L'inflexion de la Fed conforte le potentiel de hausse des actifs risqués

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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La semaine dernière, Fed a annoncé une modification largement attendue de son objectif d'inflation. Elle vise désormais une inflation moyenne de 2%.

La semaine dernière, la Réserve fédérale américaine (Fed) a annoncé une modification largement attendue de son objectif d'inflation. Elle vise désormais une inflation moyenne de 2% sur la durée. La fourniture de liquidités par la banque centrale est déterminante pour comprendre l'environnement de marché actuel et a de vastes répercussions sur les cours des actifs.

Dans ce nouveau cadre de politique monétaire, la Fed s'abstiendra probablement de relever ses taux directeurs jusqu'à ce que l'inflation dépasse son objectif de 2%. Par ailleurs, elle a subtilement modifié ses éléments de langage relatifs à l'emploi, ce qui signifie probablement qu'un faible taux de chômage ne justifiera pas à lui seul un relèvement des taux.

Alors que l'inflation sous-jacente est aujourd'hui nettement inférieure à l'objectif de 2% et que l'économie est loin de tourner à plein régime, il est probable que les taux restent très bas pendant longtemps. En effet, la Fed n'a pas réussi, ces dernières années, à tenir durablement son objectif de 2% malgré une décennie d'expansion économique après la crise financière de 2008.

Les prévisions de la Recherche d’UBS sont restées inchangées avec un rendement des bons du Trésor américain qui n'augmenterait que modestement à mesure que l'économie poursuivra son redressement. Le rendement des bons du Trésor à dix ans devrait atteindre 0,85% d'ici juin 2021.

En attente de clarification

La semaine dernière, la Fed n'a pas donné beaucoup de détails sur la modification attendue de son objectif d'inflation. Par conséquent, les investisseurs ont recentré leur attention sur les modalités de mise en œuvre du nouveau cadre de politique monétaire. Ils attendent des précisions à l'issue de la prochaine réunion du Federal Open Market Committee (FOMC) au mois de septembre. Ils se demandent notamment jusqu'à quel point et pendant combien de temps la Fed sera disposée à tolérer une inflation supérieure à 2%.

Les liquidités injectées par les banques centrales soutiennent le rebond des actions.

La Fed va probablement faire savoir qu’elle maintiendra un taux directeur nul aussi longtemps que nécessaire pour garantir le plein emploi et jusqu’au dépassement de son objectif d'inflation. Elle pourrait également prolonger son programme d'achat d'actifs. Et il se peut qu’elle souhaite garder des taux bas pour l'ensemble des échéances compte tenu de sa volonté d'assurer des conditions financières extrêmement souples jusqu'à ce que ses objectifs de politique monétaire soient atteints.

Au final, la Fed a accentué l'assouplissement de sa politique monétaire, ce qui a plusieurs répercussions sur les cours des actifs.

Rebond des actions

Les liquidités injectées par les banques centrales soutiennent le rebond des actions. La politique de la Fed a été un facteur déterminant du rebond enregistré par les actions américaines (+57% pour l'indice S&P 500) depuis le point bas postérieur à la crise du Covid-19.

Les taux d'intérêt étant extrêmement bas, il est rationnel pour les investisseurs de payer plus cher chaque dollar de bénéfices dégagé par une entreprise cotée, ce qui justifie les ratios de valorisation plus élevés. Dans l'optique de la poursuite du rebond des marchés, la Recherche d’UBS a une préférence pour les titres restés à la traîne jusqu'ici, dont certaines valeurs cycliques et certaines valeurs décotées.

Chasse au rendement

Alors que la Fed maintiendra des taux durablement bas, les liquidités et les obligations les plus sûres devraient, dans un futur proche, générer un rendement réel négatif. Pour préserver leur pouvoir d'achat, les investisseurs feraient bien de limiter autant que possible leurs liquidités et devront se démener dans leur quête de rendement.

Le nouveau cadre de politique monétaire de la Fed ouvre
la voie à une poursuite de la dépréciation du dollar américain.

Néanmoins, il existe plusieurs façons de trouver des sources de revenus. On pourra privilégier les obligations souveraines de marchés émergents libellées en dollar américain et les obligations asiatiques à haut rendement, ainsi que les devises asiatiques à haut taux d'intérêt.

Chute du dollar

Le nouveau cadre de politique monétaire de la Fed ouvre la voie à une poursuite de la dépréciation du dollar américain. La Fed s'est toujours refusée à instaurer des taux directeurs négatifs et, entre 2015 et 2019, elle a même relevé ses taux à la faveur d'une embellie économique. Cela a conféré au dollar un statut assez exclusif de valeur refuge, avec un taux d'intérêt relativement élevé.

Mais cette fois-ci, la Fed attendra probablement que la reprise soit déjà bien amorcée pour s'engager dans un nouveau cycle de relèvement des taux directeurs. La paire EURUSD continuera certainement d’évoluer dans une fourchette de 1,15 à 1,20. Une nette incursion au-dessus du seuil de 1,20 ne serait possible que si la croissance en Europe et dans le reste du monde devait se raffermir. Toutefois, la décision prise la semaine dernière par la Fed suggère que ce seuil pourrait être testé.

Un favori: l’or

L'or restera soutenu par les taux réels négatifs et la dépréciation du dollar. Le métal jaune est déjà l'un des actifs les plus performants en 2020, avec une progression d'environ 29%. Dans la mesure où l'or ne procure pas de rendement, un taux d'intérêt réel négatif élimine le coût d'opportunité lié à sa détention au détriment des liquidités et des obligations.

Compte tenu de la politique monétaire extrêmement accommodante, de la faiblesse du dollar américain et de l'incertitude à l'approche de la présidentielle américaine, l'or va certainement continuer à avoir le vent en poupe.

Selon la Recherche d’UBS, la décision de la Fed constitue une inflexion importante qui pourrait également obliger les autres banques centrales, comme la Banque centrale européenne, à tolérer une inflation plus forte. Cela pourrait donner un coup de pouce supplémentaire aux actifs risqués.

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