Nouvelle dynamique d’investissement grâce aux plans de relance

Vincent Jarcsek, Exane Derivatives

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Les mesures de soutien annoncées par la France et l’Allemagne ne garantissent toutefois pas à elles seules une poursuite de la hausse des marchés.

Des chiffres à donner le tournis. Les montants cumulés des différents plans de relance qui ont été annoncés tour à tour par les Etats-Unis, l’Allemagne et la France n’ont cessé d’augmenter ces derniers mois. Après le plan de soutien à hauteur de 130 milliards d’euros dévoilé début juin par l’Allemagne, décliné en 57 points qui se rapportent à des domaines très divers, allant de la réduction de la TVA aux mesures d’aide à la culture, cela a été au tour de la France de frapper un grand coup au moment de la rentrée. Pas moins de 100 milliards d’euros ont ainsi été promis le 3 septembre par le gouvernement français dans le cadre du projet baptisé «France Relance» qui s’articule autour de trois volets principaux, à savoir l’écologie, la compétitivité de l’économie et un paquet de mesures visant à favoriser la cohésion entre générations et sur le plan territorial. Aux Etats-Unis, les plans de relance totalisent déjà plus de 2’000 milliards de dollars si l’on cumule à la fois les prêts accordés aux industries les plus affectées par la crise et aux petites entreprises, les aides directes accordées aux ménages et aux chômeurs ainsi que divers fonds mis à disposition des collectivités.

Trois manières d’appréhender les plans de relance

Comment appréhender ces plans de relance? Une première approche consiste à analyser les différents types de dépenses qui entrent dans le calcul de ces montants spectaculaires. Schématiquement, on peut identifier trois régimes distincts.

En France, d’importants moyens seront consacrés
à l’efficience énergétique des bâtiments.

Premièrement, il y a les montants accordés sous la forme de «monnaie hélicoptère», soit une mesure de politique monétaire qui consiste à distribuer, sans contrepartie, directement de l’argent aux ménages. Cette approche a été, jusqu’ici, expérimentée avant tout aux Etats-Unis, où le gouvernement a envoyé ce printemps des chèques aux ménages américains pour doper la consommation. Deuxièmement, il y a les investissements publics, plus souvent adoptés dans l’Union européenne, et qui sont consacrés notamment aux infrastructures. S’y ajoutent, troisièmement, les investissements sponsorisés. Dans ce cas, l’Etat met de l’argent à disposition des individus et des entreprises sous la forme de garanties. L’Etat ne dépense pas directement d’argent lui-même mais il apporte certaines garanties aux investisseurs.

En termes d’affectation, la situation diffère selon les pays. En Allemagne, d’importants moyens ont été consacrés aux projets en lien avec l’hydrogène, soit 7 milliards d’euros dans ce seul domaine. Les Etats-Unis mettent, eux, davantage l’accent sur le renouvellement des infrastructures, notamment la construction ou la rénovation de ponts. En France, d’importants moyens seront consacrés à l’efficience énergétique des bâtiments.

Une nouvelle dynamique d’investissement

Ces plans de relance ont modifié l’attitude de nombreux Etats en matière d’investissements publics, y compris outre-Atlantique. Aux Etats-Unis, on observe désormais une dynamique d’investissement qui ne correspond pas vraiment aux réflexes habituels de l’administration américaine, plus habituée à réduire les dépenses. Cela induit une dynamique qui pourrait aller bien au-delà du plan de relance initial, et qui est susceptible d’ouvrir la voie à d’autres investissements privés par la suite.

Un impact très différent selon les secteurs

Reste à savoir quel sera l’impact de ces plans de relance à moyen et long terme sur l’économie. A plus long terme, il est aussi très difficile d’évaluer comment évolueront les dépenses des entreprises, des consommateurs et du secteur public. Aux Etats-Unis, les dépenses de santé constituent par exemple une composante clé du PIB. Augmenteront-elles suite à la crise du COVID-19? Même incertitude dans le tourisme et des loisirs. En 2020, beaucoup de gens se sont habitués à voyager à proximité de chez eux. Vont-ils à nouveau réserver des vols pour des destinations lointaines dès l’an prochain? Il encore trop tôt pour savoir comment se répartiront les dépenses de consommation de demain.

Les projets de modernisation des infrastructures
devraient profiter aux groupes de construction.

En revanche, il est déjà possible d’identifier quelques domaines susceptibles de tirer parti des plans de relance. On peut songer aux acteurs spécialisés dans les énergies propres en Europe, à l’exemple de Vestas dans l’éolien. Les projets de modernisation des infrastructures devraient, eux, profiter aux groupes de construction qui sauront apporter des solutions conformes aux exigences environnementales. Un groupe comme LafargeHolcim pourra tirer parti des plans de relance s’il est à même de produire du ciment de manière moins polluante. Dans le domaine de la santé, les sociétés de techniques médicales, notamment celles actives dans le diagnostic, profiteront aussi du fait que les établissements hospitaliers souhaiteront disposer d’outils permettant de dépister le plus tôt possible des maladies.

Vue plus prudente sur les marchés pour septembre et octobre

Sur le plan macroéconomique, l’absence de risques inflationnistes à court et moyen terme créée toujours un cadre favorable pour les marchés. Des deux côtés de l’Atlantique, ni la Fed, ni la BCE n’envisagent des hausses de taux. S’agissant du marché des actions, Exane a néanmoins adopté une vue un peu plus prudente pour les mois de septembre et d’octobre. Durant l’été, les marchés d’actions ont en effet été soutenus par trois facteurs importants : à savoir une forte hausse des surprises économiques positives, la dépréciation du dollar américain ainsi que l’ancrage des taux de la dette souveraine à de très faibles niveaux. Or, ce seul ce dernier facteur devrait rester inchangé au cours des prochains mois.

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