La sécurité et la qualité d'abord

Maria Stäheli, Fisch Asset Management

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Le thème omniprésent de l’inflation est désormais largement intégré dans les spreads des obligations. L’inflation et sa persistance ne surprennent plus beaucoup les investisseurs.

Sur les marchés obligataires, les obligations d’entreprises notées Investment Grade (IG) ont été beaucoup plus pénalisées que la plupart des autres segments pendant la chute des valorisations de ces derniers mois, et ont été jusqu'à sous-performer même de nombreux marchés actions. À présent, cependant, la page est tournée, et les investisseurs portent une attention accrue aux obligations IG. En effet, quand les prix du marché anticipent davantage un risque de récession, les obligations de grande qualité et correctement valorisées offrent une protection relativement bonne par rapport au crédit moins bien noté ou aux actions.

Le thème omniprésent de l’inflation est désormais largement intégré dans les spreads des obligations. L’inflation et sa persistance ne surprennent plus beaucoup les investisseurs. De plus, la perspective d'une intervention musclée de la part des banques centrales au cours de l’année est maintenant certaine. Les prix reflètent actuellement des anticipations de relèvement des taux de la banque centrale américaine de l’ordre de 2 points de pourcentage d’ici à la fin de l’année. Quant à la BCE, elle devrait procéder en juillet à un premier resserrement des taux, pour relever ces derniers d’un point de pourcentage sur l’ensemble de l’année. Toutefois, la marge d'erreur des anticipations est assez large. Et, dans la mesure où l’incertitude à l'égard des taux dure depuis longtemps déjà, un tour de vis encore plus prononcé serait beaucoup moins perceptible, du moins sur le plan psychologique, qu'il ne l’aurait été au début du cycle de relèvement des taux. Nous prévoyons cependant des effets de surprise plus marqués en ce qui concerne le thème d’une potentielle récession.

En effet, la politique chinoise de tolérance zéro par rapport à la Covid est à l’origine d’un fléchissement marqué de la conjoncture mondiale, et la situation traîne en longueur par rapport aux estimations de la plupart des intervenants de marché au premier trimestre. De plus, la hausse des prix des matières premières freine le développement économique. Pendant les décennies précédentes, les récessions qui se profilaient ont pu être accompagnées par les banques centrales à l’aide d'un assouplissement de leur politique monétaire, mais cette fois les choses seront différentes, car lutter contre l’inflation est devenu indispensable. Par conséquent, les primes de risque augmentent et imposent aux investisseurs de réfléchir stratégiquement à leur allocation d'actifs. Il pourrait en résulter un mouvement de désaffection pour les classes d’actifs risquées, au profit de marchés plus sûrs, car en cas de récession, les priorités sont la sécurité et son corolaire, la qualité. Ces conditions profitent aux obligations d’entreprises IG, segment de grande qualité offrant une compensation du spread attractive.

Ces titres sont également bien positionnés en cas d’atterrissage en douceur de l’économie, car les entreprises solides se distinguent typiquement par leurs caractéristiques financières et leurs obligations ont alors tendance à mieux se comporter que le crédit High Yield, moins robuste financièrement ou les actions, pendant les phases d’essoufflement de la conjoncture. Leur composante de spread procure par ailleurs une protection du pouvoir d'achat plus efficace que les emprunts d'État ou les liquidités. Pour l’heure, nous privilégions les obligations IG en euros, car les spreads de la zone euro sont devenus beaucoup plus intéressants que ceux des autres régions, tout en offrant des rendements aussi élevés qu’en 2013. Pour autant, les courbes de taux s'étant nettement aplaties, notre préférence va aux courtes échéances à moyennes, et nous procédons à une gestion active de la duration. À moyen terme, le marché des obligations d’entreprises en USD devrait se confronter au fort renchérissement des coûts de couverture de change, qui réduit considérablement les rendements nets pour les investisseurs européens et asiatiques.

Nous sommes actuellement attentifs aux titres du secteur financier, qui bénéficient de l’abandon des taux d’intérêt négatifs. Malgré le tassement prononcé de la conjoncture, les banques disposent en ce moment d’importantes réserves de capital et de fondamentaux robustes. Nous considérons également que la présence d’obligations de secteurs non cycliques et d’obligations hybrides à duration courte se justifie au sein d’un portefeuille défensif. L’environnement général demeure de toute évidence difficile, mais après l’important repli qui s’est déjà produit, nous restons optimistes et surveillons attentivement les prochaines évolutions du segment des obligations d’entreprises IG.

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