La nouvelle tectonique des échanges internationaux 

Wilfrid Galand, Montpensier Finance

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Les prochains échanges entre la nouvelle administration américaine et les autorités de Pékin seront cruciaux.

En Asie, le Partenariat commercial économique régional (RECP) du 15 novembre montre l’ambition de la Chine, la régionalisation du commerce mondial et place Taïwan au centre de l’échiquier. 

Le 15 novembre, à Hanoi, les dix pays de l’association des pays du sud-est asiatique (Asean) – Singapour, Malaisie, Indonésie, Thailande, Cambodge, Vietnam, Laos, Myanmar, Philippines, Brunei - rejoints par l’Australie, la Nouvelle Zélande, le Japon, la Corée du Sud et surtout la Chine, ont signé un nouvel accord de libre-échange, le Partenariat commercial économique régional (RECP). 

Ce partenariat, le premier dans l’histoire qui réunisse les ennemis historiques que sont le Japon, la Corée du Sud et la Chine, vient en miroir de celui abandonné par Donald Trump dès les premiers jours de son mandat, le Partenariat TransPacifique (TPP). Négocié et signé in extremis à la fin de son mandat par Barack Obama dans le cadre de son «pivot asiatique», il a été très vite barré d’un trait de plume par le nouveau président, soucieux d’appliquer au plus vite sa doctrine «America First» et de limiter autant que possible les échanges commerciaux «injustes» (non soumis à droits de douane) accusés de détruire l’emploi industriel américain. 

Conséquence du repli sur soi de l’Amérique de Trump, la Chine, seul pays au monde à envisager une croissance cumulée de 10% sur 2020 et 2021, a donc pris la place des Etats-Unis comme pierre angulaire de la «maison commune asiatique». Mais, tout autant que la montée en puissance chinoise, Le RECP consacre une tendance nette à la régionalisation des échanges et à la juxtaposition d’une «zone Chine» et d’une «zone Amérique» entre lesquelles l’Europe cherche à trouver sa place. 

Car malgré l’aversion profonde de Trump au libre-échange, l’atypique président américain a vite compris, sous la pression notamment de l’industrie automobile de son pays, qu’une union douanière Nord-américaine était cruciale pour le dynamisme du tissu économique américain. Après avoir dénoncé le traité NAFTA lors de son entrée en fonction, il s’est ainsi empressé de le recréer dès août 2018, sous un nouvel acronyme : le traité commercial Etats-Unis Canada Mexique. 

Une nouvelle «tectonique des plaques» du commerce mondial se met donc en place. Pour les marchés, faute d’une réforme en profondeur de l’Organisation Mondiale du Commerce, c’est une bonne nouvelle car cela consacre la nécessité de redonner de la vigueur aux échanges internationaux, en constante perte de vitesse. 

Reste néanmoins une question fondamentale : quelle sera la place de Taïwan, pôle majeur de l’industrie de pointe et des semi-conducteurs en particulier, protégé historique des Etats-Unis et enjeu crucial pour la Chine?

Alors que la technologie est plus que jamais au coeur de la rivalité sino-américaine et que le RECP intègre soigneusement des dispositions précises de protection de la propriété intellectuelle, les prochains échanges entre la nouvelle administration américaine et les autorités de Pékin seront cruciaux. Faute de quoi, Taipei pourrait bien être la faille de San Andreas de cette nouvelle configuration planétaire.

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