Octobre ne sera pas facile

Axel Botte, Ostrum AM

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Alors qu’aux Etats-Unis la Fed poursuit ses opérations sur le marché du repo, le contexte est favorable à la baisse des taux en zone euro.

©Keystone

La clôture trimestrielle engendre en général des réallocations de portefeuilles et des prises de profits. 

Le Bund s’établit à -0,57% après un léger élargissement du spread 2-10a à 20pb. Les spreads souverains sont inchangés, le BTP cotant autour de 140pb à 10 ans. Les valorisations élevées du high yield expliquent la remontée de 19pb des spreads la semaine passée. Le crédit subit en outre l’effet de la reprise du primaire en septembre. La demande de crédit a aussi ralenti de sorte que les spreads se situent au-delà de 110pb contre Bund. Aux Etats-Unis, le 10 ans s’échange autour d’1,70%. La correction rapide du pétrole réduit les points morts.  

Aux USA, la faiblesse de la construction contraste
avec le dynamisme de la recherche-développement.

Sur les actions, l’Europe est stable. Les marchés chinois s’ajustent aussi à la veille des célébrations du 70e anniversaire de la République Populaire de Chine. Parallèlement, le S&P perd 1% en raison de la sous-performance des secteurs de l’énergie et de la santé. La volatilité implicite remonte quelque peu à 17% (VIX).  

Le sterling oscille au gré des développements sur le Brexit. L’incertitude fait replonger la livre vers 1,23 dollar. L’euro glisse vers 1,09 dollar. L’or revient sous 1500 dollars.  

Graphique de la semaine

 
Sur les marchés de CDS en euros, l’iTraxx XO (233pb) s’échange à des niveaux réduits.  
La composition de l’indice en termes de notation laisse craindre que les spreads actuels ne couvrent pas le défaut probable à l’horizon de 5 ans.  
Il faudrait un minimum de 242pb pour rémunérer le risque de défaut avec une hypothèse de recouvrement de 30% selon nos estimations.  
L’équivalent américain (CDX HY 352pb) offre davantage de prime puisque les niveaux actuels sont 46pob au-dessus du point mort estimé à 281pb.

 

La Fed face aux tensions sur le repo 

La croissance américaine se maintient autour de son potentiel de 2%. Les comptes nationaux du deuxième trimestre 2019 dépeignent une économie déséquilibrée tirée principalement par la consommation privée. Les premières tendances du troisième trimestre 2019 indiquent un rééquilibrage via un ralentissement de la consommation privée (2,3%ta d’acquis trimestriel en août) et une stabilisation du déficit extérieur. L’investissement des entreprises est inégal. La faiblesse de la construction contraste avec le dynamisme de la recherche-développement. Le logement connait une embellie. L’inflation hors éléments volatiles (déflateur) remonte à 1,8%a en août. 

Ainsi, l’allègement monétaire de la Fed répond davantage aux risques externes et aux tensions sur le repo qu’aux évolutions conjoncturelles américaines. La Fed continuera de procéder à des interventions à hauteur de 75 milliards de dollars au moins jusque mi-octobre. Il est certain que la Fed ne laissera pas le marché du repo se gripper compte tenu de l’extrême dépendance de l’économie américaine au bon fonctionnement des marchés du crédit. Une facilité de repo permanente sera probablement annoncée à l’issue du prochain FOMC afin d’encadrer les taux plus efficacement. Cela créera une demande de Treasuries supplémentaire alors que, depuis le 1er août, la Fed réinvestit les tombées de MBS en obligations du Trésor à hauteur de 20 milliards de dollars par mois. Par ailleurs, encourager les prêts interbancaires requiert sans doute de réduire drastiquement le taux d’intérêt sur les réserves excédentaires (1,80%).

Les swap spreads sur les maturités courtes et intermédiaires
devraient s’élargir à mesure que les tensions sur le repo s’apaisent.

