels contraints) est de 11,1% contre 7% en février 2020. Il y a donc encore de la marge avant l’économie «à haute pression». 

Le deuxième élément de succès sera la capacité de l’économie américaine à garder des canaux d’importation fluides pour compenser les manques de la production américaine. A ce titre, la suspension des droits de douanes punitifs entre l’Europe et les Etats-Unis dans le dossier Airbus est une bonne nouvelle. Il faudra aller au-delà – y compris avec la Chine - pour ne pas ajouter des coûts d’importation délétères pour tous. 

Enfin, ce plan de relance, qui se traduira inévitablement par un endettement record – et bien supérieur à l’endettement chinois de 2010-2011 en raison de l’effet de base – devra s’assurer du soutien des investisseurs internationaux au dollar. Bien sûr, la Fed garantira sans nul doute le financement de la dette américaine, comme en 2020. Mais les effets positifs de l’effort budgétaire du pays pourraient être neutralisés en cas de défiance généralisée envers le billet vert et de baisse forte de celui-ci. 

C’est sur la crédibilité et les actions du tandem Yellen-Powell que reposent cette fois-ci les espoirs d’une croissance américaine et mondiale forte en 2021.Ils ont déjà fait leur preuve dans des périodes complexes. Mais les marchés seront particulièrement attentifs à ce que les taux d’intérêt des obligations américaines ne remontent pas outre mesure et que l’équilibre économique et boursier soit maintenu.

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