L’action UBS affronte un mur de scepticisme

Emmanuel Garessus

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Au moment où Credit Suisse sort de la bourse, les professionnels sont très réservés sur les perspectives à court terme d’UBS.

Lundi matin, tous les regards des médias seront fixés sur la sortie de Credit Suisse de la Bourse suisse. Les investisseurs se concentreront, eux, sur UBS et ses perspectives. Allnews a voulu faire le point sur les opinions des représentants de la place financière sur l’action de la grande banque.

Une opinion claire et définitive pour ce groupe dont la valeur boursière atteint 63 milliards de francs, après une hausse de 6% cette année, est extrêmement compliquée tant les incertitudes économiques, politiques et juridiques demeurent. Charles-Henry Monchau, directeur des investissements auprès du groupe Syz, se dit par exemple réservé à l’égard de l’ensemble des banques «en raison de l’opacité de leur bilan», indique-t-il à Allnews.

«Le premier critère porte sur le processus d’intégration de Credit Suisse au cours des 3 à 6 prochains mois.»

Le dossier est très compliqué, confirme Antoine Spillmann, associé exécutif du gérant de fortune Bruellan: «Nous ne sommes pas intéressés par des titres tels que celui d’une banque suisse qui se frotte aux grands acteurs américains de l’investment Banking sur un marché que nous connaissons peu». Bruellan préfère, dit-il, les sociétés familiales, avec un actionnaire de référence, qui met sa peau en jeu et qui s’engage pour une rentabilité à long terme pour tous les actionnaires.

Le groupe bancaire dispose toutefois d’une situation de force dans la gestion de fortune et bénéficie d’un management de grande qualité. Nos contacts évoquent souvent les qualités de Sergio Ermotti à la tête de la société. Mais le processus d’intégration sera semé d’embûches. Moritz Baumnann, responsable de la recherche auprès du gérant Albin Kistler, déclare conserver les positions UBS détenues, mais attendre que l’intégration soit réalisée avant d’obtenir une image plus claire des perspectives boursières du titre.

Pour juger de l’action UBS, «trois aspects majeurs sont à mentionner», relève Beat Wittmann, associé et président du conseil d’administration de Porta Advisors.

«Le titre devrait être confronté aux interférences politiques, notamment dans la perspective des élections fédérales.»

Le premier critère porte sur le processus d’intégration de Credit Suisse au cours des 3 à 6 prochains mois. Dans un contexte de hausse des taux d’intérêt et d’un possible recul de commissions, le titre devrait être confronté aux interférences politiques, notamment dans la perspective des élections fédérales, note-t-il. Quantité de propositions sont de caractères populistes, ajoute-t-il, et les conflits d’intérêts ne seront pas absents, ainsi qu’il ressort de la composition de la Commission d’enquête parlementaire.

Le second aspect compare la situation des banques en Europe et aux Etats-Unis, indique Beat Wittmann. Les établissements américains bénéficient, à son avis, d’un avantage concurrentiel structurel. Elles sont en avance dans le cycle économique. Leur modèle d’affaires est plus solide et leur capacité d’exécution de la stratégie est plus convaincante qu’au sein des banques européennes.

La troisième considération fait intervenir les perspectives très favorables à 3 ou 5 ans. «Je suis positif à long terme sur l’action UBS en raison de l’excellente affaire que représente le rachat de Credit Suisse, de son prix très bon marché - mais sans être de sa faute-, et de la solidité du management et du modèle d’affaires centré sur la gestion de fortune», conclut Beat Wittmann. Le risque se situe dans l’exécution de l’intégration. Pour le pays lui-même, le rachat est positif, ajoute-t-il.

Andreas Venditti, de Vontobel, déclare avoir réduit son objectif de cours de 22,5 francs à 19,5 francs après le rachat de Credit Suisse.

Parmi les analystes spécialisés sur les banques, Andreas Venditti, de Vontobel, déclare avoir réduit son objectif de cours de 22,5 francs à 19,5 francs après le rachat de Credit Suisse, en conservant le titre UBS à l’achat. «Je l’ai modifié parce que le profil de risque a changé», déclare-t-il à Allnews. Parmi les autres financières à l’achat, Vontobel apprécie Partners Group et VZ Holding.

Andreas Venditti ne s’attend à aucune information majeure lundi. Il préférera scruter les chiffres présentés le jeudi 31 août prochain, sans doute accompagnés d’une réévaluation de la stratégie et d’éventuelles considérations sur le maintien ou non de Credit Suisse en Suisse. L’action reste à l’achat compte tenu du prix du rachat, de la garantie de 9 milliards de francs apportée par la Confédération et de l’amortissement des obligations AT1.

Les considérations politiques représentent un risque pour le titre. «Si les idées telles que le triplement des fonds propres étaient jugées réalistes par le marché, l’action UBS ne serait pas à 18,3 francs, mais bien plus bas», note-t-il.

Le marché analyse les banques d’un oeil objectif et froid. Si les exigences de capital et de liquidités devaient être plus dures que pour d’autres grandes banques internationales, UBS serait désavantagée par rapport à la concurrence et pourrait même se demander, selon l’analyste, si elle resterait dans le pays. Le marché n’anticipe aucunement un tel scénario.

Les risques sont également juridiques. Outre l’incertitude portant sur les questions propres à UBS, par exemple sur son procès en France, des questions demeurent sur Credit Suisse, par exemple sur le sort du règlement de l’affaire des obligations AT1. Rn résumé, si les nuages s’amoncellent et devraient ternir les perspectives ces prochains moi, l’action UBS conserve la confiance de plusieurs experts dans optique à long terme.

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