Surprise! La blockchain ne se résume pas à faire tapis sur le Dogecoin pour un profit de 500% ou à perdre toutes ses économies dans les CryptoKitties. Les applications de cette technologie sont bien plus vastes.
En effet, lorsque nous parlons de blockchain, de nombreuses personnes restent bloquées sur les cryptomonnaies, leur valeur spéculative et la façon dont on peut gagner – ou perdre – rapidement beaucoup d'argent grâce à elles. Or, ce n'est pas rendre justice à l'incroyable technologie qu'est la blockchain. En effet, les développements actuels et futurs pourraient transformer de nombreuses industries.

Une blockchain est essentiellement une immense base de données dont l'accès est complètement transparent. Il s'agit d'un grand livre numérique où chaque transaction est enregistrée et distribuée sur tout un réseau. Chaque fois qu'une transaction est effectuée, elle est ajoutée à un bloc. Ce bloc est ensuite enregistré à l'aide d'une signature cryptographique immuable. Si A donne 5 dollars à B, la transaction sera inscrite dans leurs deux registres, ainsi que dans les registres de C, D, E et de chaque utilisateur du grand livre.

Comme chaque personne a accès au même grand livre, un bloc ne peut pas être facilement modifié, car un changement nécessite le consensus de chaque utilisateur. Si un bloc indiquait 4 $ au lieu de 5 $, il serait facile de vérifier les millions d'autres blocs pour voir lequel est le faux. Si un pirate voulait corrompre le système, il se verrait obligé modifier chaque bloc de la chaîne, dans toutes les versions distribuées aux utilisateurs – un piratage si coûteux que la récompense semblerait indigne du risque. Ainsi, le système est à la fois très transparent et très sûr.

Mais à quoi cette technologie peut-elle bien servir?

Avec le bitcoin en tête de file, la blockchain a rapidement été utilisée comme méthode de transfert de devises. Grâce à cette technologie qui permet d’effectuer des transactions en quelques secondes, l'argent peut être échangé à une vitesse alarmante avec des coûts minimes. D’après ComputerWorld, en éliminant les intermédiaires bureaucratiques et en réduisant les frais de tiers, la blockchain pourrait faire économiser entre 8 et 12 milliards de dollars par an aux grande institutions financières.

Chainalysis est une entreprise qui a construit des outils pour aider les institutions financières à surveiller l'échange de crypto-monnaies. Leur logiciel peut détecter rapidement les transactions frauduleuses et violations de conformité et alerter les clients lorsqu'un problème survient.

Les «smart contracts» ou contrats intelligents sont peut-être l'une des caractéristiques les plus transformatrices de la blockchain. Ils sont comme des contrats papier, sauf que les règles sont intégrées dans des codes informatiques, et appliquées en temps réel sur la blockchain.

Prenons un exemple concret. Dans le cas d'un bail de location, imaginez qu'une somme d'argent soit conservée sur une blockchain pour payer d'éventuels dommages. Dans un contrat classique, il y a le propriétaire, le bailleur et un arbitre en cas de désaccord. Admettons qu’à la remise des lieux, des réparations soient nécessaires, mais que le locataire ne veuille pas les payer. La somme est donc disputée, d’un côté du locataire qui la veut dans sa poche, de l’autre par le propriétaire qui veut financier la réparation du frigo endommagé. Maintenant, imaginons que les deux ont une clé déverrouillant la somme, et qu'une troisième clé est donnée à l'arbitre. Si nous codons le contrat de manière qu’au moins 2 clés soient nécessaires pour qu’il soit distribué dans un sens ou dans l’autre, l'arbitre peut juger des dommages et utiliser sa clé dans le sens qui convient, de sorte que l'argent aille là où il doit aller sans encourir de frais juridiques supplémentaires ou de créances jamais réalisées. 