Sur les marchés obligataires, ces dispositifs et une nouvelle baisse des taux en décembre (au plus tard) maintiendront un plafond sur les rendements obligataires américains. Le T-note pourrait revenir vers 1,50% en fin d’année mais nous privilégions la neutralité compte tenu des données économiques solides. Les swap spreads sur les maturités courtes et intermédiaires devraient s’élargir à mesure que les tensions sur le repo s’apaisent. Les points morts d’inflation restent en revanche très faibles au regard de l’inflation réalisée (133pb à 2 ans avec une inflation sous-jacente à 2,4%a en août). La demande de TIPS n’est pas en cause si l’on en juge par les flux entrants sur les fonds spécialisés. La volatilité du pétrole joue sans doute en défaveur de la classe d’actifs, qui constituent néanmoins une stratégie de couverture peu chère. Concernant la dette émergente en dollars, la faiblesse des devises liée aux baisses de taux engendrent des prises de profits sur certains marchés (Brésil par exemple). Les spreads restent néanmoins attrayants sous 350pb. 

Croissance atone, le crédit s’écarte 

En zone euro, les enquêtes confirment la contraction de l’activité manufacturière, notamment en Allemagne. Mario Draghi répète à l’envi que la faiblesse de la croissance requiert une politique budgétaire plus accommodante alors que les effets néfastes de la politique de taux sont de plus en plus visibles. Les marges de manœuvre budgétaires sont concentrées au nord de l’Europe, là où l’opposition au QE est la plus forte. L’Allemagne s’est engagée à investir à hauteur de 54 milliards d’euros sur 4 ans, soit environ 0,4pp de PIB annuellement. Les Pays-Bas annoncent 0,7pp de stimulus en 2020. Cela étant, le chômage est faible dans la plupart des économies de la zone et l’effet multiplicateur de la dépense publique est incertain. L’Italie et la France négocieront un effort de consolidation budgétaire moindre avec la Commission européenne. Bref, la croissance se maintient aux alentours du potentiel et la politique économique, loin de changer la donne, a des effets incertains.

La pentification de la courbe suggère
que la remontée du taux du Schatz atteint ses limites.

Le Bund s’échange juste au-dessus de -0,60%. L’environnement reste globalement baissier sur les taux. La pentification de la courbe suggère que la remontée du taux du Schatz atteint ses limites. Les spreads souverains bougent peu avant la clôture trimestrielle et les échéances politiques du mois prochain (examen des budgets par Bruxelles, Brexit). L’Espagne (73pb contre Bund) conserve le bénéfice du rehaussement récent de sa note par S&P malgré l’absence de gouvernement et des révisions à la baisse des chiffres de croissance au premier semestre. A terme, le fort consensus acheteur de dettes périphériques constitue un risque baissier lorsque le QE redémarrera au 1er novembre.

Sur les marchés du crédit, les émissions de septembre ont pesé sur les spreads, qui remontent au-delà de 110pb contre Bund. En outre, les flux finaux entrants sur les fonds de crédit ont ralenti après l’afflux de liquidités consécutif au changement de discours de la BCE en juin-juillet. Le montant de QE mensuel (20 milliards d’euros) laisse en effet peu de place au crédit. Les rendements s’échelonnent de 0,2% à 0,5% dans les secteurs non-financiers à 3% pour les financières subordonnées les plus rémunératrices. Après l’écrasement des primes souveraines, la valeur relative semble à l’avantage du crédit. Les spreads sur le high yield (367pb) ont également retracé une partie de leur rally depuis la volatilité d’août. Sur les indices synthétiques, le resserrement de la nouvelle série du Crossover apparait excessif au regard de la qualité de crédit intrinsèque de l’indice. Sous 242pb, nous considérons que le spread ne compense pas le risque de défaut à 5 ans avec une hypothèse de recouvrement de 30%. Le marché du high yield nous semble cher.

Quant aux actions, la saison des résultats s’ouvre mi-octobre aux Etats-Unis parallèlement à la reprise des réunions sino-américaines. Les bénéfices sont prévus en baisse au troisième trimestre 2019. Le marché manque de catalyseur pour marquer de nouveaux sommets. En Europe, la performance des moyennes capitalisations interpelle quant à la solidité du rally, d’autant que les révisions bénéficiaires sont à l’inverse des cours depuis 3 mois.

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