Le risque existe - Perspectives de Swiss Life

Swiss Life Asset Management

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La coalition italienne antisystème et les litiges commerciaux avec les Etats-Unis altèrent la confiance en Europe.

A retenir:

  • Les dernières statistiques dénotent une croissance soutenue aux Etats-Unis pour le deuxième trimestre.
  • Tandis que le chômage recule en Suisse, le revenu réel disponible pourrait diminuer en 2018.
Prévisions comparées

La coalition italienne antisystème met fin aux 52 semaines de lune de miel de l’Europe avec Emmanuel Macron. Après l’élection présidentielle française, les marchés financiers excluaient tout risque de désintégration de la zone euro. Aujourd’hui, selon l’enquête de Sentix auprès des investisseurs, ceux-ci perçoivent de nouveau plus sérieusement le risque qu’au moins un pays abandonne la monnaie unique.

Graphique du mois

Source: Macrobond
Etats-Unis - Indifférence aux prix de l’essence
Croissance du PIB
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 2,8% 2,9%
2019 2,2% 2,6%

La dynamique économique américaine inquiétait certains observateurs, surtout depuis la publication d’une croissance du PIB inférieure aux attentes pour le premier trimestre. Rappelons toutefois qu’un début d’année ralenti est plutôt la règle que l’exception outre-Atlantique depuis quelques années, sans doute imputable aux méthodes statistiques de correction des variations saisonnières. Le consommateur américain est toutefois revenu en force. Les ventes de détail du deuxième trimestre dénotent à ce jour une contribution de la consommation des ménages à la croissance globale supérieure à la moyenne. Sous l’effet de l’essor du marché du travail, de l’augmentation du patrimoine net et des baisses d’impôts, les ménages sont largement indifférents au gonflement de la facture énergétique. Même si leurs dépenses d’essence doivent augmenter, les Etats-Unis sont finalement bénéficiaires nets de la hausse des cours du pétrole. Devenu le deuxième producteur mondial de brut, le secteur voit son chiffre d’affaires croître, augmente ses investissements et ses embauches. En outre, même si Donald Trump se plaint de discriminations commerciales à l’encontre des Etats-Unis, le déficit commercial est devenu moins négatif dernièrement, au profit du PIB. Nous avons relevé nos prévisions de croissance pour le deuxième trimestre et pour l’année pleine. Une escalade des litiges commerciaux demeure toutefois un risque très réel, et pas seulement pour l’économie américaine.

Inflation
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 2,5% 2,5%
2019 2,1% 2,2%

L’inflation totale devrait atteindre 3% en juillet 2018, avant de reculer vers 2,2% pour la fin de l’année. En revanche, l’inflation sous-jacente (hors composants très volatils tels que l’énergie ou l’alimentaire) devrait selon nous se maintenir entre 2,1% et 2,3% pour les 18 prochains mois. Si les prix de l’énergie diminuaient encore davantage, nous devrions réviser nos projections.

Zone euro - Un ralentissement, sans plus
Croissance du PIB
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 2,0% 2,2%
2019 1,4% 1,8%

Les enquêtes auprès des entreprises dans toute l’UEM témoignent d’une modération depuis le début de l’année. L’indice de climat des affaires de l’institut allemand Ifo semble avoir atteint son plus-bas (à confirmer toutefois lors de sa prochaine parution). Les indices des directeurs d’achats se sont sensiblement infléchis, mais cette tendance devrait elle aussi se modérer à l’avenir. Ce ralentissement  s’est ressenti sur la croissance du PIB du premier trimestre, ce qui a entraîné une révision en baisse de notre estimation annuelle. Bien que le fossé se soit nettement creusé entre l’activité industrielle aux Etats-Unis et en Europe, la consommation semble tout aussi soutenue des deux côtés de l’Atlantique. La confiance des ménages mesurée par Eurostat n’a jamais été aussi haute depuis 2000. Les marchés du travail continuent de s’améliorer et les pressions salariales s’accumulent dans certains pays membres. En France, les ménages profitent de la baisse des cotisations sociales. Bien que le moral des entreprises reste affecté par les polémiques protectionnistes et que le ralentissement cyclique se poursuive, les taux de croissance devraient se maintenir au-dessus du potentiel durant une large part de l’année 2019. D’après les résultats des enquêtes, les perspectives d’investissement sont toujours favorables, mais moins que l’an dernier, dans la logique du ralentissement du cycle économique.

Inflation
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 1,6% 1,6%
2019 1,5% 1,6%

La BCE a relevé ses prévisions d’inflation à 1,7% pour 2018, 2019 et 2020. Soulignons qu’elle attend dorénavant une inflation sous-jacente de 1,9% pour 2020. Nous restons plus prudents, même si les fluctuations des changes et les prix de l’énergie doivent jouer un rôle majeur dans l’orientation des taux d’inflation à l’avenir. Affecté surtout par la politique italienne, l’euro va un peu remonter selon nous d’ici à la fin de l’année.