L'Internet des objets (ou Internet of Things, IoT) a des millions d'applications, les appareils devenant de plus en plus intelligents et connectés. Cependant, c'est aussi une opportunité pour les pirates de voler vos données, que ce soit celles de votre Alexa, de votre réfrigérateur ou de votre voiture. L'ajout de la technologie blockchain à la formule permet de s'assurer que les données sont conservées en sécurité et ne sont accessibles qu'à l'utilisateur ou à des tiers autorisés.

HYPR est une société basée à New York qui s’occupe des risques de cybersécurité sur les appareils IoT en utilisant une solution d'authentification décentralisée. En utilisant des solutions biométriques et en retirant les mots de passe d'un serveur centralisé, elle rend les appareils IoT pratiquement inviolables.

Bien que cela puisse paraître surprenant, prouver son identité et la garder pour soi peut parfois s’avérer être un vrai défi. Chaque année, des millions de personnes sont victimes d'usurpation d'identité ou de fraude. Mais le problème est encore plus large : dans le monde entier, plus d'un milliard de personnes rencontrent des difficultés quant à la reconnaissance et la préservation de leur identité. La possibilité de créer un grand livre avec une identité numérique pour chaque citoyen du monde renforcerait l'autonomie des utilisateurs et permettrait à chacun d'accéder, par exemple, à des services financiers. Conserver les noms, les numéros de sécurité sociale et les certificats de naissance sur un grand livre décentralisé pourrait offrir une existence légale à de nombreuses personnes et réduire considérablement le nombre d'abus d'identité.

Un bon exemple est l'écosystème d'identité Sovrin d'Evernym, qui stocke les informations des individus et leur permet de les partager avec qui ils veulent. Ils sont en somme un intermédiaire entre l'individu et l’entité qui recherche des informations.

Le secteur de la santé est peut-être l'un des segments où le plus d'inefficacités peuvent être éliminées. L'offre d'une base de données sécurisée avec des règles claires quant aux informations pouvant être partagées – et avec qui – pourrait accélérer considérablement les processus et réduire les coûts. Par exemple, vous pourriez vous rendre chez un nouveau médecin ou dans une clinique qui pourrait avoir accès aux données nécessaires en quelques minutes, et ils pourraient à leur tour s'assurer que toute pharmacie sait ce qu'elle est autorisée à vous donner pour soigner votre maladie.

Comme nous l'avons mentionné ci-dessus, l'un des principaux problèmes des soins de santé est la fragmentation des données entre de nombreux prestataires et hôpitaux. Patientory propose une solution sous la forme d'un système de dossier médical basé sur la blockchain. Cela permettrait de s'assurer que le dossier est toujours complet et à jour, et qu'il n'est accessible qu'aux personnes autorisées, qu'il s'agisse des patients, des médecins, des pharmaciens et autres professionnels de la santé.

La logistique pourrait bénéficier grandement de l’aide de la blockchain En effet, l'un des plus grands maux de ce secteur est le manque de communication et de transparence, que ce soit au sein d’une entreprise ou entre les différents prestataires. Il existe des centaines de milliers de sociétés d'expédition dans le monde, ce qui donne naissance à des goulots d'étranglement et des pertes d'informations récurrentes. La blockchain pourrait permettre une identification précise des articles dans la chaîne d'approvisionnement, supprimant tout besoin de transfert d'informations sur papier. Associée à l’IoT, elle pourrait suivre chaque article tout en évaluant son état et sa qualité en temps réel. Non seulement cela serait plus sûre, plus fluide et plus automatisée, mais cela permettrait par extension au secteur d'économiser des milliards de dollars. 

Certaines grandes entreprises de logistique, telle que DHL, ont déjà opté pour la blockchain. L’entreprise tient un registre numérique des expéditions et enregistre chaque transaction. DHL est à l'avant-garde de l'adoption de la blockchain, garantissant plus de traçabilité, de transparence et une plus grande automatisation des processus.

