Intelligence artificielle et recrutement

Dorothée Tchaba

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Les algorithmes toujours plus présents dans les processus d’embauche en Suisse.

L’intelligence artificielle (IA) s’introduit de plus en plus dans les processus de recrutement des entreprises helvétiques. Un hasard? Pas vraiment. En effet, l’IA touche presque tous les domaines. Sous l’effet combiné du «big data» et de l’IA, le métier de recruteur rencontre des opportunités et des défis menant à l’embryon d’une nouvelle forme de recrutement.

Bien qu’il n’existe pas de définition unique de l’IA, celle-ci peut d’une façon simple se définir comme un ensemble de techniques et d’algorithmes permettant à une machine de résoudre des problèmes logiques ou de réaliser des tâches en simulant une intelligence humaine.

Si l’IA promet des perspectives intéressantes depuis quelques années dans le processus de recrutement, des questions se posent avec récurrence: L’IA est-elle adaptée à toute catégorie d’entreprise? Quels sont les outils utilisés et leurs impacts sur le processus? L’IA prend-elle de plus en plus le pas sur l’humain en matière de recrutement?

L’absence d’utilisation des chatbots et des robots humanoïdes en Suisse
s’explique par le fait que l’IA dite forte n’est pas encore maîtrisée.
IA et recrutement: une question de taille!

L’IA n’est pas destinée à toutes les entreprises. Il ressort d’une enquête menée dans le cadre du travail de Bachelor HEG de la signataire de l’article, que le recours à l’IA dans la gestion du recrutement est principalement fonction de la taille de l’entreprise, du nombre annuel de recrutements et du secteur d’activité. En effet, tous les grands groupes, les multinationales de grande taille et les agences de placement qui gèrent 300 recrutements ou plus par année, utilisent des logiciels d’IA. Les PME quant à elles se limitent aux outils bureautiques, aux progiciels classiques et aux plateformes digitales de recrutement.

Outils et impact de l’IA en matière de recrutement

Sur le plan international, l’IA se déploie au travers de logiciels de gestion de candidature ATS (Applicant Tracking System), de logiciels d’entretiens automatisés, de chatbots et de robot humanoïde. En Suisse, l'enquête montre que l’usage de l’IA se limite aux ATS et aux vidéos d’entretiens automatisés dotés d’un logiciel RPA (Robotic Process Automation). En effet, deux-tiers des agences de placement et 100% des grands groupes et multinationales utilisent un ATS tel que Taleo, Avature, Eolia, AssessFirt. Les grandes sociétés utilisent également des logiciels de vidéo d’entretien automatisé telles que HireVue, et VidAssess. Considéré comme l’outil d’IA le plus avancé en Suisse dans le domaine du recrutement, cette technologie intègre plusieurs types d’algorithmes intelligents tels que l’analyse sémantique, le traitement du langage et le décryptage des mimiques du visage. L’absence d’utilisation des chatbots et des robots humanoïdes en Suisse s’explique par le fait que l’IA dite forte (IA qui est censée raisonner et interagir avec son environnement) n’est pas encore maîtrisée.

L’humain au centre du processus

Malgré l’essor de l’IA, les professionnels interviewés affirment qu’il n’est pas concevable que l’ensemble du processus soit piloté par des algorithmes d’IA: en tant qu’outil de support, l’IA intervient uniquement pour les phases de sourcing et de présélection des candidats. Il peut aussi parfois contribuer à la réalisation de tests prédictifs des profils de cadre.

Recruter reste une activité pour laquelle
les compétences sociales sont essentielles.

Par contre, l’enquête révèle que le recruteur humain contribue à plus de 80% dans le processus. En effet, recruter reste une activité pour laquelle les compétences sociales sont essentielles. Le recruteur humain, contrairement à un logiciel, utilise ses compétences interpersonnelles, transversales et cognitives pour définir les besoins (présents et futurs) de l’entreprise et approfondir les enjeux liés au recrutement. Ces compétences spécifiques de l’être humain sont à ce jour difficilement modélisables par des algorithmes de Machine Learning ou de Deep Learning, le recruteur humain reste essentiel dans le processus: il contrôle, analyse et finalement prend la décision d'engagement.

Que faut-il encore prendre en compte?

Il ressort de l’enquête que les professionnels des ressources humaines devraient tenir compte du concept de «fusion skills» soulevé par l’auteur Américain Paul Daugherty (CTO de Accenture) dans son ouvrage «Human + Machine». Il s’agit de compétences qu’il convient de développer et de maîtriser pour travailler conjointement avec la machine, afin de fournir des résultats meilleurs que ceux que l’humain ou la machine ne pourraient atteindre seuls.