L’effet Biden XXL

Laurent Denize, ODDO BHF AM

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Attention à l’impact potentiel du nouvel environnement reflationniste sur la valorisation des actifs risqués à court terme.

Alors que la marche en avant des actions a récemment été perturbée par la hausse des taux d'intérêt, c’est l’amélioration des bénéfices, bien plus forte que prévu, qui devrait entraîner une nouvelle hausse des indices sur l’année 2021. Nous relevons nos objectifs de performance sur les actions globales sur la base de prévisions de bénéfices par action plus élevés, à savoir +5% par rapport à nos anticipations initiales pour 2021 soit une hausse anticipée révisée de 32%. Cet optimisme s'explique par la taille du «stimulus Biden» adopté par les deux chambres. Nous anticipions au mieux 1400 milliards de dollars, c’est donc 500 milliards de plus que prévu. Si on fait la somme des montants mis en jeu, nous approchons aujourd’hui d’une enveloppe qui représente 25% du PIB américain. Avec 1900 milliards de dollars, ce plan de relance est inédit par sa taille mais aussi par les mesures qui le composent puisqu’il s’agit en majeure partie de paiements directs aux ménages ou de prêts aux PME «garantis» par la FED. Nous devrions donc observer une accélération des dépenses de consommation sans précédent si ces mesures s’accompagnent d’un regain de confiance des ménages lié à la vaccination. Au-delà du «stimulus Biden», rappelons que l’épargne forcée des ménages (soit environ 10% du PIB) devrait également contribuer à la forte accélération de la croissance au-delà de son potentiel en 2021.

Une révision à la hausse des croissances bénéficiaires

Les montants en jeu sont colossaux et justifient de réviser les BPA, notamment ceux du quatrième trimestre qui devraient être encore plus robustes que prévu. Toutefois, cette révision à la hausse de séquences bénéficiaires ne représente qu'un taux de croissance annuel composé de 10% entre 2019 et 2022. Certes la période décrite inclut la pandémie, mais en moyenne et au niveau global la capacité des sociétés à s’adapter et traverser ce cycle a été remarquable. Par exemple, pour les sociétés du MSCI World, la marge d’EBITDA est passée d’une moyenne de 17,5% les 5 dernières années, à 15,7% en 2020 mais devrait de nouveau progresser en 2021.

Il faudrait un emballement beaucoup plus marqué des taux
ou une erreur de communication de la FED pour inverser la tendance.
Des valorisations actions qui restent raisonnables

Le PER du S&P 500 était de 18,5 fois les bénéfices estimés en décembre 2019, alors que le rendement à 10 ans était autour de 2% et les rendements réels à 15 points de base. Nous pensons que le taux 10 américain devrait s’établir autour de 1,80% en 2022 et rappelons que même si les taux réels à 10 ans américains ont récemment augmenté, passant de -1,10% à -0,80%, ils restent largement en territoire négatif. Si on inclut cette hausse de BPA dans les valorisations futures le PER passe de 22 fois les résultats à 19,5 fois, ce qui reste raisonnable compte tenu de la répression financière sur les taux. Attention encore une fois à la dispersion sectorielle, de style et géographique. Toutefois, le constat s’avère définitivement positif sur l’ensemble de l’année. Il faudrait un emballement beaucoup plus marqué des taux ou une erreur de communication de la FED pour inverser la tendance.

Prudence néanmoins sur les actifs risqués à court-terme

La stratégie que nous privilégions n’est pas de renforcer des positions sur ces niveaux mais en revanche de profiter d’une consolidation vraisemblable pour ajouter de l’exposition aux actions mondiales. Les Etats-Unis surprennent de nouveau positivement dans leur capacité de réaction et d’adaptation, alors qu’en même temps l’Eurozone s’enlise dans des problèmes logistiques d’approvisionnement et de distribution de vaccins qui risquent de limiter le rebond macroéconomique. Le différentiel de croissance à terme des deux régions est un nouveau facteur à prendre en compte. En cas de décalage marqué dans les prochains mois, il s’agira d’augmenter le poids des actions américaines et de diminuer celui de l’Europe, même si le biais cyclique est moins marqué Outre-Atlantique.

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