A moins d'avoir vécu dans une grotte l'année dernière, vous avez sûrement entendu parler des NFT ou «Non-fungibles Tokens» (jetons non fongibles), ces objets numériques uniques vendus sur la blockchain, impossible à dupliquer. Grâce à la blockchain, les utilisateurs peuvent acheter des contenus numériques uniques (une peinture, un morceau de musique, un objet de collection) et disposer d'une preuve de propriété leur conférant une valeur commerciale.

La rareté des NFT peut leur faire atteindre des valeurs colossales, comme on a pu le voir pour la vente à 69 millions de dollars de The First 5000 Days de Beeple lors d'une vente aux enchères chez Christie's. Il existe désormais de nombreux marchés en ligne qui vendent des NFT, comme Dapper Labs ou Candy. De nombreux projets sont également en cours de développement, comme les billets de concert NFT qui pourraient imposer un prix maximum pour lutter contre le marché noir ou un pourcentage fixe revenant à l'artiste ou au lieu de concert.

Bien que certains gouvernements craignent que le contrôle ne leur échappe, la blockchain pourrait aider de nombreux Etats à fonctionner de manière plus fluide. Outre la sécurisation des documents, l'amélioration de l'efficacité bureaucratique, la responsabilisation et, de ce fait, la charge financière, la blockchain pourrait également supprimer des millions d'heures de travail inefficace chaque année grâce à des contrats intelligents et à un registre public transparent. 

Enfin, cette technologie pourrait être appliquée au vote. Comment envisager la fraude électorale lorsque chaque vote est inscrit de manière immuable dans la blockchain? Grâce à un système assurant l’utilisation unique de son jeton de vote sur la blockchain, la règle «un vote par personne» pourrait être plus facilement appliquée.

Aujourd'hui, il est devenu difficile de faire respecter la protection des droits d'auteur sur des supports numériques tels que la musique et les films. La blockchain pourrait être une bonne solution pour les téléchargements de contenu numérique afin de garantir que les artistes et les créateurs de contenu reçoivent leur juste part de compensation. En rendant les fichiers numériques uniques et en les empêchant d'exister à plusieurs endroits en même temps, on pourrait rendre le piratage pratiquement impossible.

Un exemple est Open Music Initiative, une société à but non lucratif basée à Boston qui a créé un protocole open-source pour identifier les créateurs originaux et les détenteurs de droits musicaux. En confiant les données à la blockchain, il est plus facile pour les artistes d'être reconnus pour leur travail et payés en conséquence.

Le bitcoin a été très critiqué pour sa consommation d'énergie, mais nous pouvons aussi utiliser la blockchain pour sauver la planète. Non seulement il existe de nouveaux protocoles qui prévoient de réduire les émissions de CO₂ comme RubiX, mais il y a aussi de nombreux projets verts basés sur la blockchain voient le jour.

Un excellent exemple est la start-up Single.Earth, une entreprise qui crée des revenus à partir d'arbres sans les abattre. Single.Earth est une plateforme numérique qui met en relation des propriétaires fonciers et des entreprises, afin que ces dernières aient la possibilité de compenser leurs émissions de carbone et de protéger la biodiversité en payant les propriétaires fonciers pour qu'ils conservent leurs forêts et leurs marais. Il s'agit d'un moyen indirect pour les entreprises d'équilibrer leur empreinte carbone afin d’atteindre une éventuelle neutralité. La plateforme de Single.Earth transforme les avantages environnementaux des arbres, tels que l'absorption du CO₂ et l'augmentation de la biodiversité, en un actif négociable. Les propriétaires fonciers sont ainsi incités à protéger l'environnement, car ils sont rémunérés pour le faire.

Comme vous avez pu le constater dans cet article, la technologie de la blockchain est applicable dans de nombreux domaines, qui dépassent de loin le simple plaisir spéculatif des crypto-monnaies. Bien qu’une blockchain spécifique ne saurait résoudre tous les problèmes, cette technologie apporte et continuera d'apporter de nouvelles solutions innovantes dans de nombreux domaines.