Le nouvel environnement de taux élevés est désormais propice aux solutions de court terme peu volatiles et à haut rendement ou à des solutions garanties.
Depuis quelques mois les risques augmentent aux Etats-Unis. La crise bancaire s’enlise. En effet, les banques américaines ayant moins de 250 milliards de dollars d’actifs ne sont pas considérées comme systémiques et ont donc la possibilité en théorie de faire faillite. Ces banques représentent pourtant 80% des prêts immobiliers professionnels et fournissent environ la moitié des prêts à la consommation et à l’investissement non-immobilier. La bonne nouvelle est que cette crise, en provoquant une augmentation des taux de crédit, se substitue à une hausse des taux de la banque centrale et aboutit à un ralentissement de l’économie et donc de l’inflation. C’est exactement ce que cherche à faire la Réserve fédérale (Fed) en relevant ses taux. Cet effet, couplé à un ralentissement des créations d’emplois et des premiers signes d’affaiblissement de l’inflation sous-jacente1, nous incite à penser que la limite de la Fed est probablement atteinte. Après dix hausses de taux consécutives, les taux directeurs vont probablement atteindre un taux maximum en étant passés de 0% (borne basse) début 2022 à 5% le 3 mai dernier.
A côté de cette crise bancaire américaine, se rajoute aujourd’hui la crainte du plafond de la dette. Janet Yellen, secrétaire d’Etat au Trésor, a déclaré qu’un défaut de paiement des États-Unis sur leur dette entraînerait le «chaos financier et économique» alors que l’opposition républicaine refuse toujours de relever le plafond de la dette sauf au prix de coupes drastiques dans les dépenses gouvernementales. Cette histoire n’est pas nouvelle et elle revient comme l’histoire du garçon qui criait au loup. En effet, cette procédure a été enclenchée à 78 reprises depuis le début des années 1960. Après avoir récolté moins d’impôts que prévus pour cette année, les États-Unis pourraient atteindre le mur de la dette dès le 1er juin. L’incertitude autour du plafond a systématiquement été défavorable au dollar et source de volatilité. En 2011, l’agence de rating S&P avait abaissé la notation des Etats-Unis de AAA à AA+ et avait justifié sa décision par «des risques politiques» de voir le pays prendre des mesures insuffisantes contre son déficit budgétaire. À l’époque la dette était deux fois plus faible qu’aujourd’hui (14’500 milliards de dollars contre 31’000 milliards).
Même si le risque est réel car c’est la première fois depuis 2008 qu’on constate une telle tension sur le CDS US il est fort probable qu’un accord de dernière minute soit trouvé.
L’autre plafond qui va probablement être relevé en fin d’année lors de la COP28 à Dubaï est le seuil de 1,5 degrés de limitation de l’augmentation des températures par rapport aux niveaux préindustriels. Il avait été fixé en 2015 lors des Accords de Paris pour lutter contre le réchauffement climatique à l’occasion de la COP21. Néanmoins, l’action politique dans les pays développés n’a jamais été aussi forte pour la transition énergétique, tant aux US (IRA) qu’en Europe (REPowerEU).
Dans ce contexte, notre scenario macroéconomique reste constructif. Alors que nous étions plus optimistes que le consensus en début d’année, c’est désormais le consensus qui s’est rapproché de nos prévisions. Nous ne voyons pas de récession aux Etats-Unis, uniquement une contraction modeste et temporaire de l’activité sur la deuxième moitié de 2023. L’économie mondiale sera tirée cette année par la Chine et l’Inde qui représenteront la moitié de la croissance mondiale. L’inflation devrait continuer de se normaliser.
Nous sommes passés d’un environnement de taux négatifs appelé «TINA» (there is no alternative, soit il n’y a pas d’alternative aux actions) à «TARA» (there are reasonable alternatives, soit il existe des alternatives raisonnables aux actions) car ce nouvel environnement de taux élevés est désormais propice aux solutions de court terme peu volatiles et à haut rendement ou à des solutions garanties. C’est une bonne nouvelle pour les investisseurs. L’adage de marché dit «sell in May and go away» (vendez en mai et partez) peut-être que cette année le mois de mai rimera avec opportunité.
Je vous souhaite une très agréable lecture de ce numéro, dans lequel nous examinons de plus près les divergences macroéconomiques en Europe, mais aussi entre les Etats-Unis et la Chine, et leur impact sur nos différentes classes d’actifs dans un contexte d’incertitude importante.