Royaume-Uni - Statistiques plus encourageantes
Croissance du PIB
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 1,1% 1,3%
2019 1,0% 1,5%

Ce 23 juin marquait les deux ans du référendum du Brexit. Les négociateurs ont neuf mois pour formaliser la future relation entre le Royaume-Uni et l’UE. La création continue de postes suggère que les employeurs préfèrent aujourd’hui embaucher pour répondre à une demande mondiale soutenue plutôt que d’investir dans des machines, estimant que la flexibilité du marché du travail national leur permettra de réduire rapidement les effectifs si un échec des négociations du Brexit entraîne une crise économique sévère. Entre-temps, la faiblesse durable de la livre alimente toujours la compétitivité britannique. Après un T1 ralenti, des chiffres comme l’indice des directeurs d’achats ou les commandes de la CBI (confédération industrielle britannique) se sont stabilisés, voire ont progressé en milieu d’année. Grâce à une météo favorable, aux noces princières et à la hausse du revenu réel disponible, les ventes de détail ont progressé de 1,9% au premier trimestre. Notre scénario de base table sur une croissance de 0,2%-0,3% pour chaque trimestre à venir, un peu en dessous du potentiel de l’économie.

Inflation
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 2,3% 2,5%
2019 2,0% 2,1%

Entre autres effets immédiats du référendum, la chute de la livre avait fortement renchéri les importations, d’où un indice des prix à la consommation en hausse à 3,1% jusqu’en novembre 2017. Six mois après, comme nous le pensions, l’inflation supérieure au niveau de confort de la Banque centrale s’est révélée temporaire. Après la stabilisation des changes et le ralentissement des dynamiques économiques en dessous du potentiel, la pression sur les prix est retombée. Même avec la hausse des prix de l’énergie, l’inflation annuelle est tombée à 2,4% en mai et ne devrait pas s’arrêter là (nous l’attendons à moins de 2% en fin d’année). Sur le marché intérieur, les entreprises disposent d’une très faible marge d’augmentation des prix. Les prix de vente attendus auraient chuté au plus bas selon la CBI.

Suisse - Une inflation de plus de 1%
Croissance du PIB
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 2,1% 2,2%
2019 1,2% 1,8%

Comme expliqué le mois dernier, le recul du taux de chômage suisse procédait de changements méthodologiques, qui ont surestimé le dynamisme du marché du travail national. Le revenu disponible des ménages devrait pâtir cette année du fait que la croissance nominale des salaires ne compense pas totalement l’inflation. Les dynamiques domestiques devraient toutefois rester solides selon nous. La situation extérieure obscurcit en revanche de plus en plus les perspectives économiques mondiales: les indices PMI des directeurs d’achats de tous les pays indiquent que la croissance mondiale synchronisée aurait atteint son pic au dernier trimestre 2017. Le tassement de la demande extérieure est plus préoccupant que la surévaluation du franc pour les exportateurs suisses. Le pays est en outre particulièrement exposé en cas d’escalade des litiges commerciaux sino-américains, puisque la Suisse est le premier exportateur européen vers la Chine. Les derniers événements justifient donc la prudence de nos prévisions de croissance pour 2019.

Inflation
  Swiss Life Asset Managers Consensus
2018 1,0% 0,9%
2019 0,9% 1,0%

Recul du franc et hausse des prix de l’énergie expliquaient essentiellement une inflation montée à 1% en mai, du jamais-vu depuis mars 2011. Ces facteurs ont disparu en juin: le franc s’est redressé face à l’euro et les cours du brut auraient atteint leur plus-haut. Le renchérissement passé des importations devrait toutefois continuer de tirer les prix à la consommation à la hausse. Ceux des services en Suisse vont aussi croître selon nous, hôtels et restaurants allant sans doute tester leur capacité d’augmentation des prix. L’inflation annuelle pourrait encore se hisser à 1,4% en novembre, avant que le ralentissement des loyers et l’érosion des effets de base ne la ramènent vers 0,9% mi-2019. Ces chiffres seront peut-être trop élevés en cas de chute des prix des matières premières ou d’envolée du franc.

Japon - Dans la tendance mondiale

Si l’économie japonaise faisait partie des principales bénéficiaires de la reprise mondiale synchronisée amorcée mi-2016, elle semble également être l’une des premières à subir les effets du ralentissement des dynamiques commerciales du monde développé. Les craintes nées du litige commercial sino-américain et l’incertitude croissante en Europe commencent apparemment à altérer le moral des entreprises. Les secteurs d’activité japonais les plus exposés à une montée du protectionnisme sont les constructeurs automobiles et les machines électriques. Entre-temps, les chiffres de la production industrielle publiés pour le deuxième trimestre dénotent une amélioration par rapport à la faiblesse des trois premiers mois de l’année. L’inflation continue en revanche de diminuer et pourrait bien repasser temporairement sous 0% avant fin 2018. Vu sous cet angle, les Abenomics seraient ainsi un échec, puisqu’une relance de l’économie accompagnée d’un retour durable de l’inflation à 2% reste hors de portée.

Chine - Nuages à l’horizon

Si les statistiques d’activité résistent bien depuis début 2018, de plus en plus d’éléments annoncent un ralentissement pour le reste de l’année. Premièrement, l’immobilier, moteur majeur de l’économie chinoise, a déjà passé son plus-haut. Deuxièmement, les mesures prises par le gouvernement pour réduire l’endettement financier pèsent sur l’octroi de crédit et sur les investissements en infrastructures. Ces éléments incarnent le prix à payer immédiat en termes de croissance pour améliorer le modèle économique à moyen terme. Troisièmement, la tension monte avec les Etats-Unis et nous n’excluons pas de nouvelles surenchères. La hausse annoncée de 25% des droits de douane sur 34 milliards d’USD de produits chinois devrait n’avoir qu’un effet direct limité sur la croissance du PIB, mais l’incertitude affecte les entreprises et l’investissement. Pour compenser, le gouvernement ajuste sa politique et, si l’objectif à long terme reste une amélioration de la stabilité financière, quelques mesures d’assouplissement ont été adoptées ces dernières semaines.

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