Le manque de visibilité pèse sur l’économie américaine et incite la Fed à l’attentisme

Michaël Nizard, Edmond de Rothschild Asset Management

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En Asie, l’activité s’affaiblit avec un indice PMI Caixin manufacturier, indicateur clé pour les PME exportatrices et le secteur privé, qui est passé en zone de contraction.
  • Donald Trump a renoncé à sa menace d'augmenter les droits de douane à 50% sur les importations européennes, préférant reprendre les négociations avec une échéance fixée au 9 juillet, date à laquelle la Maison-Blanche prévoit la conclusion de plusieurs accords.
  • L'inflation en Europe s'est établie à 1,9% en mai, en dessous de la cible, ce qui a permis à la BCE de procéder à une nouvelle baisse de son taux directeur de 25 points de base.
  • En Asie, l’activité s’affaiblit avec un indice PMI Caixin manufacturier, indicateur clé pour les PME exportatrices et le secteur privé, qui est passé en zone de contraction.

Les péripéties liées à la politique de tarifs douaniers de Donald Trump continuent de rythmer les marchés. Le 28 mai, les droits de douane réciproques ont été suspendus par le Tribunal américain du commerce international, mais rapidement rétablis en appel le 29 mai. La Maison-Blanche a ensuite évoqué des recours possibles avant de décider, le 30 mai, de doubler les taxes sur l'acier et l'aluminium, maintenant ainsi une surtaxe de 50%. L'Union européenne prévoit des contre-mesures à partir du 14 juillet.

Parallèlement, Donald Trump a fini par renoncer à sa menace de remonter les droits de douane à 50% pour l’UE dès le mois de juin, optant pour la reprise des négociations avec une échéance fixée au 9 juillet, date à laquelle la Maison-Blanche prévoit de conclure plusieurs accords. De même, la volonté de poursuivre les négociations avec la Chine semble finalement prévaloir, bien que les États-Unis aient accusé la Chine de ne pas respecter l’accord de fin mai concernant les livraisons de minéraux critiques. Les restrictions imposées par Pékin sont toutefois préoccupantes pour certaines entreprises, qui alertent sur le risque de cessation de production, qui pourrait mener à une déstabilisation croissante de l’économie mondiale.

Ces rebondissements sont révélateurs de négociations qui demeurent complexes malgré des dates butoirs rapprochées. Par ailleurs, ces négociations commerciales pèsent sur les taux américains alors que leur résultat est lié au financement budgétaire, d’autant plus que des sénateurs républicains rechignent à voter la proposition de loi budgétaire de Donald Trump du fait des risques de manque de financement.

Coté inflation, la décision des membres de l’Opep+ de reconduire la hausse de la production de pétrole de 411kb/jour pour juillet, contribue à maintenir des prix bas et à limiter l’inflation. Cette décision n'est cependant plus unanime, réduisant ainsi la probabilité de prolongation en août.

Aux États-Unis, la Fed reste prudente, M. Daly a souligné que même si l’inflation semble contenue à 2,5% par an, l’incertitude persiste pour les mois à venir. L’impact des droits de douane n’est pas encore visible dans les statistiques, puisque les entreprises ont augmenté leurs stocks. En outre, la confiance des consommateurs s’est améliorée en mai à 98 contre une prévision de 87,1 selon le Conference Board. Les ménages restent néanmoins préoccupés par les prix avec des anticipations d’inflation à 6,5% sur un an. En revanche, la dynamique des commandes, hors défense et aéronautique, a ralenti à -1,3% contre -0,1% attendu. L'environnement semble peser sur l'activité, comme en témoigne la contraction de l'ISM manufacturier à 48,5 en mai contre 48,7 en avril, ainsi que l’ISM des services à 49,9 contre 51,6 en avril. Les entreprises ont nettement réduit leurs importations avec une composante ISM chutant à 39,9 après 47,1 en avril et les enquêtes de la Fed de Dallas démontrent que près de la moitié des entreprises ont l’intention de répercuter les hausses de tarifs sur leurs prix. Le marché de l’emploi montre des signes contrastés: selon le rapport ADP, les créations d'emplois privés ont chuté en mai à 37’000 contre 114’000 attendus, tandis que l'enquête JOLTS du Bureau of Labor Statistics indique une hausse des offres non pourvues en avril.

La BCE, quant à elle, jouit d'une meilleure visibilité sur l'inflation. La croissance des salaires négociés a nettement ralenti sur le 1er trimestre 2025, à 2,4% contre 4,1% au dernier trimestre 2024, ce qui constitue un facteur positif pour l’inflation dans les services, qui s’établit à 2,1% en glissement annuel contre 2,4% en avril. L’inflation européenne est ressortie à 1,9% en mai, sous la cible, permettant à la BCE d’annoncer une nouvelle baisse de taux de 25 points de base début juin. Le ton de la BCE s’est avéré plus restrictif qu’attendu du fait des incertitudes liées aux résultats des négociations commerciales – C. Lagarde évoquant une possible pause lors de la prochaine réunion.

En Asie, l’activité s’affaiblit avec un indice PMI Caixin manufacturier, indicateur clé pour les PME exportatrices et le secteur privé, qui passe en territoire de contraction à 48,3 en mai contre 50,4 en avril. Au Japon, la remontée des taux longs, avec un 30 ans à plus de 3%, a ravivé les craintes sur la soutenabilité de la dette, bien que les taux réels restent sur des points bas, limitant ce risque et révélant une politique monétaire toujours accommodante.

Au regard des niveaux de valorisation peu attractifs, nous restons prudents sur les actions et nous préférons le crédit d’entreprises de bonne qualité. Nous maintenons notre vue négative sur le dollar.

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